Osez la salade !

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Savant mariage de légumes, de fruits, de céréales et de protéines, les salades doivent avant tout surprendre les clients, tant par leurs saveurs que par leurs couleurs. Si depuis quelques années les bowls ont le vent en poupe, d’autres ingrédients (micropousses, fleurs comestibles) ou encore la multiplicité des découpes viennent agrémenter les salades.

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Poke bowl baron de saumon en ceviche. Crédit Mowi.

Si historiquement la salade niçoise et la César ont toujours fait carton plein, une nouvelle génération de salades prend de l’ampleur aujourd’hui. Celles-ci sont présentées dans un format que l’on appelle « bowl ». Ce bol (en français) n’est autre qu’un plat « rond, instagrammable, composé d’une juxtaposition de goûts et de sensations, où le sucré côtoie souvent le salé. Et où le chaud peut se mêler au froid », estime Bernard Boutboul, président du cabine Gira. Cette tendance nous vient de Californie, « comme à peu près toutes les modes. Ce sont eux qui ont inventé le Gourmand healthy », souligne le président de Gira.

Si certaines enseignes de restauration rapide telles que Pokawa ou encore La Maison du Poké (Paris, 3e), ont rapidement su surfer sur la tendance en ne proposant que des bowls. D’autres établissements, comme les brasseries traditionnelles, ont pris le train en marche. « Ce sont des plats très demandés à l’image du burger ! Ne pas les mettre sur une carte serait une grosse erreur. Je dirai même plus : il faut les proposer en taille S et L pour que les clients puissent les prendre aussi bien en entrée qu’en plat. C’est une recette qui attire tout le monde, y compris la génération Z ! », déclare Bernard Boutboul. Un avis partagé par Nicolas Dron, directeur marketing de Bonduelle Food Service, pour qui « ces recettes ont ouvert l’univers des salades ». Grâce à ces nouveaux formats, on peut « marier du saumon avec du kiwi, comme le fait en ce moment Pokawa », indique Bernard Boutboul.

L’inspiration californienne

Selon ce dernier, les poké et les buddha bowls attirent par « leur forme », qui diffère des sempiternelles salades à l’assiette. « Si nous prenons la salade de fruits, là aussi, elle se réinvente depuis quelque temps en bowl via une recette venue, là encore, tout droit de Californie : l’açaï bowl. » Ce dessert brésilien, constitué de baies d’açaï réduites en purée et parsemées de fruits frais et d’oléagineux, est lui aussi « visuel » et donc « instagrammable ». D’ailleurs, pour le président de Gira, le réseau social spécialiste de l’image est considéré, aux côtés de TikTok, comme le seul canal de communication de la restauration, car « nous achetons ce que l’on voit et l’on vend ce que l’on montre ».

Si les bowls ont bien le vent en poupe depuis quelques années, la salade peut se décliner à l’infini, autant en termes de saveurs que de découpes. Ainsi, pour se démarquer, il est tout à fait envisageable de présenter les salades « en tartare ou en carpaccio par exemple, indique Stéphane Renou, diététicien chez Interfel. Une salade doit avant tout être attractive pour le consommateur et permettre aux chefs de s’amuser en jouant avec leur imagination. »

Salade spagettis
La salade peut se démarquer par les diverses découpes des légumes, créant un effet esthétique indéniable. Crédit Eureden Foodservice.
Salade carotte
Image d'illustration. Crédit DR.

De plus, selon lui, mixer les couleurs est également un atout santé considérable : « Les pigments colorés de chaque fruit et légume vont permettre d’avoir des apports en micronutriments qui vont se complémenter. » Ainsi, « le pigment orange lié à la présence de bêtacarotène – nécessaire à la santé des cellules ainsi qu’à une bonne vision – se retrouve aussi bien dans la carotte, l’abricot et le melon. Les anthocyanes, qui confèrent une couleur violette à la betterave, ont quant à elles une action antioxydante de protection cellulaire », explique le diététicien.

Des produits couteaux cuisses

Pour Nicolas Dron, responsable du marketing culinaire chez Bonduelle Food Service, « la salade est un secteur qui bouge beaucoup. Avant, on se demandait si on allait être rassasié en mangeant une salade. Alors qu’aujourd’hui, grâce aux bowls, il existe des propositions très complètes ». En effet, il y a désormais « toujours des céréales ou des légumineuses. Les légumes comme la salade verte, les carottes fraîches ou le chou viennent alors rafraîchir l’ensemble, tout en apportant du croquant en bouche », souligne-t-il. Seul bémol, « le bowl reste une cuisine d’assemblage. Il faut avoir beaucoup d’ingrédients à disposition et, tous ne nécessitent pas les mêmes temps de cuisson », déclare Nicolas Dron.

