La restauration est confrontée, d’une part, à deux difficultés majeures, l’inflation et le manque de personnel, et, d’autre part, à l’obligation de faire face à deux grandes évolutions : la numérisation et l’intérêt croissant de la clientèle envers la RSE. Comment y répondre ? Réponses avec le baromètre 2025 des cabinets d’études et d’analyses Rydge Conseil et Gira.

La restauration française est à un tournant de son histoire tant les défis en ce début d’année 2025 sont nombreux et variés. C’est ce qui ressort du baromètre 2025 réalisé par deux cabinets d’études et d’analyses Rydge Conseil et Gira.
Tout d’abord, l’enquête distingue deux principaux maux bien connus des restaurateurs : l’inflation et une pénurie de main-d’œuvre (la dérogation obtenue par les restaurateurs à la directive Retailleau concernant le séjour des étrangers changera-t-elle vraiment la donne ?).
Ensuite, deux grandes transformations se déploient à la vitesse d’un cheval au galop : une clientèle de plus en plus avide de RSE et la numérisation à grands pas de cette profession. Face à tous ces quatre constats, quelles stratégies adopter ?
L’inflation et le coût de l’énergie
« Une addition salée », note tout simplement le baromètre. Sur une base 100 en 2021, le coût des achats des matières premières est monté à 162 en 2022 et 165 en 2023. Néanmoins, malgré ces augmentations l’enquête constate que les restaurateurs ont pu maintenir leur niveau de marge. Avec un ratio s’établissant à 32%.
Evolution du panier d'achat de la restauration du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2024
sur les viennoiseries
sur le beurre
sur l'huile de tournesol
Cependant, pour éviter les hausses de prix à la carte, plusieurs pistes sont avancées : remplacer le produit habituel, un morceau de viande par exemple ; comparer plus finement les tarifs des fournisseurs en fonction du nombre de couverts moyens. Sans oublier de mettre en avant les produits locaux.
Evolution du panier d'achat de la restauration du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2024
sur le café
sur le lait
sur la bière
En ce qui concerne l’énergie

Inutile de rappeler qu’elle a fortement progressé. Son coût en pourcentage du chiffre d’affaires est passé de 2,32% en 2021 à 3,13%, soit 205 €/MWh en 2023. La rentabilité est de 11,30 en moyenne en 2021 pour descendre deux ans plus tard à 3,39. Quant au résultat d’exploitation, il est passé de 10,99% en moyenne du chiffre d’affaires en 2021 à 3,15% en 2023. Quoi qu’il en soit, la baisse des prix attendue cette année devrait alléger le portefeuille des entreprises. Mais quid de 2026 ? De nouvelles augmentations sont envisagées l’année prochaine. En cause : la mise en place de la troisième Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE 3).

La PPE 3, c’est quoi ? Une feuille de route qui fixe des objectifs en matière de production et de consommation d’énergie dans les 10 ans à venir. Il est prévu de ramener la part des énergies fossiles dans la consommation finale énergétique en France de 58% en 2023 à 42% en 2030, puis 30% en 2035. Dans le même temps, l’électricité augmentera de 27% à 34% puis 39% et les énergies renouvelables hors électricité (géothermie, biomasse…), de 15% à 23% puis 30%. Le gouvernement finalise actuellement la PPE 3.
Tous les postes sont impactés : frais comptable, maintenance, etc. Notre marge est rognée petit à petit. Ce qui est difficile dans notre business dit de centimier
La question délicate de la main-d’œuvre
« Le recrutement a évolué, la valeur travail encore plus, remarque Marion Prévit, du restaurant Inavoué dans le 1er arrondissement de Paris. Nous n’avons plus le choix que de proposer des emplois qui correspondent aux attentes des salariés. » Selon l’Insee, le taux moyen de rotation du personnel en 2022 dans la restauration s’élevait à 44 %, contre 15,5 % en moyenne, tout secteur confondu. Pour contrer cela, pourquoi ne pas mettre en place une fluidité des horaires en adéquation avec l’activité hebdomadaire du restaurant. L’étude conseille aux restaurateurs de se poser trois questions :
1) Depuis la crise du Covid, proposez-vous des conditions de travail plus flexibles (fin de la coupure, semaine de quatre jours…) ?
2) Avez-vous échangé avec vos collaborateurs sur leurs attentes et aspirations actuelles ?
3) Avez-vous mis en place une stratégie de recrutement attractive face aux difficultés du marché ?
Par exemple, des restaurateurs recrutent des aussi bien des étudiants que des retraités. Néanmoins, le meilleur remède pour fidéliser ses salariés réside dans la formation continue des salariés. Une dépense, certes, mais qui se révèle être un investissement à moyen terme.
Les deux grandes transformations
Tout d’abord, la RSE, un nouveau levier de croissance pour les restaurateurs. « En l’intégrant, les restaurants répondent aux exigences légales, mais renforcent également leur attractivité et leur compétitivité sur le marché », explique Luce Devigne, consultante senior RSE chez Rydge Conseil.

Deux chiffres à retenir : 30 % des émissions de CO2 dans la restauration proviennent de la production alimentaire. Et 20 % des émissions peuvent être réduites en adoptant des pratiques d’approvisionnement local et de saison. La clientèle est également de plus en plus soucieuse de connaître la provenance des produits et plus sourcilleuse sur le rapport qualité/prix…
Ensuite, la numérisation de la restauration s’accélère grâce à l’arrivée de la facturation électronique. Dès septembre 2026, les grandes entreprises et les ETI seront dans l’obligation d’émettre leurs factures au format électronique. 2027 pour les TPE/PME. Autrement dit, ces dernières devront d’ici à septembre de l’année prochaine s’équiper de toute manière d’un nouveau logiciel compatible avec celui des grands groupes.
« La digitalisation, accélérée par l’obligation de facturation électronique, représente une opportunité unique de modernisation pour les restaurateurs, constate Chloé Antonucci, cheffe de produit au sein de la plateforme de gestion Pennylane. Les établissements qui sauront tirer parti de cette transformation en sortiront renforcés. » Et mettre en place l’IA au sein de leur établissement. Une nouvelle ère se fait jour.

Méthodologie. Ce baromètre est réalisé par Rydge Conseil, filiale de KPMG, et Gira Conseil, agence spécialisée dans la restauration hors domicile pour l’année 2024. Enquête réalisée auprès de 2 228 établissements installés en France métropolitaine, en exercice depuis trois ans, avec un chiffre d’affaires minimum de 60 K€.