Le coliving, une offre en essor

  • Temps de lecture : 6 min

C’est un concept qui prend de l’ampleur en France. Le coliving est une offre hotelière hybride, mettant à disposition de ses clients plusieurs espaces de vie. Promoteurs, foncières et d’autres entreprises investissent ce segment répondant à des modes de vie en pleine évolution.

Coliving
L’ECLA Paris Massy Palaiseau (Essonne) d’UXCO Group est la plus grande résidence d’Europe dédiée au coliving. Crédits : DR.

« La pandémie de la Covid-19, en faisant émerger de nouveaux modes de vie (essor du télétravail, besoin de flexibilité, recherche d’ancrage local…), a accéléré le développement des marchés du résidentiel géré. » Cette observation issue de l’étude de KPMG sur l’industrie hôtelière française en 2022, relayée dans nos colonnes l’an dernier, s’applique notamment au coliving. Cette offre hybride – au croisement entre l’hôtellerie et le résidentiel traditionnel – se développe depuis quelques années en France, essentiellement dans les grandes villes et en région parisienne. S’apparentant parfois au principe de la colocation, le coliving s’appuie sur des services hôteliers novateurs et des modalités de tarification différentes d’une colocation classique.

Au sein d’une résidence de coliving, on paye un forfait comprenant l’électricité, le ménage, les charges et différents services mis à disposition des « colivers » : espace de travail, salle de sport, studio de musique, salle de cinéma, toit-terrasse aménagé… « Cette nouvelle forme d’habitat répond à un besoin actuel, constate Diego Harari, directeur de l’innovation et du développement durable chez Vinci Immobilier. Malgré des revenus réguliers, les jeunes actifs ont du mal à se loger en raison du prix élevé des locations ; cette génération en quête de bien-être est de plus en plus partageuse, accordant davantage de place à l’usage. »

Le géant de la promotion immobilière française s’est d’ailleurs associé à la Société de la Tour Eiffel, afin de livrer au 3e trimestre 2024 le grand projet Evasyon (Lyon 3e), comprenant notamment une résidence de coliving de 146 logements baptisée Bikube. « À l’image du coworking, une révolution sur le marché de l’immobilier opère pour répondre aux besoins de jeunes actifs (générations Y et Z) qui possèdent une vision différente de l’habitat traditionnel », précise-t-on chez Vinci Immobilier.

Un parc triplé en 2025

Si les résidences de coliving cumulaient environ 8.300 lits dans une trentaine de villes en France, en fin d’année 2021, ce secteur attire de plus en plus de clients, d’investisseurs et d’opérateurs. Il pourrait même voir « son offre tripler d’ici à 2025, pour atteindre près de 24.000 lits », selon les prévisions de l’étude de KPMG. « Au regard du nombre de projets, le coliving est en expansion, mais reste assez faible en comparaison du reste de l’industrie hôtelière. Comme le coworking, c’est une nouvelle manière sociétale de vivre, ajoute Stéphane Botz, directeur national de KPMG Hospitality. La notion de coliving existe depuis cinq ou six ans, et la Covid a accéléré cette tendance. Dans les prochains mois, le coliving pourrait bénéficier des tensions qu’il y a dans le marché locatif. »

En France, des opérateurs comme Sharies ou Colonies ont démarré leur activité avec des colivings de petite capacité. Mais les projets en cours gagnent en ampleur : des résidences de plus de 200 logements sont prévues dans les années à venir. En exerçant comme foncière et opérateur à travers ses différentes entités, UXCO group s’est implanté sur le territoire français avec plus de 60 résidences de coliving dédiées aux étudiants et jeunes actifs. Via son opérateur de résidences UXCO Management, le groupe s’appuie sur ses deux marques : ECLA (grandes résidences de coliving premium) et UXCO (réseau de résidences étudiantes). Le groupe affiche vouloir « consolider sa place de leader français des résidences de coliving avec un objectif de 25.000 lits d’ici à 2027 ».

