Le gâteau creusois : une recette monacale

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Le gâteau creusois, pâtisserie vieille de six siècles, tirerait son origine des moines autrefois présents dans la région. Aujourd’hui, seuls quelques pâtissiers sont habilités à le réaliser.

gâteau creusois
Chaque année, la confection des gâteaux creusois nécessite quatre tonnes de noisettes. Crédit : DR.

La légende raconte que la recette du gâteau creusois proviendrait d’un parchemin datant du 15e siècle, retrouvé dans un monastère dans le canton de Crocq, dans le nord de la Creuse. L’objet, écrit en vieux français, nécessita plusieurs jours de déchiffrage. C’est à un curé que l’on doit finalement sa traduction. Lui en est persuadé : ce parchemin cache en réalité une recette de gâteau. Dès lors, un concours de pâtisseries est organisé dans le village de Crocq. L’idée est d’élire le meilleur gâteau réalisé à partir de la recette inscrite sur le parchemin. « Le Creusois », comme l’appellent les locaux, tel que nous le connaissons aujourd’hui, est né ainsi. Ce jour-là, le président des pâtissiers décrète que seule une poignée de pâtissiers seront habilités à pouvoir le préparer. Aujourd’hui encore, seuls quelques élus possèdent un passe-droit leur permettant de confectionner ce mystérieux gâteau aux noisettes.

« La recette du gâteau creusois, on ne la dévoile jamais ! Mais soyons honnêtes, toutes les familles creusoises la connaissent plus ou moins », déclare Philippe Vacheyroux, président de l’Association du gâteau creusois et pâtissier-boulanger à Boussac. En effet, ils sont seulement 24 pâtissiers à pouvoir réaliser « le véritable gâteau creusois », comme le nomme Philippe Vacheyroux. Mais pour cela, il faut d’abord être admis au sein de l’Association du gâteau creusois. « J’ai été accepté seulement lors de ma seconde demande. Pourtant, je suis né et j’habite en Creuse. Cela m’aurait vraiment embêté de ne pas pouvoir proposer ce gâteau lorsque je me suis mis à mon compte », déclare Anthony Jallet, pâtissier-boulanger à Saint-Vaury. « Il y a un cahier des charges très précis qui garantit une homogénéité du gâteau, mais les pâtissiers autorisés à le faire possèdent chacun un savoir-faire, des fours différents, une torréfaction propre. Dans l’idée, chaque Creusois est un peu différent », confie le jeune pâtissier-boulanger.

Si le mystère dont le gâteau creusois est auréolé reste intact, Philippe Vacheyroux s’est néanmoins confié sur les ingrédients qui le composent : « Des noisettes, du beurre, des œufs, de la farine, et enfin du sucre. » Quant à la saveur de ce « gâteau de voyage, qui se conserve volontiers plusieurs jours, comme le précise Philippe Vacheyroux, elle s’apparente à celle du financier ». Ainsi, croquer dans un gâteau creusois, c’est retrouver le goût de la noisette torréfiée et beurrée. En texture, le Creusois est fondant au cœur et croustillant sur les bords. Ceci est lié « aux blancs montés en neige et à la cuisson », ajoute le président de l’Association du gâteau creusois.

Vers l’AOP

Enfin, chaque année, la confection de cette spécialité creusoise nécessite quatre tonnes de noisettes, de quoi affamer les écureuils de la région, ou presque, puisque « pour l’instant, les noisettes proviennent toutes du Lot-et-Garonne », indique Philippe Vacheyroux. Pourtant, les noisetiers poussent depuis toujours dans ses contrées. « Le préparer avec des noisettes issues des terres creusoises permettrait d’obtenir une AOP, la première du département », déclare Philippe Vacheyroux, avant d’ajouter que cela est « en réflexion depuis longtemps » et que « bientôt, des noisetiers seront plantés explicitement » pour le gâteau creusois. « Nous produisons également du bon beurre en Creuse, mais nous négocions encore le prix ! », précise-t-il. En revanche, une chose est sûre, le secret de cette recette monacale, lui, ne pourra jamais être négocié.

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