La frite dans tous ses états

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C’est un choix sur l’origine et sur le goût. Les restaurateurs décident en conscience de proposer à leurs clients des frites industrielles ou préparées sur place. Les frites crues, vendues par certaines exploitations agricoles, offrent une autre possibilité.

Surgelées, fraîches ou faites « maison », les frites représentent souvent l’accompagnement idéal de plusieurs plats de brasseries ou d’enseignes de restauration rapide et traditionnelle. Elles se marient avec la viande rouge, le poisson et évidemment les burgers, devenus depuis plusieurs années un hit des tables de bistrots.

Selon une étude publiée en 2017 par le cabinet Gira, « deux assiettes sur trois sont servies avec des frites dans la restauration ». Mais les restaurateurs ont ensuite la possibilité de proposer des frites industrielles (surgelées le plus souvent), des frites fraîches prédécoupées ou encore des frites qu’ils préparent eux-mêmes avec des pommes de terre brutes. Cette dernière tendance est de retour !

L’importance donnée à la frite dictera l’option choisie en cuisine. Car, selon le food checking réalisé en septembre par le quotidien Le Parisien, la différence du coût de revient entre une frite surgelée et une frite maison reste minime. En comptabilisant l’achat des pommes de terre et le prix de la main-d’œuvre, une assiette de frites maison coûterait 0,63 € HT, contre 0,55 € HT pour une assiette de frites surgelées (de la référence Tradistyle de McCain). Mais la praticité de la mise en œuvre pousse de nombreux acteurs vers des solutions industrielles.

Le surgelé encore bien implanté

« Les frites surgelées constituent l’un des en-cas les plus populaires dans le monde et sont largement utilisées par les ménages et les restaurateurs », détaille une étude de marché sur les frites surgelées, réalisée cette année par Businesscoot. Les avantages de ce produit semblent évidents en restauration : rapidité d’utilisation, possibilité de stockage plus importante, contrôle des portions… Sur le segment du bio, les ventes de ce type de frites ont même doublé en 2019. « Une frite sur trois consommées en France est produite par McCain », précise l’étude Businesscoot. L’entreprise canadienne, qui se présente comme le leader « du marché des produits surgelés à base de pommes de terre », possède sept usines en Europe – dont trois en France – et assure « 150 km de distance moyenne entre les champs de pommes de terre et le site de production ». Le géant de l’agroalimentaire présente 25 références de frites destinées aux restaurateurs. « Il existe trois gammes McCain de produits à base de pommes de terre pour répondre à toutes les attentes de la restauration », expose Laure Miquelard, responsable marketing du Food service France de McCain. La gamme Original choice permettrait de proposer « une qualité optimale et constante toute l’année », tandis que la gamme Chef Solutions répond « aux contraintes opérationnelles en cuisine », comme la possibilité de cuire les frites au four, sans ajout de matières grasses. La gamme Menu Signatures offre des frites axées sur « la différenciation » et « la variété sur le menu », à l’instar de la Tradistyle. Cette frite à la coupe irrégulière et biseautée apporte un style authentique qui se rapproche d’une frite faite maison. Outre les frites surgelées, certains professionnels s’accordent parfois sur un entre-deux, en proposant à leur clientèle des produits qu’ils achètent crus et préalablement coupés par des producteurs de pommes de terre.

Frites de producteurs, l’autre choix

Spécialisée dans la production de pommes de terre depuis 25 ans, l’exploitation agricole Les Bacquets (anciennement L’Hirondelle) fabrique des frites fraîches crues et sous-vide, destinées au secteur de la restauration.