Comme le coworking, c'est une nouvelle manière sociétale de vivre.
Stéphane Botz, Directeur national chez KPMG

Présent dans une trentaine de villes française – à Valenciennes, Montpellier, Clermont-Ferrand ou encore Brest, Marseille et La Rochelle –, c’est en région parisienne qu’UXCO group développe ses résidences les plus impressionnantes. En 2018, le groupe a livré sa première résidence avec l’ECLA Paris Massy Palaiseau (Essonne). Installé sur 40.000 m2, ce bâtiment dispose de 1.000 appartements, 1.300 lits et accueille des jeunes actifs et des étudiants de 89 nationalités différentes. Proposant une large palette de services et de multiples espaces communs, ce mastodonte est aujourd’hui la plus grande résidence d’Europe dédiée au coliving.

En novembre dernier, UXCO group a inauguré sa deuxième résidence ECLA à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis), affirmant son fort positionnement. Ouverte aux étudiants et aux jeunes actifs depuis la rentrée 2022, cette nouvelle résidence implantée en petite couronne compte 708 logements (studio, T1, « cabanes duplex », dortoirs de deux à six personnes) et plus de 2.400 m2 d’espaces communs. La résidence offre des services axés sur le bien-être de ses colivers, à l’instar d’une salle de sport équipée, une salle de yoga, un ring de boxe, une rampe de skate en extérieur, un studio de musique, des salles de cinéma, une laverie connectée, des salles de réunion, des cuisines partagées, des espaces de détente…

En outre, c’est « une offre totalement clés en main » que propose cette résidence à destination d’étudiants, de chercheurs ou de jeunes actifs désireux de s’installer « pour un court, moyen ou long séjour ». Selon Maël Aoustin, président du directoire d’UXCO Group, les résidences ECLA apportent une réponse à « l’évolution des modes de vie » que ces différents profils veulent vivre : « C’est pour cette raison que le groupe va continuer d’investir dans ce concept, et dans la région ». Il y a quelques jours, UXCO Group a ouvert en effet sa troisième résidence ECLA à Villejuif (Val-de-Marne), comprenant 754 logements.

Une clientèle jeune et connectée ?

Les projets de coliving réalisés récemment semblent s’adresser majoritairement à un public jeune, composé d’étudiants et de jeunes actifs. Mais la clientèle cible du coliving n’est pas forcément si restreinte. « Ce que l’on observe, c’est une clientèle corporate et une clientèle qui recherche également des lieux de séjours expérientiels. Le coliving est une offre qui ne vient pas en confrontation avec l’hôtellerie classique, il attire donc toutes les typologies de clientèle », estime Stéphane Botz, chez KMPG Hospitality.

Les opérateurs de résidences de coliving peuvent proposer des studios indépendants (mais toujours avec des services adaptés), tandis que d’autres sont positionnés sur le segment de la colocation. Les durées de séjour sont également différentes d’un opérateur à l’autre. « Chez les acteurs traditionnels, on parle généralement d’hébergements pensés pour des séjours de 1 à 12 mois », note l’étude sur hôtellerie de KPMG, relevant que « certains acteurs du marché des résidences étudiantes saisissent, eux aussi, le tournant du coliving ».

Le réseau d’audit prend l’exemple de Kley. Ce groupe, fondé en 2014 et repris par AXA Investment Managers en 2019, est un spécialiste des résidences étudiantes privées, en France, mais prévoit effectivement de développer « son offre de coliving à destination des jeunes actifs et actifs en situation de transition de vie, avec les premières ouvertures prévues dès 2023 », notamment près de Toulouse, à Labège (Haute-Garonne), à Gentilly (Val-de-Marne) et à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine). En janvier dernier, le groupe Kley a également annoncé « l’acquisition en Vefa [vente sur plan, NDLR] d’une résidence de coliving pour étudiants à Courbevoie (Hauts-de-Seine) ».

Cette dernière devrait ouvrir ses portes au premier semestre 2026. Elle accueillera 437 jeunes et disposera d’espaces communs tels qu’une salle de coworking, un amphithéâtre, un studio de musique et un patio végétalisé. « Cette future résidence à Courbevoie répond au besoin de logements de jeunes actifs et d’étudiants recherchant une ambiance de vie en communauté et de mise en réseau », confie François Bertrand, directeur général d’Emerige résidentiel, l’un des promoteurs associés au projet. Le coliving est donc devenu un marché attractif, que les acteurs économiques observent de plus en plus près.