Hervé Jourdain et Daniel Piechurski, les tontons flingueurs remettent le couvert

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Deux retraités, Hervé Jourdain et Daniel Piechurski, ont repris du service pour lancer une brasserie parisienne dans un ancien restaurant de chaîne. Forts de leur longue expérience, ils estiment que ce concept bénéficie encore d’un avenir prometteur à condition de respecter les fondamentaux et de veiller à bien adapter l’offre au contexte.

Hervé Jourdain et Daniel Piechurski
Hervé Jourdain et Daniel Piechurski. Crédit Jean-Michel Déhais.

Hervé Jourdain et Daniel Piechurski ont tous deux abandonné une retraite douillette pour se replonger dans la mêlée en ouvrant à la fin de décembre 2023, le Quartier Lorette (Paris 9e). Hervé Jourdain avait placé en gérance libre le Grand Comptoir d’Anvers (Paris 9e), une brasserie qu’il a créée en 2014, en lieu et place de l’ancienne table étoilée des frères Conticini. Mais cet ancien agent immobilier de Century 21 Horeca gardait un œil sur les fonds de commerce du quartier. Lorsqu’il a appris que le Bistro Régent était à vendre, une idée a commencé à faire son chemin. Cette adresse bien visible, située face à une sortie du métro Notre-Dame-de-Lorette, dans un quartier où cohabitent touristes et clientèle d’affaires, méritait mieux qu’un restaurant de chaîne.

Il n’a pas souhaité se lancer seul dans l’aventure et a préféré activer l’option « Appel à un ami ». C’est ainsi que, un beau jour de 2022, Daniel Piechurski a entendu sonner le téléphone dans sa résidence de Saint-Calais (Sarthe), où il habite depuis 2018. Lorsque le restaurateur avait vendu le Pub 27 (Paris 8e), il avait alors fermement décidé de tirer un trait définitif sur sa carrière dans les brasseries parisiennes. Et avait aussi juré depuis des années qu’il ne s’associerait jamais… Il faut donc croire qu’Hervé Jourdain a trouvé les mots pour le convaincre de tenter cette aventure en duo. Les deux hommes s’étaient connus, il y a une dizaine d’années, autour du square d’Anvers. Une solide amitié, qui déplace les montagnes plus sûrement que la foi, est ainsi née.

La première rencontre du métier

Âgé de 68 ans, Daniel Piechurski est donc revenu au début de l’hiver dans la capitale pour relancer le Quartier Lorette avec son associé. Dans cette brasserie, ils ont repris un rythme de fonctionnement d’autrefois, à savoir des journées de 16 heures à raison de 7 j/7. Originaire de la Sarthe, il est né dans une famille de métayers. À 15 ans, il monte à Paris. Sa sœur aînée était parvenue à lui trouver un poste d’apprenti dans les ateliers Rolls-Royce : une prestigieuse carrière de mécanicien s’ouvrait devant lui. « Malheureusement, cette année-là, la scolarité est devenue obligatoire jusqu’à 16 ans, se souvient-il. Rolls-Royce ne pouvait plus m’accueillir dans ses équipes. Heureusement, ma sœur m’a embauché pour faire la plonge dans le bar-restaurant qu’elle gérait près de la Maison de la radio (Paris, 16e). Je ne regrette rien, la restauration est un métier de passion où je me suis pleinement réalisé. »

Daniel Piechurski a ensuite suivi sa sœur lorsqu’elle a fait l’acquisition d’une brasserie à Chatillon-sous-Bagneux (Hauts-de-Seine). « Un jour, raconte-t-il, je me suis aperçu qu’un serveur du Paris-Versailles gagnait en une journée le salaire que je touchais en un mois. » C’est ainsi qu’il a entamé une carrière de garçon de café parisien, avant d’accepter à 32 ans la gérance libre du Paris, place Cambronne, dans le 15e. Depuis lors, il n’a cessé d’alterner avec bonheur, rachats de fonds de commerce et gérances libres.

Un goût d’inachevé

Daniel Piechurski a terminé sa carrière en tant que propriétaire du Pub 27 (Paris 8e), à côté de la gare Saint Lazare, qu’il a revendu au bout de deux ans. « L’établissement bénéficiait d’une bonne fréquentation, mais il était trop impersonnel, explique-t-il. Je ne m’y suis jamais plu, car je n’ai pu y insuffler une ambiance et des interactions comme je l’ai fait dans chacune de mes affaires. C’est sans doute la raison pour laquelle je ressentais quelque chose d’inachevé dans mon parcours, et que j’ai relevé le défi du Quartier Lorette. »

Côté expérience, Hervé Jourdain n’a rien à envier à son acolyte. Ce pur Parisien, né dans une famille de boulangers, a brièvement débuté dans ce métier avant de suivre ses parents à Caen (Calvados), qui y effectuaient une reconversion dans la restauration à la brasserie La Coupole. « Nous avions la nostalgie de Paris, raconte-t-il. Nous sommes vite revenus dans la capitale pour exploiter des tabacs, d’abord à Ménilmontant, puis rue de la Convention ». Il intègre ensuite l’équipe commerciale de Century 21 Horeca, avant de créer le Grand comptoir d’Anvers.

Convivialité et accessibilité sont les maîtres mots

Désormais installés rue de Châteaudun, Hervé Jourdain et Daniel Piechurski ont vite reniflé le quartier et ajusté la partition de cette nouvelle brasserie, qui offre 80 places assises. C’est un spécialiste, Christopher Matignon, qui a signé le décor et donné de la visibilité à l’établissement et à son vaste comptoir de marbre. « Nous privilégions la convivialité, l’accessibilité », précise Hervé Jourdain. Conscients des préoccupations d’une clientèle plus regardante à la dépense, ils ont établi une carte avec des « prix contenus ». Le ticket moyen n’excède pas 25€. La côte de cochon et le burger Sexy cheese figurent parmi les meilleures ventes. Pour les achats, les deux hommes font confiance à Rungis, avec en parallèle un approvisionnement en direct du terroir d’Aubrac via la Table de Solange, à Cassagnes-Bégonhès (Aveyron).

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