Micro-entreprise et restauration : un statut à consommer avec modération
- Temps de lecture : 5 min
Comme tous les statuts, celui de la micro-entreprise offre des avantages et des inconvénients. Ce qui est particulièrement le cas avec le monde de la restauration. Un restaurateur micro-entrepreneur, une solution gagnante ? Éclaircissements avec Philippe Meilhac, avocat spécialisé dans le CHR.

Le statut de micro-entreprise est aujourd’hui largement entré dans les mœurs. Néanmoins, appliqué à la restauration, « il présente en apparence, à tout le moins, des avantages indéniables. Mais l’intérêt de ce statut d’auto-entrepreneur apparaît limité dans le secteur qui nous concerne », souligne Philippe Meilhac, avocat spécialisé dans le CHR. Qu’en est-il ?
Du côté des avantages
Le premier des bénéfices du statut d’auto-entrepreneur pour le restaurateur est celui d’apporter une plus grande flexibilité. Même si les pouvoirs publics affirment régulièrement vouloir simplifier les démarches administratives… D’aucuns savent bien qu’il n’en ait rien dans les faits. Le restaurateur passe une bonne partie de son temps à gérer des problèmes ou des situations qui ne constituent pas son cœur de métier. La lourdeur administrative. A savoir, apporter du plaisir à sa clientèle à travers des plats de qualité.
Ce statut peut être choisi par le restaurateur qui commence son activité et souhaite prendre ses marques
Dès lors, le fait de signer ce type de contrat offre au chef d’établissement une plus grande flexibilité sur le plan administratif, juridique, comptable et fiscal. Que ce soit au début ou au cours de son activité. Qui plus est, ce statut est facile à établir. A la différence de la création d’une société commerciale classique, sa mise en place se révèle nettement plus simple. Ainsi, il n’est pas nécessaire de rédiger différents actes et de faire appel à un avocat pour s’inscrire comme auto-entrepreneur. Qui plus est, son fonctionnement est nettement moins formaliste.
Du libre-arbitre
De la même façon, l’exercice sous le statut d’auto-entrepreneur n’implique pas d’avoir à gérer une comptabilité lourde, et donc de faire appel à un expert-comptable. A cela s’ajoute une plus grande liberté.
« Du fait de sa qualité de travailleur indépendant, l’auto-entrepreneur organise lui-même ses prestations, constate Philippe Meilhac. En effet, il choisit ses missions. Il fixe aussi ses tarifs et il gère son emploi du temps. Il dispose également de plus de libre-arbitre en matière de réglementation sanitaire. » Précision importante pour le restaurateur auto-entrepreneur : le fait que les cotisations sociales ne sont exigibles que sur le chiffre d’affaires encaissé, sans appel de provision, permet à ce dernier de ne pas avancer de fonds. Et de trouver ainsi du temps pour se consacrer entièrement à la fidélisation de sa clientèle.

Au sujet de la fiscalité
Le revenu imposable du micro-entrepreneur est calculé en pratiquant un abattement sur le chiffre d’affaires de l’année N. Celui-ci varie en fonction de la nature de l’activité. S’agissant des activités de ventes de marchandises, restauration, hébergement, élevé (71 %). Beaucoup plus que pour les activités de prestations de services (50 %) ou les professions libérales (34 %). Par ailleurs, le versement forfaitaire libératoire (VLF) de l’impôt sur le revenu est réservé aux micro-entrepreneurs dont le revenu fiscal de référence (RFR) du foyer fiscal de l’avant-dernière année (année N-2) n’excède pas un certain seuil pour une part de quotient familial. Ce montant est majoré de 50 % par demi-part ou de 25 % par quart de part supplémentaire.
Du côté des inconvénients
Les désagréments du statut d’auto-entrepreneur pour le restaurateur sont nombreux. « Il faut avoir conscience que les avantages que nous venons d’évoquer restent relatifs », ajoute l’avocat spécialiste du GHR. Certes, ne pas avoir à recourir à un expert-comptable permet d’économiser des frais, comme le coût de ses honoraires. Un bémol malgré tout : tenir une comptabilité, même simplifiée, n’est pas nécessairement à la portée de tous. Le micro-entrepreneur doit aussi avoir conscience que son chiffre d’affaires ne peut pas dépasser la barre fatidique des 188 700 euros annuellement (voir encadré). Si tel est le cas, alors il devra changer de statut. Encore faut-il que le restaurateur le sache.

Chiffre d’affaires : quels plafonds ?
Une des principales spécificités, si ce n’est la principale, du régime de la micro-entreprise sont les plafonds de chiffre d’affaires à ne pas dépasser. Fixés annuellement, ils sont assez bas.
188.700 € pour les activités commerciales : restauration, vente de marchandises, fourniture de logement.
77.700 € pour les prestations de services et les professions libérales.
« Ce régime du micro-entrepreneur présente le principal inconvénient de limiter son activité à un seuil de chiffre d’affaires. Ce dernier peut être subitement dépassé à la faveur d’un contexte favorable ou d’un événement, explique Philippe Meilhac. Il est bien plus difficile de contrôler ce chiffre.» Dès lors, un cabinet d’expertise-comptable pourra s’occuper des formalités administratives, et conseiller l’exploitant, y compris sur sa fiscalité personnelle. Par exemple, quand et comment opter pour le versement forfaitaire libératoire ?
Une formation en hygiène
Par ailleurs, l’auto-entrepreneur reste soumis au droit commun pour la vente d’alcool. Dès lors, il lui faut obtenir un permis d’exploitation. De même, il doit également passer une formation en hygiène alimentaire s’il doit manipuler des aliments.
Qui plus est, le statut ne permet pas la possibilité de déduire des frais professionnels: assurance professionnelle, assurance des locaux, loyers, achats des matières premières. «Ainsi, on le comprendra bien, ce statut peut être choisi par le restaurateur qui commence son activité et souhaite prendre ses marques, conclut-il. Mais dès lors que le chiffre évolue favorablement il devra néanmoins s’entourer rapidement d’un expert-comptable et d’un avocat en vue de créer une société. »