Vin : Lionel Osmin, une griffe du Sud-Ouest
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Le négociant de Pau est connu pour ses vins du Sud-Ouest produits à l’aide de raisins sélectionnés dans divers terroirs. Mais depuis quelques années, il a noué des partenariats avec des domaines, comme celui du chef Michel Guérard ou du Clos Joliette.
En moins de dix ans, Lionel Osmin a imposé son nom comme une signature majeure des vins du Sud-Ouest. Avec deux associés, l’œnologue Damiens Sartori et Benoît Vettorel, un as du marketing, il a d’abord développé sa société avec un métier de vinificateur-assembleur. Il est allé sélectionner des raisins dans les vignobles du Sud-Ouest, de Marcillac à Jurançon, en passant par Gaillac, pour créer des cuvées originales capables de transcender le côté un peu rustique de certains vins de cette région et les faire apprécier à un plus large public. « Au départ, on nous regardait comme des fous, raconte-t-il. Mais j’aime bien la phrase de Nelson Mandela qui dit que les choses semblent souvent impossibles jusqu’à ce qu’on les fasse. Le Sud-Ouest est une des régions en France où il y a tout à explorer. La spécificité des terroirs et des cépages, qui pouvait apparaître comme un handicap, est devenue un avantage dans le contexte actuel. »
Ainsi, Lionel Osmin a mis en œuvre une collection d’une vingtaine de vins, avec une classification astucieuse. À la base de cette offre, on trouve la collection des Villas, qui décline des vins de cépages courants du Sud-Ouest. Une gamme, le Conservatoire, permet de découvrir les cépages rares de cette zone géographique (ondenc, ekigaïna, abouriou). La société propose enfin des AOC (buzet, cahors, gaillac, iroulé-guy jurançon, madiran). La maison de négoce doit aussi son succès dans le réseau traditionnel à des cuvée très créatives comme le Roi bœuf (IGP landes), L’Homme canon (cépage tannat) ou encore Fer de soif (marcillac). Ainsi, dans cette dernière cuvée, Damiens Sartori est parvenu à exprimer une expression inhabituelle de fer servadou reposant largement sur le fruité. Mais depuis quatre ans, Lionel Osmin a haussé la barre d’un cran en développant une activité de pilotage de domaines. Les accords de partenariat varient de la gestion des domaines à des partenariats de commercialisation exclusive. La société déploie ainsi dans la Compagnie des domaines des noms comme San de Guilhem (IGP gascogne), Clos Cancaillaü (jurançon) ou le domaine Berthoumieu (madiran). « Auparavant, nous allions chercher des raisins correspondant au profil des vins que nous souhaitions élaborer, précise Lionel Osmin. Avec nos domaines, nous nous adaptons au terroir pour en extraire le meilleur. »
Damiens Sartori et Lionel Osmin.
Il y a deux ans, le négociant a même repris en main le domaine vinicole du célèbre chef Michel Guérard (Bachen). Ensemble, les deux hommes ont créé une cuvée de rosé, la Dune. Mais le plus beau fait d’armes de l’entrepreneur reste sans doute un contrat de gestion pour cinq ans du célèbre Clos Joliette, conclu avec la veuve du caviste parisien, Michel Renaud, décédé en 2015. À la fin des années 1990, ce grand connaisseur était parvenu à racheter ce clos d’un hectare et demi de jurançon à la famille Minier, qui l’avait planté en 1929. Le Clos Joliette est un des vins liquoreux les plus rares de ce vignoble. Pendant plus de vingt-cinq ans, Michel Renaud avait exploité le domaine en conservant une très large partie de la production dans ses chais. Il faut dire que ce clos de vieilles vignes permet de produire en moyenne un millier de bouteilles chaque année et que le vin dort parfois près de six à sept ans en fûts avant d’être embouteillé. Non seulement Lionel Osmin exploite le vignoble depuis 2018, mais il a racheté le stock détenu par la famille Renaud. Il détient ainsi 21 millésimes de ces précieux flacons qui s’échangent chez les cavistes entre 200 et 250 € par bouteille. Le négociant peut désormais donner un avenir à la légende de ce clos à peine plus visible sur les tables que l’Arlésienne.
Une cuvée de légende
Clos Joliette
Monocépage petit manseng, le Clos Joliette est une exception sur le terroir de jurançon où les producteurs privilégiaient le gros manseng. D’ailleurs, ce vin n’est plus vendu sous l’AOC jurançon. En 2009, Michel Renaud a souhaité s’affranchir des contraintes administratives de l’appellation. Au niveau commercial atteint par ses bouteilles, la mention jurançon apparaissait secondaire. Les millésimes 2016 et 2017 sont inexistants, car vendus sur pied. Lionel Osmin a mis en cave les millésimes 2018 et 2019, mais il faudra attendre pour les découvrir. 2014 dort encore dans les fûts des chais du domaine, à Jurançon.