Jacky Pirrera : commerçant avant tout

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Après une carrière dans l’import-export, Jacky Pirrera s’est relancé en créant deux restaurants à Mende qui connaissent un succès certain. Ses talents et son pragmatisme lui ont permis de trouver les clés de la réussite: le rapport qualité-prix, le sens du décor, la communication ainsi qu’une capacité d’adaptation permanente.

Jacky Pirrera.
Jacky Pirrera. Crédit : Jean-Michel Déhais.

C’est dans une encoignure de la rue Charles-Morel, à l’écart de l’extrême centre de Mende, que se situe le Notto’s. Cette pizzeria bat depuis tous les records de fréquentation dans la préfecture de la Lozère. Midi et soir, la terrasse et la salle ne désemplissent pas. En 2022, près de 40 000 couverts y ont été servis. Aussi, encouragé par le succès, Jacky Pirrera, son propriétaire, a créé l’année passée une seconde affaire, Mr & Mrs Bund, dont le décor grandiose qui invite au voyage dénote dans l’univers très traditionnel de Mende. Pour autant, Jacky Pirrera, par son parcours, ne semblait pas être prédestiné au secteur du CHR ni à s’installer dans ce département. Il ne connaissait la restauration qu’en tant que client. Et ce Stéphanois, aujourd’hui âgé de 56 ans, a mis pour la première fois les pieds à Mende en 2015.

À la tête d’une société d’import-export, il vendait alors des produits de décoration aux grossistes. Pour ce faire, cet homme qui maîtrise six langues sillonnait le monde et notamment la Chine, où il a effectué plus d’une centaine de voyages. Mais son entreprise s’est retrouvée peu à peu étranglée en matière de trésorerie. Ses achats de plus en plus importants peinaient à percevoir un retour d’investissement dans des délais acceptables. C’est d’ailleurs la raison de son arrivée à Mende car la ville offrait des conditions privilégiées pour la gestion de son entreprise. Mais ce fut insuffisant. Jacky Pirrera a été contraint de mettre un terme à cette activité pour éviter la ruine complète. « On a le droit de tomber, résume-t-il, mais je ne voulais pas offrir à mes enfants l’image d’un père qui ne se relève pas. » C’est ainsi que ce descendant d’une famille italienne imagine d’établir un restaurant dans sa propre maison. Le Notto’s voit le jour en 2019. « Pour que les gens se sentent bien dans un lieu, indique Jacky Pirrera, il faut un cadre original et agréable. Cette vieille maison pleine de charme se prêtait bien à l’exercice. J’ai créé un restaurant à forte personnalité, avec une marque moderne et urbaine. »

Mais surtout, le néorestaurateur tient à proposer une prestation authentique. Ainsi, dans l’établissement adhérent du GPN (Gruppo la Piccola Napoli), 80 % du personnel est italien et on y parle la langue de Dante. Sa carte, fondée sur un bon rapport qualité-prix, attire les foules dès l’ouverture. Pour Jacky Pirrera, la recette du succès est simple : «Je ne suis pas cuisinier, je suis un gérant d’entreprise comme je l’étais auparavant. Mon travail, c’est d’abord du management et de l’organisation. À Mende, l’offre reste très classique et il y a peu de concurrence. Si on est bon, on rafle tout. Nous ouvrons tard et tous les jours. Nous proposons des plats copieux et nous savons nous adapter au client. Enfin, nous disposons d’un emplacement discret et de l’atout du parking.» Pourtant, malgré le succès de l’ouverture, l’établissement a été confronté à la crise sanitaire, cinq mois après le démarrage. «Heureusement, rappelle Jacky Pirrera, après la fermeture, j’ai connu une très belle saison qui m’a permis de jongler provisoirement avec la trésorerie.»

Pour créer son second établissement en octobre 2022, Mr & Mrs Bund, il s’appuie sur de la cuisine fusion, un décor grandiose, stylisé – inspiré de l’Afrique – et enfin sur un spectaculaire bar à cocktails. Avec le recul, il reconnaît avoir placé la barre un peu trop haut : « La carte était trop luxueuse, avec par exemple des pâtes au homard. Le ticket moyen s’envolait à 40 € (contre 23 € au Notto’s) et la fréquentation peinait à décoller ». Néanmoins, le restaurateur n’a pas tardé à rectifier le tir. Il a simplifié l’offre afin de ramener le ticket moyen à 30 €, et a largement communiqué sur cette évolution. La clientèle a pris progressivement le chemin de ce restaurant bien placé, doté d’une surface de 300 m2. « Je commets des erreurs, concède Jacky Pirrera, mais je suis capable de les corriger. Je surdimensionne toujours la réponse. Ainsi, si un client estime qu’un plat n’est pas bon, je le lui offre. Je ne veux pas être tenu par des critères d’argent. »

Pour relancer Mr & Mrs Bund, il organise des soirées salsa et privatise tout ou partie de la salle. Mais surtout, il profite de la complémentarité des deux établissements. En effet, Notto’s peut tirer pleinement parti de sa terrasse durant l’été, alors que Mr & Mrs Bund attire moins le public qu’en hiver. Jacky Pirrera déplace ainsi le personnel d’un établissement à l’autre en fonction de l’opportunité des circonstances. Par exemple, cet été, Jacky Pirrera a transformé Mr & Mrs Bund en bar musical dansant, alimenté par une offre de tapas peu consommatrice de main-d’œuvre. Il pourra ainsi concentrer la majorité de ses effectifs sur le Notto’s. L’avenir appartient à ceux qui savent s’adapter en permanence.

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