Sébastien Boyer : les coudées franches
- Temps de lecture : 6 min
Issu d’une famille de restaurateurs aveyronnais bien connus de la place parisienne, Sébastien Boyer préside aux destinées de la brasserie Les Millésimes depuis 2016. Après une longue expérience au sein de maisons étoilées, le chef pratique aujourd’hui une cuisine qui lui ressemble, à mi-chemin entre la bistronomie et la gastronomie.
Nos lecteurs se souviennent certainement de Véronique et Serge Boyer. Originaire de l’est de la France, Véronique partage sa vie avec l’Aveyronnais Serge Boyer. Tous deux, après avoir exploité avec succès Le Grand Café, à Courbevoie (Hauts-de-Seine), ont racheté La Galliera, une affaire à l’emplacement exceptionnel, située à quelques pas du Musée Galliera (Paris, 16e). Leur fils, Sébastien, passionné de gastronomie et membre de l’Association française des maîtres restaurateurs, roule quant à lui sa bosse dans le 17e arrondissement de Paris, aux Millésimes. Cet établissement créé dans les années 1970 a trouvé un second souffle grâce à ses talents de cuisinier. Sébastien Boyer, associé à son père à pourcentage égal des parts, a les coudées franches pour animer cette belle affaire de quartier, même si Serge Boyer veille sur les cordons de la bourse. Il faut dire que le parcours du jeune Aveyronnais de 32 ans force le respect.
Formé chez Yannick Alléno
Après un CAP Cuisine, ce natif de Conques (Aveyron) a rejoint Jacques Le Divellec, alors détenteur de deux étoiles au Guide rouge. Mais c’est assurément son passage dans les cuisines du Meurice qui a aiguisé le savoir-faire de Sébastien Boyer. À partir de 2006, l’Aveyronnais a en effet la chance de faire ses classes aux côtés de l’illustre Yannick Alléno. Il a ainsi débuté en bas de l’échelle, en qualité de deuxième commis, où le travail consistait « à laver les salades et nettoyer le poste du chef de partie ».
« Mon père avait une opportunité, c'est grâce à lui que je suis là »
Sébastien Boyer sortira premier chef de partie de cette aventure. « Il n’était pas indispensable pour moi de travailler dans des maisons étoilées, mais je voulais apprendre. Je souhaitais bénéficier de la “transmission” : il s’agit de très belles maisons où j’ai pu expérimenter ma technique et la développer aux côtés des plus grands », dévoile-t-il. Durant cette période, Sébastien Boyer a également eu l’occasion d’œuvrer un an chez Kei Kobayashi, mais aussi chez René et Maxime Meilleur en tant que sous-chef. De Yannick Alléno, le chef du restaurant Les Millésimes conserve des souvenirs admiratifs : « C’est grâce à lui que je travaille aujourd’hui des bêtes entières. »
La technique au service de la viande
Rendez-vous compte, au beau milieu du boulevard Courcelles, et plus précisément au 110 de cette même artère, il n’est pas rare de voir des carcasses de cerfs, de cochons ou encore de chevreuils entrer dans l’établissement. Sébastien Boyer prend un malin plaisir à découper ces bêtes, épaulé par cinq cuisiniers.
Le succès de Millésimes, qui affiche un ticket moyen de 32 € le midi et de 45 € le soir, est dû à l’alliance heureuse de Serge et Sébastien Boyer. « Mon père avait une opportunité, c’est grâce à lui que je suis là », résume le jeune chef.
La course aux étoiles n’est pas de mise car, d’emblée, l’Aveyronnais a souhaité développer « une cuisine bistrot avec des techniques gastronomiques », le tout assorti de prix doux. Ainsi, les tarifications ne dépassent pas les 28 € pour les plats qui nécessitent le plus de travail. En moyenne, les plats du jour n’excèdent pas les 19,50 €.
La tourte, spécialité de Sébastien Boyer
Parmi les diverses propositions culinaires actuelles, on peut citer le carpaccio de Saint-Jacques, salicornes et citrons confits ou encore la tourte, dont le chef a fait sa spécialité. Du côté des fournisseurs, outre le Marché de Rungis, Sébastien Boyer a ses habitudes au marché de Iéna et tisse des relations étroites avec ses producteurs. « Nous avons la chance d’acheter directement notre poisson à Boulogne-sur-Mer, tandis que nos huîtres proviennent de Cancale. Concernant les volailles, nous travaillons avec la maison Culoiseau, dans le Perche. Enfin, grâce à mon père, nous sourçons aussi des produits aveyronnais comme la viande de Salers », égrène le maître restaurateur.
Les Millésimes accueille essentiellement une clientèle composée d’ouvriers ou de cadres, mais Sébastien Boyer déplore l’absence de touristes en cette période où la fréquentation des établissements chute de nouveau : « D’habitude, nous sommes complets tous les midis, mais depuis les annonces gouvernementales, c’est la catastrophe. »
L’emploi, un problème d’actualité
Aujourd’hui, le restaurateur emploie 10 salariés et, comme beaucoup de patrons, a souffert de la désaffection des candidats aux métiers de salle ; un phénomène amplifié par la crise sanitaire. « Nous avons perdu un directeur de salle et une barman », déplore-t-il.
Hors Covid-19, Les Millésimes assure une moyenne de 120 couverts par jour, essentiellement le midi avec 90 couverts le midi. Sébastien Boyer ambitionne aujourd’hui de dynamiser l’activité le soir. Cette dernière a en effet subi un coup d’arrêt depuis la crise des gilets jaunes. En attendant des jours meilleurs en termes de fréquentation, le jeune chef fait ce qu’il sait faire le mieux : donner du plaisir à ses clients. À l’avenir, Sébastien Boyer souhaite lancer un restaurant ou un bistrot dans lequel il pourrait accueillir une clientèle aisée.