Stéphane Roesch, le châtelain de Bellerive

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Concessionnaire depuis dix ans du Château du Bost, à Bellerive-sur-Allier (Allier), Stéphane Roesch a fait de ce nouvel hôtel-restaurant, créé par la municipalité, une étape incontournable de la région de Vichy. Il y démontre que la gastronomie peut s’inscrire dans le développement durable sans renoncer à l’hédonisme.

Stephane Roesch
Stephane Roesch est concessionnaire depuis dix ans du Château du Bost, à Bellerive-sur-Allier (Allier). Crédit DR.

Moins réputée que sa voisine Vichy, située de l’autre côté de l’Allier, Bellerive ne manque pourtant pas d’atouts avec son golf, ses hôtels, ses installations sportives. Elle offre notamment des promenades très agréables sur les bords de la rivière, d’où son nom choisi en 1903 pour remplacer l’ancien toponyme de Vesse, peu vendeur.

Bellerive abrite aussi le château du Bost, une superbe demeure entourée d’eau et arborant deux fières tourelles. Situé dans un parc communal, les Jardins du Bost, ce lieu historique a été édifié au XIIIe siècle, avant d’être réaménagé au XIXe siècle. Dans les années 1950, la commune en devint propriétaire et transforma les Jardins en maison de retraite, avant de déménager les pensionnaires dans un nouveau bâtiment. Bien décidée à tirer parti de ce patrimoine, la municipalité a adapté le lieu en hôtel-restaurant intégrant huit chambres. Après avoir achevé les travaux en 2013, elle a confié les clés de l’établissement à Stéphane Roesch, sur la base d’un bail emphytéotique de 30 ans. Dix ans plus tard, le chef est toujours à la barre. Il est parvenu à faire de cette adresse une des tables les plus courues du département. Le chiffre d’affaires mensuel varie de 85.000 à 140.000€.

Compte tenu de sa situation, le château connaît une affluence plus forte entre les mois de mai et septembre, période au cours de laquelle les effectifs passent de 15 à 20 personnes. Épicurien, Stéphane Roesch pratique une cuisine généreuse, simple et lisible, faisant la part belle aux produits locaux. Il regrette d’ailleurs que, « aujourd’hui, trop de cuisiniers créent des plats trop sophistiqués en reléguant au second plan la fraîcheur des produits ». Le chef a aussi pris garde de rester sage sur les prix, avec un ticket moyen qui n’excède pas 45€ au déjeuner et 80€ au dîner. Ce cuisinier, aujourd’hui âgé de 53 ans, est né à Vichy (Allier). Ses parents exploitaient une pâtisserie non loin de là, à Chantelle. Adolescent, Stéphane Roesch était peu attiré par le métier de pâtissier qu’il jugeait rébarbatif, privilégiant la cuisine : « Il faut peser, être précis. Je préfère la spontanéité de la cuisine. J’aime faire mon marché le matin et commencer alors à imaginer les recettes. »

« Je préfère la spontanéité de la cuisine. »
Stéphane Roesch,

Piètre élève et multirécidiviste de la turbulence, il n’était pas le bienvenu dans les écoles hôtelières locales. Finalement, c’est à Paray-le-Monial (Saône-et-Loire) qu’il a été accepté pour apprendre le métier de cuisinier. Il s’est d’ailleurs vite révélé dans cette école, en intégrant dès la sortie le circuit des tables étoilées et un premier poste au Pavillon Sévigné à Vichy. Pour rejoindre son épouse, Céline, il s’exile ensuite à Lyon (Rhône) pour rallier successivement les brigades du Méridien Part Dieu et du Sofitel Bellecour. Au début des années 2000, devenus parents d’une petite fille, Céline et Stéphane Roesch ont choisi la qualité de vie de leur ville natale, Vichy.

Stéphane a tenté de créer un restaurant, mais toutes les banques lui ont tourné le dos. Il s’est consolé en obtenant un poste de chef au Château de Maulmont à Saint-Priest-Bramefant (Puy-de-Dôme). En 2005, le Guide Michelin lui décerne une étoile. Le chef n’en profitera qu’un an, puisque l’année suivante, il rend son tablier à la suite d’un désaccord avec les propriétaires. Ce chef au caractère bien trempé décide alors de voler de ses propres ailes. « Auréolé de mon étoile, toutes les banques ont accepté de me suivre », raconte le cuisinier.

Un crédit de 120.000€ lui permet ainsi de mettre la main, en 2006, sur l’Auberge de Billy en compagnie d’un associé. Cette somme lui permet de racheter le fonds et de rénover le petit restaurant. « C’était une petite structure qui ne me permettait pas de me lancer dans la reconquête de l’étoile Michelin », indique-t-il. Pourtant, dès la première année, Stéphane Roesch obtient un Bib gourmand et décuple le CA réalisé par son prédécesseur. Ces deux succès lui ont permis en 2013 de gagner la confiance de Jean-Michel Guerre, le maire de Bellerive, qui lui accorde la concession du château du Bost. Dans ce nouveau lieu, il dispose d’une structure capable de gagner l’étoile Michelin. Mais celle-ci n’est jamais venue. Stéphane s’en console. Il est très satisfait d’être également hôtelier, une activité qui selon lui « amène de bien meilleures marges que la restauration ». Avec le temps, il se prend davantage à rêver aux étoiles vertes du Michelin. Il a de fait orienté son entreprise vers le développement durable. Sa cuisine, végétale, utilise des produits issus de maraîchers installés à 10km à la ronde. Les viandes sont achetées localement, le restaurant est équipé de bacs à compost et d’une pompe à chaleur.

Selon le restaurateur, ces efforts n’ont rien à voir avec du greenwashing. Il s’agit simplement de la prise de conscience d’un pêcheur du dimanche, qui constate avec effarement la pollution croissante des rivières et des mers.

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