Un Salon de l’agriculture plus que jamais politique avec la crise agricole

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Le Salon international de l’agriculture (SIA) fêtera du 24 février au 3 mars 2024 ses 60 ans. Une édition anniversaire qui se révèle d’autant plus spéciale qu’elle se déroule en plein milieu d’une crise agricole d’ampleur. Alors que le Gouvernement se sait attendu, les agriculteurs ont conscience de la portée de ce salon dans la mise en avant de leurs problématiques quotidiennes.

Salon agriculture crise agricole
La 60e édition du Salon international de l’agriculture se tiendra du 24 février au 3 mars. Crédit Romain Devoise.

Il devait déjà être une édition particulière. L’actualité l’a rendu encore davantage. « Avec cette crise structurelle, qui a démarré il y a 30 ans, le Salon sera vraiment spécial », affirme ainsi Jean-Luc Poulain, agriculteur et président du Centre national des expositions et concours agricoles (Ceneca), organisateur du Salon international de l’agriculture (SIA), dont la 60e édition se déroulera du 24 février au 3 mars, à Paris Expo Porte de Versailles (15e).

La crise agricole est en effet venue heurter de plein fouet le rendez-vous annuel présent depuis 1964. Face aux demandes de simplification des normes touchant le monde agricole et d’une meilleure rémunération, le Salon international de l’agriculture 2024 est devenu un marqueur temporel de la crise. « C’est le Salon d’une confiance qu’il faut retisser », estime ainsi Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire. Et pour cause, à l’issue des premières annonces du Gouvernement destinées à calmer le mouvement de contestation, Arnaud Rousseau, président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), principal syndicat du secteur, a indiqué attendre des premiers résultats d’ici au SIA.

Un rendez-vous qui s’annonce donc, plus que jamais, politique. Alors que traditionnellement, les représentants politiques se pressent pour obtenir leur cliché près d’une vache, une manière plus ou moins réussie de revendiquer son attachement et sa proximité au monde rural, l’édition 2024 ne devrait sûrement pas déroger à la règle. Mais le secteur agricole reste sur le qui-vive avec la crise, à l’image de Jean-Luc Poulain, qui ne souhaite pas que les politiques fassent de la « récupération facile du malaise agricole » durant le Salon international de l’agriculture. À l’inverse, les agriculteurs sauront se servir de l’événement, qui représente « inévitablement une caisse de résonance des problèmes agricoles », souligne le président du Ceneca.

1.100 exposants et 30 pays représentés

Le SIA correspond avant tout à la mise en valeur de l’ensemble d’une filière. À l’image de la vache Oreillette, de race normande, qui occupera le rôle d’ambassadrice. « La valeur fondamentale du Salon est la pédagogie », lance ainsi Valérie Le Roy, directrice du SIA. De l’éducation destinée à un visitorat compris en moyenne entre 550.000 et 650.000 personnes, une fréquentation qui en fait le plus important salon de France, devant le tout aussi mythique salon de l’automobile. Un esprit que doivent adopter les quelque 1.100 exposants sur leurs stands. En outre, « il n’y a pas de recherche d’exposants à tout prix, l’objectif est d’avoir des exposants de qualité qui représentent bien l’agriculture française », insiste Arnaud Lemoine, directeur du Ceneca. Des propos d’autant plus véridiques que le Salon occupe l’intégralité des halls d’exposition…

Vaches SIA 2023
Comme c’est traditionnellement le cas, les animaux, et notamment les vaches, seront les attractions du Salon. Crédit SIA 2023.
Intérieur SIA 2023
Environ 600.000 personnes devraient se presser dans les allées du Salon, à la rencontre de 1.100 exposants. Crédit SIA 2023.

Le SIA correspond au « meilleur mélange de ce que comporte l’agriculture française, entre modernité et tradition », déclare Arnaud Lemoine. Avec une représentation non seulement des 13 régions métropolitaines mais aussi des DROM-COM avec La Martinique, la Guadeloupe, la Réunion, la Guyane, la Nouvelle-Calédonie, Saint-Martin, ainsi que Wallis-et-Futuna. À ceux-ci s’ajoutent 30 pays étrangers au total, avec des nouveaux venus tels que la Chine, l’Espagne, le Japon, le Kazakhstan, la Libye ou encore le Nigeria.