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Aujourd’hui, grâce au mélange de légumineuses et de légumes, les salades peuvent aussi rassasier. Crédit D'aucy.

Selon lui, « préparer le végétal n’est pas si simple. Il y a d’abord l’épluchage puis les découpes, et enfin les cuissons. Cela fait beaucoup de gestes alors qu’il y existe actuellement une pénurie de personnel. » Ainsi, Bonduelle Food Service a développé plusieurs variétés de céréales, de légumineuses et de légumes cuits non assaisonnés, à utiliser chauds ou froids. Les produits de cette gamme « Service » peuvent directement être utilisés au moment du dressage du plat. « Les chefs sont ainsi libres de les utiliser comme ils le souhaitent », précise-t-il.

Mieux saucer pour gagner du temps

Par ailleurs, pour Marion Ducloux, responsable marketing chez Unilever Food Solutions, le gain de temps se joue également dans les sauces utilisées. Celles-ci permettent de twister un plat en un tour de main. Ainsi, chez Maille, par exemple, « il existe des vinaigrettes biphasées, mélange de vinaigre et d’huile d’olive, avec plusieurs saveurs allant de la classique échalote-oignon à la sésame-soja ou la balsamique-fraise. »

De même, Hellmann’s propose désormais cinq références de sauces à utiliser aussi bien en salades que dans des burgers (Deluxe, Barbecue, Ail, Taco et Gyros)… et elles ont l’avantage d’être simples d’utilisation. Tous ces produits clés en mains ont le mérite de faire gagner du temps aux restaurateurs, bien qu’il reste important d’apporter une touche plus personnelle et créative.

Les micropousses fleurissent

Le consommateur, en quête de nouvelles saveurs, a autant besoin d’être étonné que transporté. Si les produits exotiques comme la mangue, l’ananas ou l’avocat, semblent sans pareil pour répondre à cette envie, et se retrouvent par conséquent « être les produits phares des poké bowls, buddha bowls et autres salades », comme l’indique David Bicheron, directeur général de Picadeli, leur facture en termes d’empreinte carbone est pour le moins salée.

Néanmoins, il existe désormais des alternatives 100% made in France qui parviennent à éblouir les yeux et les papilles. Ces petits trésors gastronomiques, ce sont les micropousses, les jeunes pousses et les fleurs comestibles. En plus d’être des produits originaux et savoureux, ces derniers sont « de véritables bombes nutritionnelles », déclare Laurent Couraudon, l’un des deux cofondateurs de la société Wesh Grow. Celle-ci propose une centaine de références venues du monde entier, allant du basilic thaï à la microsauge, en passant par les pousses de baobab, les fleurs de fenouil sauvage ou encore les fleurs de livèche.

iFleurs comestibles Marius Auda
Fleurs comestibles Marius Auda. Crédit Marius Auda.

Wesh Grow travaille avec une centaine de restaurateurs dans le sud de la France et 1.200 restaurateurs parisiens : « Cela va du restaurant traditionnel La Traversée (Paris, 18e) à des palaces comme The Peninsula (Paris, 16e) ». Tous sont livrés à pied ou à vélo. Dans les salades, le bénéfice est triple : « Les micropousses possèdent déjà toutes les saveurs des pousses, mais avec bien plus de nutriments », précise Laurent Couraudon, ajoutant que « les chefs les apprécient également pour leur côté esthétique. Il y a immédiatement un effet “waouh”, cela pimpe facilement un plat en plus de couvrir un large spectre de goûts ».

Les futurs condiments ?

Selon ce dernier, ces très jeunes pousses sont de véritables condiments : « on peut même faire le choix de ne pas assaisonner. La mélisse apporte des notes citronnées, la moutarde Wasabi fait office de raifort et la capucine est très poivrée. »

Enfin, il est également possible de « créer des assemblages avec ces petites pousses, qui sont comme des mini-salades », indique-t-il. Et pour ne rien gâcher, les micropousses et les jeunes pousses sont également perçues comme des alicaments : « C’est d’ailleurs davantage pour ce bénéfice-là que les particuliers les consomment », souligne le fondateur de Wesh Grow. Un avis que partage le diététicien Stéphane Renou, pour qui ces plantes « en plus d’avoir des saveurs très condensées, ont l’avantage d’être très concentrées en micronutriments. Leur apport est intéressant. »

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