Metro France : « Nous soutenons une chaîne de valeur durable »

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Inflation, place du digital, relation avec les producteurs, démarche écologique, réduction du gaspillage alimentaire… Pascal Peltier, directeur général de Metro France, fait le point sur les défis majeurs qui vont marquer 2025.

Pascal Peltier, directeur général de Metro France Crédit : DR

Quelles sont les priorités de Metro en 2025 ?

Metro poursuit sa croissance en combinant points de vente physiques, livraison et e-commerce. Le marché de la restauration se faisant pour 80 % en livraison, il est essentiel pour nous de développer cette activité afin de consolider notre position de leader (16,2 % de parts de marché sur la restauration commerciale). Historiquement, nos halles étaient uniquement des points de vente physiques et nous les avons adaptées pour intégrer des zones de préparation multitempérature. Nous avons aussi ouvert des plateformes 100 % dédiées à la livraison comme à Savigny-le-Temple, en Seine-et-Marne.

Cette ouverture marque le début d’un réseau logistique national visant à accélérer les livraisons, augmenter les capacités de préparation, et intégrer de nouveaux grands comptes. Le e-commerce, quant à lui, est le troisième pilier de notre stratégie omnicanale : soutenue par une plateforme de 16000 m2 près d’Amiens et des partenariats avec des marchands tiers, nous pouvons livrer en moins de 48 heures plus de 200000 références.

Vous renforcez également l’expérience client dans vos halles?

Oui, nos halles restent notre premier pilier et en 2024, nous en avons transformé 60 %, et il nous en reste donc 40 % qui vont suivre les mêmes évolutions. Ces changements se concentrent sur plusieurs axes : rendre notre offre plus visible et accessible avec davantage de palettes au sol et des packagings prêts à vendre, élargir notre gamme de surgelés pour mieux répondre à la demande de la restauration, proposer des points d’animation et de dégustation mettant en avant des produits locaux et nos marques de distributeurs. Nous avons également rénové nos espaces d’accueil pour les rendre plus ouverts, avec des zones dédiées aux échanges entre nos clients et nos équipes.

Quelle place prend le digital dans votre stratégie ?

Metro est un acteur majeur du digital, et nous équipons nos clients avec des solutions telles que notre solution de site Internet, de caisses digitales, de prise de commandes via tablette, et de paiement par QR code. Nous avons 55000 clients qui utilisent ces outils. Notre priorité est d’accompagner nos clients dans leur quotidien. Nous avons ainsi lancé notre caisse enregistreuse tout-en-un « Dish Pos » et nous comptons déjà plus de 1300 restaurateurs qui l’utilisent: c’est une vraie fierté de voir à quel point cette solution répond à leurs besoins. Il s’agit d’une solution Cloud, simple et performante, qui aide les restaurateurs à mieux gérer leurs établissements et optimiser leurs opérations.

Ces solutions permettent d’être à la page tout en réduisant les coûts par rapport aux grandes plateformes. Nous avons aussi notre application Metro sur Android et sur iOS, qui permet de consulter nos gammes, passer commandes, gérer ses factures et suivre les offres promotionnelles. Elle est utilisée par 79 % de nos clients. De plus, notre service de conception et d’aménagement de cuisine et de salle de restaurants, utilisant des logiciels professionnels, permet de créer un restaurant clé en main, avec un service après-vente reconnu.

Comment agissez-vous face à l’inflation ?

L’inflation impacte directement nos clients. En 2024, nous avons observé une baisse de la fréquentation dans les restaurants ainsi qu’une diminution du ticket moyen. Les consommateurs optent de plus en plus pour des plats moins chers, en choisissant par exemple de la volaille plutôt que de la viande rouge. Les restaurateurs réagissent en ajustant leurs menus, proposant des prix promotionnels et des menus plus serrés, une tendance qui touche aussi bien les grandes chaînes que les indépendants. Chez Metro, cette situation nous préoccupe, car elle a des répercussions sur l’activité de nos clients. Pour les soutenir, nous agissons sur deux leviers essentiels : la visibilité et la compétitivité des prix. Pour offrir plus de visibilité, nous nous engageons à stabiliser les prix autant que possible, en particulier sur les produits soumis à des variations de cours comme les fruits, légumes et produits de la mer.

Chaque semaine, nous envoyons les meilleures offres sur des produits clés par SMS ou e-mail. Concernant les autres produits, tels que l’épicerie, les boissons ou la crémerie, nous mettons tout en œuvre pour limiter les fluctuations de prix. Pour la compétitivité des prix, nous avons réorienté notre stratégie de promotions. Au lieu des promotions classiques basées sur des volumes élevés difficiles à stocker, nous avons mis en place une mécanique « acheter plus, payer moins ». Plus le nombre d’unités achetées est important, plus la réduction l’est également, avec des prix garantis pendant au moins deux mois. Par ailleurs, nous avons identifié une centaine de produits essentiels pour tous types de restauration, comme le beurre, la crème, certains poissons ou produits frais, sur lesquels nous nous engageons à être 15 % moins chers que le marché, grâce à notre pouvoir de négociation et à une réduction de nos marges.

