Hôtellerie : vivement l’après-JO !

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Le constat est largement partagé. Avec un taux de remplissage moyen, les JO ne seront pas une grande fête pour les hôteliers. En revanche, la profession compte sur les retombées positives de la mise en lumière de la France dans un second temps.

JO
L’Ouest Hôtel à Paris.

Véronique Siegel, présidente de l’Umih Hôtellerie, projette d’atteindre le taux de d’occupation des hôtels affiché lors des derniers JO à Londres : 72 %. « Sur Paris et la région parisienne, le taux est conforme à nos attentes, puisque nous sommes à ce jour entre 60 et 75 % sur les JO et un peu en retrait pour les Jeux paralympiques. » Les écarts sont naturellement importants selon le type d’hôtellerie et l’emplacement. « Les hôtels qui ont signé un contrat global, soit avec le Cojo (Comité d’organisation des Jeux olympiques), soit avec des sponsors importants, affichent complets. Pour les autres… la situation est moins positive. Et, pour les villes de province hôtes, nous sommes légèrement en deçà de ce que nous avons en portefeuille sur Paris, mais une montée en charge est prévue sur les semaines qui restent. » En région, les chiffres sont plutôt autour de 45 à 50 % de taux d’occupation. Fabienne Ardouin, vice-présidente du GHR complète et précise que Lille affiche une durée de séjour proche de 2 jours, Nantes près de 3 jours ou 3,5 jours à Versailles.

Pour ce qui est des réservations digitales, elles concernent le marché international à + 60 %. « Si on inclut les pays limitrophes, on passe même à 75 %, note Fabienne Ardouin. Sur la part de marché français digital, on est à 25 %, ce qui signifie qu’il y a encore de la marge mais les choses vont bouger dans les 30 prochains jours. Il faut savoir que les Français réservent en direct, contrairement aux étrangers qui passent principalement par Internet. »

Même son de cloche chez Frank Delvau, président de l’Umih Paris IDF : « Nous constatons que le taux de remplissage pour la période des JO stricto sensu ne sera pas exceptionnel. On parle de 15 millions de visiteurs… sauf que la plupart des billets ont été vendus à des Franciliens qui ne vont pas dormir dans nos hôtels ! Et nous pouvons être inquiets pour le mois de juillet en lien avec les problème de sociétés ont annulé leurs réunions. Notre habituelle clientèle business ne sera pas là. C’est un fait et je crains vraiment que juillet soit déserté. »


RETOUR À LA RAISON

Le « JO bashing » aurait-il un lien avec ces réservations somme toute un peu timides ? « Sans aucun doute, remarque Véronique Siegel, une partie de la clientèle internationale long-courrier va faire défaut. Cet effet délétère touchera également la clientèle « épi-JO » : celle qui ne viendrait pas forcément pour assister aux épreuves, mais pour profiter de l’ambiance… » De même, la situation sécuritaire qui, au fil du temps, a évolué vers le rouge écarlate inquiète : « N’oublions pas que Paris est déjà la capitale mondiale du tourisme. Ceux qui viennent pour visiter le Louvre, le Château de Versailles, les grands magasins… ne seront pas là cette année », insiste Frank Delvau.

Comment ne pas évoquer également le sujet des plates-formes de réservation qui ont fait miroiter des prix de location pharaoniques. Selon Véronique Siegel, « cette communication a suscité immédiatement un afflux de mises en ligne d’hébergements. Mais aujourd’hui, ces mêmes plates-formes nous servent le discours inverse car elles n’arrivent pas à remplir. Je regarde avec un peu de compassion tous ces Français qui ont investi pour embellir leur logement, mettre leurs effets personnels sous clé et s’organiser pour se loger ailleurs. Je trouve cela honteux ! » À côté des plates-formes, certains hôteliers ont aussi eu la folie des grandeurs… « Les quelques hôteliers parisiens qui avaient surmultiplié leurs tarifs se sont vite rétractés pour revenir à des prix moyens dignes d’un beau salon parisien. Soyons transparents : un établissement qui donne sur la Seine le jour de la cérémonie d’ouverture est légitime de proposer ses chambres à un tarif supérieur, c’est normal. De là à prendre cet exemple comme on l’a lu dans les médias, non ! », s’insurge Fabienne Ardouin. Véronique Siegel tempère et évoque une mauvaise communication : « Comparaison a été faite entre le 26 juillet 2024 et le 26 juillet 2023 : or on ne peut pas mettre en regard une période de forte activité et une période (plus) calme. Si on prend, par exemple, l’Air Show, le Salon du Bourget ou la Fashion Week, on retombe sur des tarifs proches. »


SUR LE TERRAIN…

L’Ouest Hôtel de Didier Castel est un trois-étoiles de 50 chambres, situé dans le 8e arrondissement parisien, près de la gare Saint-Lazare. « Je n’ai jamais considéré que les JO en eux-mêmes nous apporteraient beaucoup de clientèle… plutôt des soucis ! Aussi bien au niveau de l’intendance et de la gestion du personnel, que pour le déplacement de nos salariés comme de nos fournisseurs. Nous anticipons une situation particulièrement compliquée. Les informations arrivent au compte-gouttes et ne sont pas toujours cohérentes… Cependant, les JO sont une bonne nouvelle à cause du rayonnement de Paris et nous espérons un effet JO comme il y a un effet Coupe du monde. »

Fréquenté par une clientèle d’affaires, l’Ouest Hôtel ferme habituellement en août. « Là, nous resterons ouverts, mais je vois les réservations qui arrivent… plutôt lentement. Pour tout dire, on ne va pas déboucher le champagne ! Il faut reconnaître que dans l’euphorie générale, nous avions mis des prix élevés… mais nous sommes revenus à des tarifs raisonnables : par rapport au prix moyen de week-end haute saison, nous sommes à +25 ou 30 %. Si juste avant les JO, l’hôtel ne se remplit pas, nous assouplirons peut-être », conclut l’hôtelier. D’origine aveyronnaise, Didier Castel représente la 3e génération à la tête de l’hôtel… il en a vu d’autres et saura s’adapter !