Une réouverture sans fanfare

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Le 14 juin à 20 heures, le chef de l’État a finalement annoncé la réouverture totale des restaurants en Métropole, ce qui a surpris plus d’un restaurateur. Malgré cette autorisation certaines enseignes sont restées fermées. Les Français sont de retour dans les établissements, mais en l’absence des touristes la reprise ne sera pas au rendez-vous.

Il a fallu attendre le dimanche 14 juin, à 20 heures, pour obtenir du chef de l’État le feu vert de la réouverture totale des restaurants franciliens. Inutile de dire que cette mesure a pris de court nombre de restaurateurs parisiens. Même si Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État en charge du tourisme notamment, avait laissé entendre que le Gouvernement espérait « pouvoir accélérer cette réouverture », le week-end dernier les rumeurs les plus contradictoires circulaient sur la date qui serait retenue. Dans ces conditions, lundi lors du déjeuner, une bonne partie des professionnels qui n’avaient pas participé à l’ouverture des terrasses avaient renoncé à ouvrir leurs portes, faute de pouvoir s’approvisionner ou tout simplement parce qu’ils n’avaient pas eu le temps de contacter leurs équipes afin de les extraire du chômage partiel. Certains, comme au pub l’Époque (Paris 18e), commençaient seulement à procéder au nettoyage de leur vitrine et de leur mobilier. Au Bouillon Pigalle, seul le click & collect fonctionnait et à l’intérieur, les responsables tenaient une réunion pour organiser le redémarrage du restaurant le 17 juin. « Il faut le temps de déménager le Bouillon service [VAE], explique Guillaume Moussié, un des dirigeants. Nous devrions néanmoins poursuivre ce service à partir d’un laboratoire installé à la porte de la Chapelle. »


L’Époque
L’Époque 
(Paris 18e) commence son nettoyage le 15 juin.

En ce premier déjeuner de réouverture, la physionomie de la restauration parisienne n’avait guère évolué depuis le 2 juin. Stimulées par une météo clémente, les terrasses étaient relativement bien fréquentées, mais les convives s’aventuraient rarement à l’intérieur.

« Les clients ont encore peur de rentrer, mais ça va revenir petit à petit », constatait avec optimisme un serveur au B9 (Paris 9e). Beaucoup de grandes affaires parisiennes, comme le Wepler (Paris 18e) ou le Vaudeville (Paris 2e) restaient fermées en ce jour de redémarrage. Une affiche sur la devanture de Chartier (Paris 9e) annonçait une ouverture pour le 22 juin. Mais ce dernier établissement sera le dernier de ceux de la famille Joulie à rouvrir en raison de petits travaux encore inachevés. Dès lundi, une partie des établissements de Christophe Joulie, comme le Congrès ou le Dab, fonctionnaient. Les jours suivants, l’ensemble du parc a accueilli du public dans le respect des normes sanitaires. Christophe Joulie ne se fait pourtant pas d’illusions, il n’espère pas retrouver avant septembre ses chiffres de début mars : « Dans le meilleur des cas, comme au Dab, qui bénéficie de petits box, nous pourrons utiliser 70 % de notre capacité d’accueil, mais dans certains établissements, comme Chartier, nous ne pourrons remplir qu’à peine la moitié des 330 places assises. Heureusement, nous avons toujours mené une gestion familiale prudente qui nous permet de traverser cette période. »


Garnier
La fréquentation de Garnier (Paris 8e) limitée à la terrasse.

Autour de Saint-Lazare, la ville d’Argentan et Mollard gardent portes closes, mais le Marco Polo et Garnier fonctionnent. Cette dernière brasserie n’accueille personne à l’intérieur et se contente de placer ses clients en terrasse, attablés à côté d’un message tagué sur la devanture qui leur assure que « le luxe est ringard ». Quelques établissements font cependant exception. Au Mesturet, le patron Alain Fontaine, qui ne dispose que d’une terrasse minuscule, a vu les convives affluer dans sa salle malheureusement réduite par le protocole sanitaire. Certains établissements accueillant traditionnellement un public jeune sont aussi parvenus à remplir leurs salles et leurs terrasses. C’est le cas de deux établissements voisins, place Clichy, le Petit Poucet et de The Little Italy (Paris 17e), mais aussi de Popolare rue de Réaumur (Paris 2e). Ce restaurant gros porteur qui propose près de 300 places assises en temps normal était parvenu à remplir sa salle si l’on excepte les places condamnées par le protocole sanitaire.


The Little Italy
Beau démarrage pour The Little Italy (Paris 17e).


DIFFICILE RETOUR À LA NORMALE

Ce retour à la normale dans la restauration parisienne se révèle plutôt compliqué. L’exemple des deux semaines de réouverture en province a montré qu’il ne fallait pas attendre de miracle, comme l’a constaté Didier Chenet, président du GNI : « Les CHR traversent une crise d’une ampleur inédite. Ceux qui sont déjà ouverts connaissent une activité très fortement dégradée du fait de l’application du protocole sanitaire. » Par ailleurs, les touristes sont toujours absents. Une partie de la clientèle est détournée par le télétravail. Une frange plus âgée nourrit encore une méfiance vis-à-vis des lieux publics. Le potentiel de la demande est donc singulièrement réduit et il le sera encore davantage dans deux semaines, lorsque nous entrerons dans la période des congés. Quand tous les restaurants auront ouvert leur porte, la concurrence risque fort d’être très aiguë. Seule une relance rapide du tourisme européen pourrait limiter les dégâts.

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