La révolution culturelle des sauces et jus en restauration

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Le marché des aides culinaires est longtemps resté sur ses acquis. Les fonds, jus et sauces entament pourtant une mue progressive, à la faveur des nouvelles habitudes des chefs et d’innovations produits.

« Les fonds sont à la cuisine ce que les fondations sont à un édifice », écrivait Gringoire et Saulnier dans leur Répertoire de la cuisine . Dans un pays où la cuisine repose en partie sur l’art de la sauce, pas étonnant que les habitudes aient la vie dure en matière de jus, fonds et sauces. Il y a longtemps eu deux camps : les partisans de bases maison, qui rappelons-le se conservent jusqu’à J+3 et J+1 pour le fumet de poisson, et les partisans des solutions déshydratées. Si les deux méthodes persistent évidemment, les fabricants assistent à un regain d’exigences des chefs sur ces produits et à une évolution des achats.

« Historiquement, Knorr se positionne plutôt sur des produits finis à réhydrater. Mais on constate de plus en plus que les chefs se tournent vers des produits ingrédients ou semi-finis pour faire leur sauce maison ou apporter leur touche à l’un de nos produits, observe Hélène Trémeaux, responsable de marque Knorr professionnal. Par exemple, les roux sont en perte de vitesse car ils préfèrent les réaliser eux-mêmes. Par contre, les bouillons légèrement liés et assaisonnés, notamment de légumes, sont en croissance. Ils sont plus versatiles qu’un bouillon de bœuf ou de volaille, plus segmentant vis-à-vis du public végétarien. »

Le nouveau rôle des fonds

Les nouvelles tendances culinaires, du végétarisme en passant par l’engouement pour la cuisine asiatique et la recherche de naturel dans l’assiette peuvent-elles donc avoir la peau des fonds ? Non, à en croire les experts. « Les références liquides [produits premium chez Chef®, NDLR] prennent de plus en plus d’importance car les chefs recherchent du plus frais, plus naturel », estime Charlotte Ponti, business director pour Chef® et Maggi. Au même titre que pour tout autre ingrédient, les bases doivent désormais montrer patte blanche. « Il y a une forte tendance à se détourner de la sauce lourde et épaisse, ajoute Hélène Trémeaux. Les chefs cherchent des textures plus légères, avec moins d’ingrédients et plus dans la simplicité. Mais c’est un peu à deux vitesses car les plats du terroir, comme la blanquette, restent parmi les plats préférés des Français. C’est cette ambivalence qui nous amène plus vers des sauces déglacées de manière inattendue, par exemple avec des vinaigrettes. Cela permet une approche plus moderne de la sauce tout en répondant à une autre tendance forte, celle du végétal, face à la traditionnelle base de viande. » Il n’a pas été facile pour les fabricants de dépoussiérer les pratiques établies, presque inscrites dans le marbre des plus grands référentiels de cuisine. « La vocation de Chef®, c’est être un ingrédient d’une sauce, d’un jus, rappelle Charlotte Ponti. On essaye de faire évoluer la manière de les utiliser, notamment avec la gamme Signature, pour répondre à d’autres besoins, notamment pour développer des plats différenciants, en intégrant par exemple de la pâte à l’ail noir ou au poivre fermenté dans une sauce à burger. »

« Les chefs cherchent des textures plus légères, avec moins d’ingrédients et plus dans la simplicité. »

Chez Mada, fabricant historiquement implanté en Alsace, la qualité des fonds doit évoluer, mais l’identité du plat doit rester dans les mains du chef. « On ne fabrique pas des produits finis. J’apporte des aides, mais ce sont les chefs qui feront que le plat final sera bon, estime le directeur général, Nicolas Grosjean. C’est pour cela que nous souhaitons que nos produits ne soient pas trop personnalisés, pour laisser la possibilité au chef de s’exprimer. Un fond de veau, il doit être viandé, légèrement lié et c’est tout. »

Les compositions à la loupe

À l’heure où tout consommateur scrute les étiquettes, l’industrie agroalimentaire a entamé une longue transition vers des compositions plus simples et saines. Les fabricants de fonds et sauces ont pris le train en marche et renouvellent régulièrement leurs gammes.

En 2019, Knorr a entrepris de simplifier les recettes et d’enlever les exhausteurs de goût de trois de ses produits phares : le fond brun lié, le jus de veau lié et le fumet de poisson. « On mise sur la transparence des compositions pour que les professionnels puissent aller vers nos produits sans se poser de questions. » Chef® sortira dans les semaines à venir une nouvelle recette de fond de veau naturel, enrichie en os de veau (2,2 kg /litre).

Pour Nicolas Grosjean chez Mada, « le monde du déshydraté bourré de sel et de glutamate a connu son heure de gloire, mais il y a eu un virage. Seulement, la politique d’amélioration des produits s’est longtemps heurtée au mur du rapport qualité-prix ». Si l’ADN de l’entreprise alsacienne a toujours été marqué par une volonté de bien faire, « sans allergènes, sans jamais utiliser d’huile de palme », les équipes de Nicolas Grosjean souhaitent passer à la vitesse supérieure en matière qualitative. « L’avantage d’un fabricant indépendant, c’est que ses petits volumes lui permettent d’avoir une approche plus qualitative des ingrédients. Nous tendons vers des recettes les plus clean possible, avec une traçabilité et des éléments nobles. Quand vous lisez l’étiquette, vous savez exactement ce qu’il y a dedans. Le seul E qu’il nous reste et qu’on est en train d’éliminer, c’est le caramel. Peut-être que nos produits ne seront pas au goût de certains, mais on s’attache à ce qu’on ne puisse pas simplement dire qu’ils ne sont pas bons. »

Et le bio ?

En complément des évolutions précédemment citées, le bio reste une niche sur ces produits. Chef® ne propose aucun produit pour le moment mais explique « être en réflexion » sur le sujet. Chez Knorr, une gamme de bouillons bio est venue répondre à une demande grandissante. Seul acteur à tirer son épingle du jeu sur le sujet, Mada propose 6 références différentes. « Nous travaillons du bio depuis plus de 15 ans, mais nous avons déployé une gamme large depuis 3 ans. Nous voulions apporter une valeur ajoutée en travaillant du bio certes, mais à partir de très bons produits. Car contrairement à l’idée, ce n’est pas parce que c’est bio que c’est bon… On voit d’ailleurs de plus en plus la restauration commerciale venir vers nous avec cette envie de bio de qualité. » À bon entendeur.

Maille Inspiration, vinaigrettes aux fruits

Maille innove avec 4 vinaigrettes émulsionnées légères utilisables à froid ou à chaud, ce qui permet de les utiliser pour déglacer. Les recettes à base de fruits (pomme-avocat-jalapeño, tomate-fraise, ananas-coco et agrumes-gingembre) permettent de réaliser des sauces végétariennes, mais également sans gluten et sans lactose. Sans colorant artificiel, sans arôme artificiel, sans conservateur. Bouteille de 1 l.

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