La renaissance est en vue

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Même s’ils ont perdu du terrain sur leur marché traditionnel de l’avant-repas, les apéritifs à base devin reviennent sur le devant de la scène en précédant le dîner, popularisés par des cocktails comme le spritz.

Si globalement, la catégorie des apéritifs est en recul de -3,4 % en volume à fin 2018 et à -1,4 % en valeur, plusieurs tendances se confirment, avec des progressions positives, néanmoins. Les amers italiens, déjà, ont retrouvé un nouveau souffle depuis plusieurs années, grâce notamment au spritz, et la progression se poursuit encore cette année (+ 8,3 %). Le spritz a d’ailleurs fait son entrée dans le top 15 des cocktails les plus consommés par les Français et dans le top 8 de leurs cocktails préférés (sources : Nielsen on Trade, bilan 2018 des boissons en CHR). La catégorie est portée par le succès d’Apérol, distribué par Baron Philippe de Rothschild France Distribution (RFD), qui connaît une percée spectaculaire en France.

En imposant un nouveau mode de consommation, celui de l’Apérol Spritz, la marque a conquis de nouveaux consommateurs, des jeunes adultes urbains entre 25 et 35 ans, s’imposant comme le chef de file de ce mouvement. Néanmoins, la marque du groupe Campari estime être encore loin d’avoir fait le plein et maintient la pression pour conquérir de nouveaux établissements et points de vente, et pour entretenir l’envie d’en consommer.

Pour lutter contre tout effet de mode et montrer que son cocktail est intemporel, sa stratégie vise à mettre davantage l’accent sur ses origines. Les mentions sur labo u teille ont évolué pour rappeler sa naissance à Padova (Padoue) en Italie, l’apéritif ayant été créé pour la Foire internationale de 1919, qui s’y déroulait. L’autre axe de développement consiste à désaisonnalisers a consommation et d’en faire une option pour l’hiver. Apérol a ainsi investi les stations de ski en Italie et a récemment étendu le mouvement à la France. La société Bacardi surfe elle aussi sur l’engoue ment qui existe autour du spritz et de l’aperitivo à l’italienne pour sa marque iconique de vermouth Martini qui vient de fêter ses 156 ans. « Si le marché de l’apéritif traditionnel pré déjeuner est en recul, celui de l’apéro moderne, qui reprend les codes de l’apéritif italien, c’est-à-dire débute vers 17 he t se prolonge au dîner, est en forte progression », analyse Nicolas Mazuranic, directeur marketing de Bacardi-Martini en France, Italie et Grèce.

Côté alcool amer, il y a deux écoles : avec l’Apérol, le spritz est plutôt sucré et très orangé ; avec le Campari, la couleur est rouge vif et le résultat plus amer. Pour pousser ce rituel italien, Martini mise égale ment sur son nouveau cocktail Fiero e Tonic. Il est très peu dosé en alcool et la légèreté des bulles met en valeur ses notes d’agrumes.

Campari mise sur l’apéritivo à l’italienne avec son cocktail Fiero e Tonic.

Campari mise sur l’apéritivo à l’italienne avec son cocktail Fiero e Tonic.

Grand retour des ABV et amers français

L’engouement pour le « boire français », incarné notamment par les apéritifs traditionnels à base de vin (ABV) et amers, amis un terme à des décennies d’érosion de leurs ventes. Sans compter que les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux productions locales, voire ultra-locales, ainsi qu’à l’artisanat versus l’industriel. Ainsi, une marque comme Lillet, créée en 1872 à Podensac, un petit village situé au sud de Bordeaux et toujours élaboré dans la maison historique par une petite équipe de huit personnes, rencontre un écho particulier. En CHR, marché qui représente environ un tiers de ses ventes, Lillet enregistre une progression de + 5,5 % en 2018, une performance tirée vers le haut par les restaurants à + 19,5 % (source : Nielsen CHR 2018). Sa consommation en cocktail est un point clé de sa croissance.

