Vin en canette, une image boiteuse

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Alors que le vin est traditionnellement associé au format bouteille, il existe l’alternative de la canette. Si celle-ci présente des avantages pratiques, en termes d’écoresponsabilité ou de stockage, les mentalités évoluent difficilement.

La Robe du Vin propose une gamme d’une dizaine de vins en canette. Crédit : La Robe du Vin

S’il y a bien un secteur dans lequel le classicisme perdure, c’est le vin, avec la traditionnelle bouteille en verre et son bouchon en liège. « Le vin innove peu », lâche ainsi Brigitte Després, sommelière qui a fondé en 2021 La Robe du Vin, marque de vin en canette. Pour le moins que l’on puisse dire, c’est que le format canette, ou boîte, vient bouleverser les codes. Peut-être trop. Le réseau de caves et bars V and B l’a appris à ses dépens, en proposant, il y a trois ans, du vin rosé et blanc en canette. « L’offre n’a pas pris à ce moment-là », admet Fanny Byrotheau, chargée du marketing vin, ce qui a poussé le groupe à y mettre fin.

Néanmoins, elle tente une explication : « Peut-être parce que les Français sont attachés à la bouteille. Les clients n’avaient pas forcément l’occasion de déguster donc c’est davantage lié à l’image que le produit renvoyait. » En somme, une image de mauvaise qualité reste attachée à la canette. À tel point qu’elle ne constitue pas pour V and B une priorité. Le groupe a néanmoins réinvesti le segment, avec le vin sans alcool. Une manière de « casser le côté déceptif », comme l’explique Noémie Brochard, cheffe de groupe sans alcool, en évitant la comparaison entre le sans-alcool et le vin classique. À l’inverse, Brigitte Després croit en la canette, alors qu’elle a commercialisé en 2023 environ 120 000 unités, avec un sourcing attentif auprès de « vignerons indépendants et certifiés ».

Et ce, dans une logique de soutien à la filière vitivinicole : « Être réfractaire à l’innovation, c’est se tirer une balle dans le pied. La canette correspond à un produit facilement accessible pour les jeunes. » Un argument qui porte dans une époque de déconsommation de vin. « Les modes de consommation ont évolué. La canette peut correspondre aux personnes célibataires, aux familles monoparentales. De plus, les jeunes boivent moins d’alcool et sont davantage portés sur la bière », justifie-t-elle, en soulignant l’aspect écoresponsable du format. « La canette n’altère pas le goût du vin », ajoute-t-elle. Aussi, « elle permet un gain de place et un gain de temps parce qu’elle évite le service », témoigne Pierre Teillet, qui tient Le Dépanneur, brasserie diner à Celles-sur-Belle (Deux-Sèvres), avec un service au comptoir.

Depuis trois ans, il ne sert plus que du vin au format canette. S’il ne cache pas « avoir pris un risque, étant en milieu rural », ni que « les ventes de vin ont un peu baissé », il ne regrette rien : « J’ai développé le marché des camping-caristes. » Enfin, le vin en canette ne semble pas convenir à tous les CHR. « Je ne vise pas les restaurateurs qui font de la vente sur place, mais plutôt ceux qui pratiquent la vente à emporter ou les hôteliers [pour les minibars, NDLR] », conclut Brigitte Després.

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