Poiré Domfront, pétillante pépite du bocage normand

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À cheval sur l’Orne, la Manche et la Mayenne, le Domfrontais abrite un verger de poiriers de « haute tige », unique en Europe. De ces arbres parfois pluricentenaires, une vingtaine de producteurs tirent le Poiré Domfront, un cidre de poirereconnu Appellation d’origine protégée.

Poiré Domfront
La poire « Plant de Blanc », pièce maîtresse de l’élaboration du poiré. Crédit: Gerard Houdou

Le poirier « haute tige » fait la fierté du Domfrontais. Avec près de 70 000 spécimens recensés, ces géants (les plus vieux sujets dépassent 300 ans, pour 20 m de haut) constituent un verger sans équivalent en Europe. « Certains ont vu passer plusieurs générations de producteurs, confirment Frédéric et Simon Pacory, agriculteurs à Mantilly dans l’Orne. Dans les années 1990, protéger les arbres faisait partie des motivations pour le classement en Appellation. Il fallait faire prendre conscience du caractère exceptionnel de ce patrimoine. Aujourd’hui, beaucoup d’exploitants y sont attachés, et tous les jeunes qui reprennent des domaines replantent des arbres. » La démarche a aussi redonné ses lettres de noblesse au poiré, devenu en 2006 le Poiré Domfront AOP.

Pétillante et faiblement alcoolisée (4 °), cette boisson confidentielle (150 000 bouteilles produites par an) est encadrée par un cahier des charges précis. Toutes les poires doivent être issues d’arbres « haute tige », avec un minimum de 40 % de variété « Plant de blanc ». « Une quarantaine de variétés sont autorisées, et chaque ferme utilise celles de son terroir. Mais la “ Plant de blanc ” est la plus naturellement équilibrée, indique Frédéric Pacory. Ses arômes cochent toutes les cases. » Pour un produit le plus naturel possible, la prise de mousse s’opère en bouteille.

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Poiré Domfront, une alternative rafraîchissante au cidre de pommes. Crédit: Gerard Houdou

Le résultat, une boisson à la robe variant de l’or pâle au doré intense, parcourue de fines bulles. Caractérisée par une dominante de fruits et de fleurs, la bouche est ponctuée par une pointe d’astringence et d’acidité plus ou moins tranchée selon les cuvées. « Il y a un équilibre important à trouver avec les sucres résiduels. La poire est un fruit qui gagne à être soutenu par de la rondeur. » Pour enrichir la palette de leurs cuvées, le père et le fils récoltent leurs poires à différents stades. « Les fruits tombent pendant un mois. Les premières poires n’ont pas les mêmes qualités que les toutes dernières. Les cuvées précoces sont plus acidulées avec des notes d’agrumes, les tardives plutôt mielleuses, tirant vers le fruit mûr. »

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Producteurs de poiré, Frédéric et Simon Pacory (père et fils) exploitent la ferme des Grimaux à Mantilly (Orne). Crédit: Pacory

Depuis quelques années, certains producteurs s’essaient aussi avec succès à la technique champenoise du dégorgement, qui permet de clarifier le poiré. « Sans dépôt, celui-ci vieillit mieux. Il peut se garder cinq ans. On obtient alors un produit plus tannique, avec une oxydation maîtrisée très intéressante. » Simon et Frédéric Pacory écoulent leur poiré à la ferme ainsi que chez certains cavistes et magasins de produits régionaux.

« Nous sommes très présents sur la Normandie et le Nord-Bretagne, mais on trouve notre produit partout en France via l’enseigne Cavavin. Nous exportons même dans une dizaine de pays. À Paris, nous avons la chance de travailler avec Les Années Vin, rue Censier [5e], qui nous a fait connaître auprès de grands chefs, notamment Jean-François Piège. Néanmoins, nous aimons bien que nos bouteilles soient accessibles à tous et nous fournissons plusieurs petites crêperies. » Produit rare mais pas si cher, le prix d’un poiré Domfront n’excède pas celui d’un cidre sous appellation, soit entre 7 et 10 €.

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