Fernando de Tomaso, tout feu tout flamme

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Chef d’origine argentine qui a débarqué à Paris il y a un peu plus de 20 ans avec l’objectif alors de devenir cuisinier, Fernando de Tomaso, est aujourd’hui à la tête de deux restaurants. Biondi et Blanca, situés dans le 11e arrondissement, proposent une cuisine teintée de ses origines, centrée sur la braise et la viande.

Fernando de Tomaso
Fernando de Tomaso. Crédit : DR.

En cuisine, Fernando de Tomaso rend hommage à sa terre natale. « L’Argentine, c’est une histoire de charbon », lance-t-il d’emblée. Dans ses restaurants parisiens, la viande – soigneusement sélectionnée – et la braise tiennent en effet une place centrale. «C’est l’histoire de mon pays, là-bas tu deviens un homme quand tu maîtrises le feu», note le chef. Mais avant d’en arriver là, Fernando de Tomaso, âgé de 45 ans aujourd’hui, a eu un parcours riche et souvent semé d’embûches. Originaire d’un petit village près de Buenos Aires, il a su ce qu’il allait devenir l’année du baccalauréat. «La fin de l’insouciance», sourit-il. En pleine fleur de l’âge, il découvre les plaisirs de la nourriture et du vin. Il organise même un rendez-vous hebdomadaire entre copains, le mercredi, seul soir de la semaine où sa grand-mère, chez qui il vit, lui laisse l’accès à la cuisine. C’est au cours d’une de ces soirées qu’il a le déclic : il sera cuisinier.

«Préparer à manger, boire du bon vin, écouter de la musique, je me suis dit que c’était une bonne façon de vivre», déclare-t-il. Cela sonne alors comme une évidence et son objectif est clair : «Pour moi, la gastronomie c’est la France, donc je me suis dit que je devais réussir à venir à Paris.» En 1997, il se rend en stop à Buenos Aires. D’abord, il enchaîne les boulots, de facteur à homme d’entretien et suit en parallèle une formation en cuisine. «Je travaillais sept jours sur sept, mais rien ne pouvait m’empêcher de me rendre vers mon objectif», assure-t-il. Puis, vient le premier poste en restauration, en tant que commis. Il effectue ensuite deux saisons en Uruguay, avant de préparer des empanadas chez lui, pour les vendre dans la rue. «Je faisais la recette familiale, je portais ma veste de cuisinier et ma toque et je déambulais dans les rues avec mes empanadas, ça marchait très bien», se souvient-il. En 2001, alors que le pays traverse une crise économique d’une ampleur sans précédent, il se retrouve au buffet froid d’un hôtel quatre étoiles, mais les produits de luxe se font rares. «Il n’y avait plus de saumon, de gambas, de poulpe… mais beaucoup d’aubergines et de carottes, alors je devais faire preuve de créativité», raconte-t-il.

C’est cette même année que son rêve de venir à Paris va se concrétiser. Comme un coup du destin, il vide son compte bancaire pour payer son billet d’avion au début de décembre, alors que sa banque déclare faillite à peine trois semaines plus tard. «Un ami d’ami m’a accueilli à Paris, je n’avais presque pas de sous et pas de papiers», relate-t-il. Il parvient à se faire embaucher dans le bâtiment, avant d’intégrer les cuisines d’un bar de nuit à deux pas du marché d’Aligre. «Je passe un an à nourrir les noctambules sans réussir à obtenir mes papiers.» Il intègre ensuite une école de cuisine afin d’avoir un visa étudiant et devient chef de partie au Petit Yvan (Paris 8e ). Le chef, d’origine belge, l’aide à régulariser sa situation: «Je n’allais pas beaucoup à l’école, alors il n’a pas été possible de renouveler mon visa. Heureusement que le chef Yvan était là.» Plus tard, tandis qu’il travaille dans une cave à manger et bar à vin de la capitale, le chef Jean-François Piège vient dîner. Il remarque le jeune homme et lui propose de le rejoindre au Crillon.

Pour moi, la gastronomie c’est la France.
Fernando De Tomaso, Chef des restaurants Biondi et Blanca, à Paris 11e

«Je faisais des horaires à rallonge, mais je savais que j’étais utile et j’avais conscience d’être dans un lieu à part.» Il travaille ensuite au Royal Monceau, puis intègre L’Étoile, où il va pour la première fois diriger une équipe. En 2010, il se met à son compte et ouvre l’année suivante La Pulperia, rue Richard-Lenoir (Paris 11e ), en lieu et place de Loulou de Bastille, un restaurant chargé de 30 ans d’histoire. «Je cherchais un style, une raison d’être, il fallait que je sois identifié.» Il se spécialise donc dans la cuisine argentine, encore peu connue à Paris. Le succès est au rendez-vous et quatre ans plus tard, le chef s’agrandit. Il vend la Pulperia à son associé Nobuyuki Akishige, qui ouvre Automne* à la place.

Fernando cherche un nouveau local et trouve un ancien restaurant tibétain, rue Amelot. Huit mois de travaux sont nécessaires pour ouvrir, en 2015, l’actuel Biondi. Un nom en hommage à un célèbre clown argentin. «Je voulais faire un clin d’œil au cirque d’hiver situé à deux pas. Au début, les éléphants passaient devant le restaurant deux fois par jour, c’était un vrai spectacle.» Chaque jour, il y sert de magnifiques empanadas frits de carne, du ceviche de bar, de la viande à la braise ou encore du bar à la plancha. Les desserts font également écho aux origines du chef, notamment la déclinaison de dulce de leche (confiture de lait). Le tout sans oublier la carte des vins, qui fait la part belle à l’Argentine. Et comme le chef aime les défis, il vient d’ouvrir une nouvelle adresse avec sa sœur Violetta Hernandez. Blanca, du prénom de leur grand-mère d’origine basque, est un restaurant intimiste proposant une cuisine naviguant entre Argentine et France. Et que sera la suite pour Fernando ? «Je veux juste être libre et continuer de cuisiner !», affirme-t-il.

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