« Deux assiettes sur trois sont servies avec des frites dans la restauration. »

« Nous souhaitons garder un produit de qualité tout au long de l’année, ce que nous pouvons faire grâce à notre activité de production : nous allons de la plantation à la commercialisation », explique Marc Bénard, fondateur de la société implantée à Bacqueville-en-Caux (Seine-Maritime). Son exploitation produit 3 000 tonnes de pommes de terre par an et alimente une cinquantaine de restaurants, partagée entre la côte normande dieppoise et la région parisienne. « Nous fournissons des restaurants de cuisine familiale, mais notre évolution nous permettra d’aller vers les brasseries parisiennes. Aujourd’hui, nous faisons des frites crues sous-vide avec une date limite de conservation (DLC) de sept jours, mais nous proposerons bientôt des frites précuites à la vapeur.

Cela allongera la DLC à 21 jours – afin d’éviter les pertes de stock – et réduira le temps de cuisson, en passant 15 à 5 minutes », ajoute Marc Bénard. La société Les Bacquets réajuste aujourd’hui la commercialisation de ses frites, déjà disponibles en plusieurs formats (de 8/8 mm à 14/14 mm). « Nous allons faire aussi des potatoes, des lamelles, des cubes et des pommes de terre entières épluchées… L’attente des consommateurs nous ouvrira plus de portes à terme », estime le directeur de l’entreprise normande.

Également producteur de légumes (pommes de terre, carottes, oignons), l’enseigne des Frites de la Baie conditionne depuis 2017 des frites fraîches artisanales, sans OGM et sans trace de produits phytosanitaires. « Nous faisons de la quatrième gamme, c’est-à-dire de la frite crue et épluchée qui s’adresse à des personnes qui travaillent la pomme de terre brute, explique Charly Raite, chargé de développement de l’exploitation agricole. Nos frites fraîches permettent d’enlever une charge de travail aux professionnels qui désirent retrouver un produit authentique, en gagnant du temps et de l’argent. » Les Frites de la Baie (Ille-et-Vilaine) travaillent en direct avec plus de 200 clients, dont 80 % de restaurateurs. L’entreprise bretonne dispose de son propre service de livraison pour ses clients situés à 80 km autour de la baie du Mont-Saint-Michel, tandis qu’un prestataire privé, la STEF, assure l’acheminement des sacs de frites (de 2,5 kg, 5 kg et 10 kg) dans le reste de la France. « Nous ne mélangeons jamais les variétés de pommes de terre, nous en avons deux et le choix se fait en fonction des préférences de chacun. La Nicola a une chaire farineuse et ferme, tandis que la Melody cuit plus vite », précise Charly Raite.

Frites maison et double cuisson

Différentes catégories de restaurants continuent de proposer des frites coupées et préparées sur place. Plusieurs adresses ainsi que des spécialistes de burgers préparés à partir de produits frais et sourcés, accordent une attention particulière à la frite. La maison Big Fernand offre des frites (ses Fernandines), conçues avec de « vraies patates, lavées, découpées, blanchies chaque matin et cuites à la demande ». Chez PNY Burger, on porte également une attention particulière aux frites. « Nous avons mis deux bonnes années pour trouver le bon producteur, en Picardie. Nous pouvons lui faire des retours pour ajuster des choses lorsque la pomme de terre est trop sèche ou trop sucrée. À la fin du printemps ou au début de l’été, il nous fait basculer sur d’autres espèces de pommes de terre », témoigne Rudy Guenaire, cofondateur de l’enseigne regroupant 8 restaurants à Paris et surtout 14 cuisines, pour gérer également les commandes en livraison. Pour accompagner ses burgers, PNY propose des frites taillées en 7/7 mm pour obtenir un maximum de croustillant. Un croustillant obtenu notamment grâce à une cuisson particulière. « Nous faisons la double cuisson, c’est la règle de l’art. Nous avons essayé la triple, mais il n’y a pas mieux que la double cuisson, nous sommes des geeks de la frite, s’amuse Rudy Guenaire. Nos frites sont cuites avec de l’huile de tournesol : c’est l’huile de la frite de maman. Elle a un goût de noisette que nous aimons beaucoup. » Dans les cuisines de PNY, les frites sont donc faites sur place grâce à des coupe-frites fixés au mur, importés des États-Unis.

NY propose des frites taillées en 7/7 mm et soumises à une double cuisson.

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