Bières de printemps : saison de l’innovation

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Même perturbé par la crise sanitaire et l’inflation, le marché de la bière reste solide sur ses fondamentaux. Les IPA et les « sans alcool » confirment leurs percées alors que les brasseurs rivalisent d’ingéniosité pour animer le comptoir avec de nouveaux produits, parfois éphémères.

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Malgré les crises successives, le marché de la bière tient bon. Crédits : Pixabay.

La crise sanitaire n’a pas brisé l’élan du marché de la bière. Brasseurs de France qui ne dispose que des chiffres 2022 du secteur à domicile, fait état d’une baisse des volumes de 1,5%. Celle-ci ne représente pas un taux d’inquiétude puisqu’en 2021, l’année de comparaison, le secteur de la grande distribution avait en partie bénéficié d’une mise à l’arrêt du CHR. En revanche, la progression du chiffre d’affaires de 1,9% dans le secteur de la grande distribution n’est pas forcément imputable à une montée en gamme, mais peut traduire les premiers signes de l’inflation. Les chiffres du marché CHR en 2022 ne sont pas encore connus, mais selon les observateurs, ils devraient être plutôt favorables, même si l’activité n’a pas retrouvé son niveau de « Je suis plutôt optimiste et je parie sur une croissance en 2023, assure Philippe Collinet, directeur de communication de Kronenbourg, même si les bars et les restaurants devront surmonter certaines difficultés : le remboursement des PGE, le télétravail persistant de leurs clients, la pénurie de main-d’oeuvre et l’inflation. » L’industrie brassicole subit en effet lourdement ce dernier facteur. « Nous enregistrons de plein fouet un ensemble d’augmentations de coûts, reconnaît Magali Filhue, déléguée générale de Brasseurs de France. Notamment sur l’emballage, qu’il s’agisse du verre, du carton et même des étiquettes. »

Bonne nouvelle toutefois, les cours des céréales et même ceux de l’énergie seraient revenus à des niveaux plus acceptables d’après plusieurs brasseurs. La hausse des prix pourrait toutefois ralentir la progression des bières à forte valeur ajoutée, comme les crafts ou les bières de dégustation. La confiance des brasseurs trouve également son origine dans la popularité persistante de leur produit, qui ne se dément pas depuis une dizaine d’années. Le dernier baromètre Sowine vient confirmer la tendance, en montrant que la bière est devenue la boisson préférée de 56% des Français, devançant d’un point le vin. Le chiffre monte même à 65% pour les hommes. De plus, l’étude révèle que la blonde reste la bière la plus populaire, consommée par 89% des Français. Elle est suivie par la blanche et par l’ambrée. L’IPA, apparue sur le marché une douzaine d’années auparavant, se glisse déjà à la 5e place avec 46% des suffrages. « C’est une tendance qui se confirme », assure Magali Filhue. Elle estime en effet que désormais 30% des établissements franciliens dédieraient au moins un de leurs becs aux IPA.

Les deux plus gros acteurs de la bière en France, Heineken et Kronenbourg, sont bien positionnés sur ce segment, armés respectivement de deux marques américaines réputées que sont Lagunitas et Brooklyn. Chez Meteor, Véronique Debs se réjouit que « l’IPA lancée en pleine crise sanitaire, soit déjà une star du portefeuille de la brasserie ». Le « sans alcool » et le « low alcool » continuent également de voir leur consommation augmenter. « Avec des progressions de 15% à 20% durant cinq années consécutives, évoque Magali Filhue, on ne parle plus d’effet de mode mais d’une véritable tendance. » Ce marché est largement porté par Kronenbourg et sa Tourtel Twist, mais aussi par Heineken qui décline avec sa Heineken 0.0. Il faut cependant relativiser ce succès du « sans alcool », qui est plus perceptible dans le secteur de la grande distribution qu’au sein des CHR, où le contexte de consommation reste très différent. Ce marché, animé depuis une dizaine d’années par de nombreuses innovations, est aussi de plus en plus rythmé par des créations éphémères inspirées des brasseries artisanales.

Ainsi Kronenbourg vient-il de réactiver ses brassins de saison. Chez Meteor, deux recettes éphémères sont proposées chaque année sur le réseau CHR qui absorbe 60% des ventes. En outre, deux d’entre elles, la Triple (8°) et la Cerise, font leur entrée dans le catalogue permanent après avoir connu le succès en tant que « bière événementielle ». Cette année, c’est au tour de la Kalaman’Sour, un « brassin limité » chez Meteor. Ce n’est pas un hasard, le segment sour, largement exploité dans le monde des crafts, commence à gagner les brasseurs traditionnels. Il s’agit sans doute de l’engouement de demain.

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