Samir Balia, la rigueur et la tradition

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Reprendre les rênes de la cuisine d’une institution telle que le Train bleu, ce n’est pas une mince affaire ni une opportunité accordée à n’importe qui. Un privilège. Arrivé dans l’établissement en 2019, le chef Samir Balia souhaite faire perdurer la tradition de cet illustre restaurant parisien.

Samir Balia
Samir Balia, chef du restaurant Le Train Bleu, à Paris 12e. Crédit Le Train Bleu.

Aux prémices de son parcours, rien ne laissait présager que Samir Balia ferait de la cuisine sa vocation. Ses premiers souvenirs culinaires remontent à son enfance, où il se rappelle des repas cuisinés en famille. D’origine maghrébine, les épices et les plats traditionnels ont bercé son quotidien depuis son plus jeune âge. « Je me rappelle des grandes tablées et mes grands-parents s’affairant derrière les fourneaux. Ils cuisinaient pour leur loisir. » Mais c’est bien plus tard qu’il s’est orienté vers la cuisine. À l’adolescence, le jeune Courbevoisien est plutôt perdu. « Je n’arrivais pas à me plier au système scolaire. Tout ce que je savais, c’est que je voulais faire quelque chose de mes dix doigts. » Alors quand on lui suggère d’intégrer l’école hôtelière Médéric dans le XVIIe arrondissement, il se laisse tenter par l’idée bien que « la cuisine n’était pas son premier amour ».

Néanmoins, le jeune étudiant y prend goût : « En réalité, j’ai beaucoup apprécié l’aspect discipliné de l’école hôtelière. C’est à ce moment que j’ai envisagé une carrière dans la gastronomie. » Effectivement, le monde de la cuisine exige de la rigueur, une caractéristique qui séduit le chef. Par la suite, il multiplie les expériences dans divers établissements, notamment au Dessirier, un restaurant de fruits de mer situé dans le 17e arrondissement de Paris. Il qualifie ces expériences comme « enrichissantes » et confirme son choix professionnel.

Un homme va particulièrement marquer la carrière de Samir Balia : le célèbre chef Michel Rostang. « De ma première expérience à aujourd’hui, j’ai quasiment exclusivement travaillé pour des restaurants de la famille Rostang. Je pense avoir cuisiné dans presque tous leurs établissements », raconte Samir Balia. Le jeune chef considère Michel Rostang comme un mentor : « J’aime beaucoup sa manière de manager. II combine une approche très familiale avec une fermeté bien dosée. » En débutant en tant que commis, il gravira les échelons pour devenir sous-chef au sein du restaurant 2 étoiles, Maison Rostang (Paris 17e). Une relation complice s’installe entre les deux hommes. « Par la suite, j’étais dans les équipes chargées des ouvertures d’établissements à l’international. J’ai participé aux ouvertures d’enseignes à Dubaï et à Anguilla », précise-t-il nostalgique

Chaque jour est un projet en devenir.
Samir Balia, chef du restaurant Le Train Bleu, à Paris 12e

Après toutes ses belles aventures, Samir Balia veut changer d’air : « J’ai ressenti le besoin de couper le cordon. » Alors, il part au Royal Monceau, un choix qu’il ne regrette absolument pas : « Quand j’y étais, on a obtenu une étoile. C’était un très beau moment. »

Un train à ne pas manquer

Lorsque le chef Michel Rostang l’appelle pour le rejoindre sur le projet du Train bleu, il n’hésite pas une seconde. Auparavant consultants culinaires ensemble pour l’institution, ils conseillaient en effet sur le fonctionnement, la carte, les produits, les équipes… Le Train bleu est le restaurant mythique de la gare de Lyon (Paris 12e). Cet établissement a vu le jour sous le nom de Buffet de la gare en 1900 lors de la Grande Exposition universelle de la même année. La première fois que Samir Balia entre dans l’établissement, il n’en croit pas ses yeux. « J’ai eu un coup de foudre immédiat pour cette institution », explique-t-il. Un an après son arrivée, on lui propose de remplacer Jean-Pierre Hocquet en cuisine. De nature combative, la grandeur du défi ne lui a pas fait peur : « Je me suis dit que je m’y verrai bien. »

Au Train bleu, la culture de la tradition prévaut : « On remet au goût du jour des recettes traditionnelles avec des produits bruts. C’est une carte simple avec des produits frais de terroir. D’ailleurs, le menu change quatre fois par an selon la saisonnalité. Par exemple, en ce moment, on travaille les racines d’hiver (betterave, topinambour…) », explique-t-il. Son ambition n’est pas de tout réinventer, mais d’améliorer : « Il y a des plats qu’on ne peut pas enlever comme la bouillabaisse ou le lièvre à la Royale car ils sont intimement liés à l’histoire du lieu. »

L’équipe occupe une place centrale au sein du restaurant. Samir Balia reconnaît que Le Train bleu ne peut progresser sans une cohésion optimale : « La gestion de l’équipe est primordiale. Dans un lieu aussi emblématique, l’humilité et l’écoute des expériences de chacun sont essentielles. C’est ainsi que nous progressons ensemble. »

Par ailleurs, le chef a compris l’importance de ne pas tout bousculer : « On ne change pas un établissement qui existe depuis 120 ans. Quand on travaille ici, on a le poids de l’histoire du lieu. » Dans le futur, il souhaite continuer à valoriser au mieux l’expérience client : « Dans ce restaurant, nous partageons un moment d’histoire avec nos convives. Chaque jour est un projet en devenir, car nous remettons constamment en question notre approche pour garantir à nos clients la meilleure expérience culinaire possible. » Quant à l’avenir du Train bleu, il envisage la continuité de la tradition : « Nous préservons l’essence même de cet établissement emblématique. »

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