Lutter contre les potentiels excès

Mais le Salon est également un moyen d’évoquer les problématiques de fond liées au secteur. « Nous commençons à avoir un message sociétal et social plus important », assure en ce sens le directeur du Ceneca. Pour preuve, Oreillette, la vache égérie de l’édition 2024 fait partie de l’élevage de François et Lucie Foucault, situés dans l’Orne. Ce père de famille réalise actuellement la transmission de son exploitation à sa fille de 24 ans. Une problématique devenue centrale dans l’agriculture française. « S’il n’y a pas de repreneur d’exploitation, il n’y a pas de souveraineté alimentaire et il n’y a pas de SIA », résume Arnaud Lemoine. Ainsi, des conférences se tiendront chaque jour tandis que le pôle Agri’Recrute, situé dans le hall 4, au centre de Paris Expo Porte de Versailles, sera consacré à l’emploi et à la formation.

Les étudiants et les personnes en reconversion pourront alors être mis en lien avec des établissements d’enseignement et des financeurs de formations pour connaître les débouchés des différentes professions représentées. De plus, une agora sera prévue, dans laquelle des prises de parole sur la thématique de l’emploi se succéderont.

SIA’ttitude face aux excès

Par ailleurs, face aux excès – en particulier de consommation d’alcool – qui ont pu émailler les dernières éditions, l’organisateur a décidé de prévenir et de resserrer la vis, au travers de la « SIA’ttitude », un guide de bonne conduite destiné aussi bien aux visiteurs qu’aux exposants. Parmi divers engagements, la consommation d’alcool avec modération, l’interdiction de continuer à servir de l’alcool à une personne ivre, des conversations constructives et positives avec les exposants ou encore le respect du bien-être des animaux. À défaut du respect de ces dispositions, l’organisateur se réserve le droit d’établir des sanctions qui peuvent amener, pour l’exposant, à la fermeture temporaire de son stand.

De plus, des actions de prévention seront visibles pendant l’événement. « Nous avons des exigences supplémentaires : une attitude raisonnable tout en étant festive », rappelle ainsi Arnaud Lemoine, avant de conclure : « Il s’agit d’un salon familial et populaire. »

SIA’PRO, un salon dans le salon

Agri'Recrute SIA 2023
Agri'Recrute SIA 2023. Crédit DR.

« Nous voyions les salons professionnels se développer partout en Europe, nous n’allions pas laisser passer l’occasion », lâche Arnaud Lemoine, directeur du Ceneca, organisateur du Salon international de l’agriculture (SIA). Pour la première fois, les professionnels disposeront d’un accès réservé à un salon dans le salon : le SIA’PRO. Organisé du 25 au 27 février, et situé dans une partie du pavillon 4 sur 1.000m2, il devrait concerner environ 33.000 personnes, se rendant exclusivement à l’événement pour des motivations d’ordre professionnel.

Au total, ce sont même 60.000 visiteurs qui arpentent les allées pour des raisons aussi bien personnelles que professionnelles, soit tout de même 10% du visitorat total. Un contingent non négligeable.

Cependant, alors que ce visitorat professionnel est composé aux deux tiers d’agriculteurs, mais également de représentants des CHR, le SIA’PRO sera principalement destiné aux premiers. « Il sera très peu dédié aux métiers de bouche, mais se concentrera davantage sur le secteur de l’agriculture », précise Valérie Le Roy, directrice du salon. Ainsi, les agriculteurs, chefs d’exploitation, responsables de culture ou encore éleveurs sont particulièrement visés.

Sur place, une dizaine de stands, mais également une salle plénière de 200 places accueilleront des conférences sur les thèmes des nouvelles énergies, la transmission, la transition ou encore un colloque de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) sur l’agroéconomie. Sans oublier une agora pour des prises de parole plus courtes, ainsi que l’organisation d’un hackathon (ou marathon de programmation) sur le sujet de l’intelligence artificielle au service du futur agricole. L’organisation l’assure, il ne s’agit que d’une première étape vers un événement de plus grande ampleur dans les années à venir, avec davantage de stands. « Nous voudrions qu’il grossisse et qu’il existe dans un hall à part entière », confirme Valérie Le Roy.

salon-agriculture.com/SIA-PRO

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