Longtemps cultivée dans les environs de Saint-Flour, la lentille blonde avait totalement disparu du Cantal. Elle s’épanouit de nouveau sur le plateau de la Planèze, entre Margeride et monts du Cézallier.
L’histoire de la lentille blonde de Saint-Flour a tout d’une résurrection. Historiquement cultivée sur la Planèze, dans le Cantal, cette petite légumineuse blond cendré fut complètement abandonnée au milieu des années 1960, au profit de l’élevage bovin. Elle n’avait pourtant pas disparu des mémoires. Trente ans plus tard, le sénateur-maire de Saint-Flour Pierre Jarlier souhaite relancer sa production. « Problème, il ne restait pas de semences », raconte Henri Cairon, producteur à Neuvéglise-sur-Truyère et actuel président de l’association interprofessionnelle réunissant les acteurs de la filière. Avec l’aide de l’abbé Boussuge, curé de Paulhac, il passe alors une annonce dans le bulletin paroissial. En fouillant au grenier, un petit-fils de producteur retrouve un kilo de ces lentilles ! Hélas, les graines, trop vieilles, n’ont pas germé. Pierre Jarlier ne s’avoue pas vaincu. Jean-Pierre Bonnaud, artisan de la renaissance de la lentille verte du Puy et chercheur à l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA), est sollicité. Après de nombreuses expérimentations, celui-ci obtient seize variétés très ressemblantes. D’anciens producteurs sont invités à évaluer les plants, puis associés à des dégustations à l’auberge de Lanau, sous le parrainage de Michel Bras. Objectif, choisir la lentille correspondant le plus à leur souvenir. Ils n’en retiendront finalement qu’une, la Flora. « C’est cette variété, plus petite et moins farineuse, qui est cultivée aujourd’hui, pointe l’agriculteur. La filière compte une trentaine de producteurs pour une production approchant généralement les trente à soixante tonnes. Cette année, la récolte est bonne. »
Goût de châtaigne
D’un petit calibre, dotée d’une peau fine, la lentille de la Planèze cuit vite, est riche en protéines, en sels minéraux, en fibres, et sans gluten. La combinaison gagnante pour répondre aux demandes des consommateurs, végétariens en tête. « C’est une légumineuse très polyvalente. On peut l’accommoder aussi bien froide que chaude, en entrée comme en plat. Elle révèle aussi un petit goût de châtaigne lorsqu’on la prépare en dessert. Je conseille de bien la rincer à l’eau froide. L’idéal ensuite, c’est un volume de lentilles pour deux volumes d’eau. Cela évite que les minéraux qu’elles contiennent soient dissous. Bien sûr, il ne faut pas saler à la cuisson. » Avis aux restaurateurs de Paris et d’île-de-France, la jolie blonde est référencée chez Le Delas à Rungis. Les particuliers la trouveront quant à eux chez Carrefour, sous l’estampille “Reflets de France”. Une demande d’Appellation d’Origine Contrôlée (AOC) est par ailleurs en cours, mais le dossier est en sommeil. « Nous devons étoffer la filière. L’association s’est fixé le challenge d’augmenter le nombre de producteurs pour arriver à une centaine d’hectares », explique Henri Cairon. Quelques contraintes restent aussi à lever pour remettre certaines terres en culture sur le plateau. Les pourparlers devraient ensuite reprendre avec l’Institut national des appellations d’origine (Inao). « Les demandes d’appellations sont des dossiers au long cours. Rien n’est perdu du travail effectué depuis six ans », rassure Henri Cairon.