Vin : s’adapter aux nouvelles habitudes de consommation
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Selon l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV), la consommation de vin de la France, en volume, a reculé de 21,7 % entre 2000 et 2017. Néanmoins, les Français boivent encore en grande majorité du vin lorsqu’ils se rendent au restaurant. En observant les changements et les nouveaux modes de consommation des clients, les professionnels de CHR peuvent s’adapter et même augmenter leurs ventes de vin.
« Je n’ai pas de baisse de consommation du vin ; j’ai juste un changement de consommation », estime Didier Bouyssou, propriétaire de la brasserie Le Progrès (Paris 3e) depuis 1996. Malgré une nette diminution de la consommation en moins de vingt ans (recul de 21,7 % en volume, selon l’OIV), les Français n’ont effectivement pas abandonné leur passion pour cette boisson fermentée lorsqu’ils sortent de chez eux. L’étude OpinionWay réalisée en fin d’année 2019 (voir notre article du 12/12/2019) révèle que 81 % des Français boivent du vin au restaurant et que cette tendance est encore plus élevée dans la capitale, où 87 % des Parisiens en consomment. Mais les clients des bistrots et restaurants semblent surtout avoir différé une partie de leur consommation de vin, ce que constate Romain Chassang, responsable du restaurant Le Vigny (Paris 17e) : « Le midi, le vin à table se fait moins qu’à une époque. Le fait de savoir que son collègue a bu du vin au déjeuner est moins bien vu. C’est un peu un marqueur, mais le soir, c’est différent. »
« Je n’ai pas de baisse de consommation du vin, j’ai juste un changement de consommation »
L’utilisation des titres-restaurant ̵ aux montants limités – ne favoriserait pas non plus la consommation de vin à la mi-journée, remarquent certains restaurateurs. « La consommation est différente aujourd’hui. Il faut vivre avec son temps, il ne faut pas chercher à retrouver ce que l’on a perdu. Dans vingt ans, les gens ne mangeront plus sur place le midi », considère même Didier Bouyssou. Propriétaire de la brasserie Le Royal Europe (Paris 8e), Antonio Da Costa observe le même phénomène dans son établissement installé entre la place de Clichy et la gare Saint-Lazare. « Avant, on buvait du vin surtout au repas de midi. Depuis quelques années, c’est devenu à la mode de consommer le soir. Les gens – hommes et femmes – s’assoient et prennent un verre de vin après le travail. C’est la consommation au verre qui marche le plus, chacun peut prendre son type de vin. »
L’ESSOR DU VIN AU VERRE
Afin d’adopter une consommation plus mesurée, propre par l’adage « mieux vaut moins, mais mieux », la commande de vin au verre est en hausse de 32 % dans les restaurants, indique l’étude OpinionWay de 2019. Les restaurateurs doivent tenir compte de cette donnée, en proposant éventuellement davantage de vins servis au verre. Au Royal Europe, 18 des 23 références de vins (rouges, blancs et rosés) sont disponibles au verre : ce qui offre au client la possibilité de goûter plusieurs vins au cours d’une même soirée. « Le vin tient encore bien la route en comparaison des apéritifs, comme le Ricard ou le Martini », souligne Antonio Da Costa. Le choix du format peut constituer une donnée stratégique pour les professionnels de CHR. Outre l’essor de la consommation au verre, le pichet de vin remplace aussi de plus en plus la bouteille à table. À partir de ce constat, de nombreux bars et restaurants au débit important n’hésitent pas à s’approvisionner en cubitainers de vin pour proposer des prix attractifs.
« LE ROSÉ EST DEVENU PHÉNOMÉNAL »
En grande distribution, les vins blancs et rosés ont progressé respectivement de 4 % et 40 % en dix ans, selon les bilans de FranceAgrimer établis en 2019. Une tendance qui semble aussi se confirmer aux comptoirs des bars et aux tables des restaurants. « Le rosé est devenu le vin à la mode à Paris ; on boit maintenant du rosé toute l’année, confie Didier Bouyssou, gérant du Progrès. Avant, c’étaient des vins locaux que l’on buvait à la plage ou en vacances. Mais depuis dix ans, le rosé est devenu phénoménal : j’en vends plus de 3 000 bouteilles à l’année. Des marques comme Minuty ont tout fait pour inonder Paris. C’était un vin de prestige et ils ont joué là-dessus. »
En dehors de l’environnement branché du haut Marais, dans lequel baigne Le Progrès, le rosé semble avoir aussi trouvé sa place partout à Paris. S’il est consommé davantage durant les beaux jours, « il y a une demande de rosé très clair », précise Romain Chassang, tandis que « le rosé foncé ne se vend pas », ajoute le responsable du Vigny (Paris 17e). Depuis la rue d’Amsterdam, Antonio Da Costa voit encore le rosé essentiellement comme un vin féminin, où le Minuty remporte les faveurs de sa clientèle : « C’est celui qui se vend le mieux parmi les quatre rosés de la carte. »
CONSEILLER SA CLIENTÈLE
« Le vin blanc se vend bien aussi… peut-être mieux que le vin rouge. Le problème du rouge est qu’il est devenu très cher. On arrive à trouver des blancs sympas et pas chers, alors qu’un rouge sympa et pas cher, c’est plus compliqué », constate Didier Bouyssou. Le vin blanc représente une certaine stabilité dans la consommation de vin en restauration aujourd’hui. À l’instar du phénomène observé en grande distribution depuis une décennie, il semble gagner du terrain sur le vin rouge, dont les ventes ont diminué de 23 % en volume (FranceAgrimer). « Le vin blanc, on en vend tout le temps », lance un directeur d’une brasserie parisienne. Même s’ils connaissent certains cépages ou AOC, les consommateurs de vin aiment se faire conseiller et découvrir de nouvelles références. « Nous avons une jolie carte des vins, avec trois pages de blancs et trois pages de rouges ; cela montre que nous avons un fort intérêt. Les gens sont donc en demande de conseils », déduit Laurent Cabut, responsable et propriétaire du Chateaubriand – une étoile au Michelin (avec le chef Inaki Aizpitarte) – et du Dauphin (Paris 11e). Ces deux établissements y servent uniquement du vin nature. « Nous aimons le vin et nous essayons de servir ce qui est intéressant à boire. Ceux qui n’en boivent pas [de vin nature], nous essayons de les conseiller pour ne pas les fâcher. Servir un vin un peu réduit, qui sent l’étable, ce n’est pas mettre en avant le vin », conclut Laurent Cabut.
5 conseils pour relancer ses ventes de vin
– Multiplier l’offre de vins servis au verre (ou au pichet)
– Favoriser le lien direct avec les producteurs/vignerons :
– pour réduire les coûts des intermédiaires – pour mieux connaître les vins
– Conseiller les clients sur l’origine (cépages, AOC) et les caractéristiques du vin (sec, fruité, etc.) > 86 % des clients apprécient les conseils des serveurs (OpinionWay)
– Prendre en compte les tendances de consommation
– S’approvisionner en cubis de qualité (pour les bars et restaurants à fort débit), plus rentables que les bouteilles en verre