Pour répondre aux attentes des clients en recherche de fraîcheur et de cocktails légers en alcool, la marque a créé le cocktail long drink Lillet Tonic. À chaque couleur, son ingrédient signature qui vient apporter la touche aromatique finale au cocktail : du concombre avec Lillet Tonic Blanc pour la fraîcheur végétale, une tranche de citron vert en version rosé pour la touche acidulée et, enfin, une tranche d’orange pour les notes d’agrumes en version rouge. À Paris, le Pavillon des Canaux, au bord du canal de l’Ourcq, se dote d’un bar Lillet Tonic à partir du mois de juin et mettra en place des afterworks tous les jeudis avec des propositions de foodpairing cocktails. À Bordeaux, le Grand Hôtel renouvelle tout le mois d’août son popup bar Lillet sur son toit-terrasse.

Lillet (Ricard) mise sur le foodpairing.

Lillet (Ricard) mise sur le foodpairing.

Un autre acteur au sein des ABV poursuit sa progression ; il s’agit de Saint-Raphaël, appartenant à Bardinet La Martiniquaise. En relançant la marque l’année dernière en CHR, le groupe a opéré de nombreux changements afin de revenir à la recette historique : les deux recettes, ambré et rouge, ont été retravaillées pour renforcer les qualités organoleptiques véhiculées par le quinquina ; le format est passé d’1 litre à 75 cl ; le degré d’alcool de 16 à 14° et la bouteille s’est dotée d’une nouvelle étiquette inspirée du travail, dans les années 1950, du peintre affichiste officiel de la marque, Charles Loupot. Ce lifting, associé à de nouveaux usages de consommation en cocktail autour du Saint-Raphaël Tonic, ainsi qu’une version revisitée du Negroni, a eu un impact sur l’augmentation de ses ventes de près de 20 % en CHR. Pour diffuser encore plus largement ces cocktails, 75 établissements dans toute la France seront animés jusqu’à mi-septembre.

Saint-Raphaël propose une version revisitée du Negroni avec son French Negroni (5 cl de Saint-Raphaël rouge, 1,5 cl de gentiane et 1,5 cl de gin).

Saint-Raphaël propose une version revisitée du Negroni avec son French Negroni
(5 cl de Saint-Raphaël rouge, 1,5 cl de gentiane et 1,5 cl de gin).

Du côté des amers français, la Suze, un apéritif à base de gentiane né en 1889, profite d’un intérêt croissant de la part des établissements. La stratégie de Pernod est de partir à la conquête d’une nouvelle génération de consomma teurs, car sa marque historique accuse une décroissance structurelle portée par une perte d’ache teurs seniors. Elle a ainsi vendu en CHR 180 000 litres en 2018, soit -9 % vs 2017. Pour conforter son retour en grâce auprès des professionnels, la marque dispose de trois bran d ambassadeurs (2 à Paris et 1 à Lyon), qui activent une centaine de bars dans des quartiers ciblés. Leur rôle est de faire redécouvrir Suze aux 25/35 ans via une consommation en Suze Tonic. Pour cela, ils organisent des animations dans les bars et des dégustations, s’assurent que ce cocktail est à la carte et au bon prix et que la visibilité de la marque dans les établissements soit bonne.

Le cocktail Suze Tonic (5 cl de Suze, 10 cl de tonic, citron vert).

Le cocktail Suze Tonic (5 cl de Suze, 10 cl de tonic, citron vert).

Des résultats prometteurs, puisque le taux de réachat est aujourd’hui de 60 %. Les apéritifs traditionnels ont donc encore de beaux jours devant eux…

Freixenet réinvente la sangria blanca au verre ou en carafe (75 cl de Freixenet Cordon Negro Brut ou Freixenet Xperiencia, 15 cl de pur jus d’ananas, 5 cl de sucre de canne)

Freixenet réinvente la sangria blanca au verre ou en carafe (75 cl de Freixenet Cordon Negro Brut ou Freixenet Xperiencia, 15 cl de pur jus d’ananas, 5 cl de sucre de canne)

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