Que faites-vous pour valoriser les producteurs français ?

Il faut savoir que nous entretenons des relations étroites avec les fédérations agricoles. Depuis 2021, avec la charte Origine France, notre objectif est de promouvoir les produits agricoles français, notamment dans la restauration hors domicile. Chaque année, les résultats des actions de Metro, audités par KPMG, permettent de suivre précisément l’évolution de la part de produits français dans les achats des restaurateurs. Malgré les crises conjoncturelles qui ont affecté certaines filières, nous avons maintenu des niveaux de vente élevés pour l’Origine France et enregistré des progrès notables sur le porc, le veau et les volailles, tout en valorisant la saisonnalité pour les fruits et légumes.

Par ailleurs, tous les ans, nous organisons des mini-salons de l’agriculture dans nos halles, permettant aux producteurs locaux de présenter leurs produits aux restaurateurs, tout en leur racontant l’histoire de leur production. Cela aide les restaurateurs à intégrer ces produits à leurs menus et à valoriser l’origine locale auprès de leurs clients. Nous avons également renforcé le sourcing local dans nos halles, en référençant des produits dans un rayon de 50 à 100 km, ils représentent aujourd’hui 10 à 15 % de notre offre.

Pour faciliter leur insertion, les démarches administratives sont simplifiées et nous appliquons une politique de prix de marché, sans négociation, garantissant ainsi une plus grande transparence pour les producteurs. Nous souhaitons aussi mieux rémunérer les agriculteurs, comme avec notre gamme de lait « Engagé pour l’avenir ». De plus, nous collaborons avec les coopératives agricoles pour adapter leurs produits aux besoins spécifiques de la restauration. Par exemple, avec Terena, nous avons créé une gamme de volailles adaptée à la RHD. Nous avons aussi mis en place un accord tripartite avec Labeyrie et la Coopérative Lur Berri dans lequel nous garantissons l’achat de canards entiers sur plusieurs années, permettant une valorisation complète de l’animal. Ces initiatives visent à soutenir une chaîne de valeur durable où producteurs et restaurateurs bénéficient d’une rémunération juste et stable.

Que faites-vous pour réduire votre impact carbone ?

Nous avons réalisé notre bilan carbone et analysé l’impact de notre activité, et 85 % de celui-ci est lié aux produits que nous commercialisons. Nous agissons activement pour diminuer notre empreinte, avec un focus sur trois axes : l’énergie, la logistique et notre marque distributeur. En matière d’énergie, nous avons réduit notre consommation et, aujourd’hui, plus de la moitié de notre énergie provient de sources renouvelables. Nous avons aussi investi dans des projets solaires et éoliens. Côté logistique, nous optimisons nos trajets et avons baissé le nombre de plateformes, tout en modernisant nos infrastructures.

Nous encourageons aussi nos clients à choisir des créneaux de livraison plus souples, l’après-midi par exemple, ce qui permet de réduire l’empreinte carbone de chaque tournée. Nous investissons également dans des véhicules moins polluants. Enfin, comme nous sommes convaincus que la réduction de notre empreinte carbone passe par une collaboration avec nos fournisseurs et clients pour adopter des pratiques plus responsables à chaque étape, nous avons mis en place un index de durabilité pour évaluer et diminuer l’impact environnemental, notamment sur nos produits sous marque propre.

En quoi consiste cet index de durabilité ?

Il s’agit d’évaluer et réduire l’impact environnemental des produits, en collaboration avec nos fournisseurs. Cet outil repose sur cinq critères : impact climatique, déforestation, origine et transport, aspects nutritifs, et bien-être animal. Ensemble, nous établissons une feuille de route sur plusieurs années, fixons des objectifs de réduction d’empreinte carbone, et suivons des indicateurs de progrès. L’objectif est d’accompagner nos 4 000 PME et TPE partenaires, souvent sans les ressources nécessaires, en jouant un rôle de conseil. Avec une ambition de baisser notre empreinte carbone de 70 % d’ici 2050. Nous assumons pleinement notre responsabilité en travaillant main dans la main avec nos fournisseurs.

Autre sujet : le gaspillage alimentaire. Quelles actions mettez-vous en place pour le limiter ?

Nous investissons dans des outils pour optimiser les commandes et adapter les formats des produits, limitant ainsi les surplus et la détérioration. Pour valoriser les invendus, toutes nos halles redistribuent les produits à des associations, représentant l’équivalent de dizaine de millions de repas offerts. Nous avons aussi lancé des cuisines solidaires où la viande invendue est transformée en portions prêtes à cuisiner. Enfin, nous impliquons nos clients en les connectant à l’application Too Good To Go, leur permettant de vendre leurs invendus à prix réduit.

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