L’héritage retrouvé du soumaintrain, fromage IGP

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Alors que des écrits attestent déjà de l’existence du soumaintrain au Moyen Âge, la fabrication de ce fromage typiquement bourguignon s’était arrêtée à la fin des années 1970… Jusqu’à ce qu’une poignée de passionnés le fasse renaître.

Soumaintrain IGP
La palette aromatique du soumaintrain IGP balance entre arômes végétaux et nuances animales. Crédits : DR

Pascal Le Roux se souvient du jour où tout a (re-)commencé. À l’époque, le jeune homme accompagne son père dans sa tournée. Fromager affineur passionné, ce dernier vient d’apprendre qu’un petit noyau de producteurs laitiers, les Gillot et les Leclère, s’est remis à fabriquer du soumaintrain, un fromage tombé dans l’oubli depuis près d’une décennie. Il s’agit d’un fromage à pâte molle et à croûte lavée, à prédominance lactique, exclusivement fabriqué avec du lait de vache entier. « Mon papa est tout de suite allé les voir pour leur en acheter, raconte celui qui perpétue aujourd’hui l’activité familiale à Migennes, dans l’Yonne. Et puis un jour, il en a monté chez son copain François qui travaillait chez Marticou, à Rungis. François lui en a pris quelques caisses, et puis de plus en plus. Ça a commencé comme ça. » Au fil des années, la demande s’accroît. D’autres producteurs se lancent et les laitiers locaux appuient le redémarrage de la filière.

Petit à petit, le soumaintrain retrouve sa place, méritée, sur le plateau de fromages de son terroir, entre époisse, chaource et brillatsavarin. « Il a ensuite fallu créer un cahier des charges, pour que notre fromage ne soit pas fabriqué à l’autre bout de la France », détaille l’affineur. S’ensuit un périple de plus de 25 ans, couronné en 2016 par l’obtention de l’indication géographique protégée (IGP). « Arriver à faire revivre un fromage dont on retrouve des traces au Moyen Âge, dans les écrits de l’abbaye de Pontigny, et qui avait quasiment disparu, on se dit qu’on a, nous aussi, marqué un peu l’histoire, se félicite le fromager. Pour les personnes qui ont contribué à sa renaissance, c’est une fierté. »

À cheval sur les départements de l’Yonne, de la Côte-d’Or et de l’Aube, l’aire d’appellation s’étend aux confins de la Bourgogne et de la Champagne. Une région de prairies sillonnées de vallées humides, située à un jet de pierre du vignoble de Chablis… et de ses vins, auxquels le soumaintrain est naturellement associé. La petite mais vaillante filière soumaintrain IGP compte aujourd’hui vingt producteurs, un affineur, trois fabricants laitiers et deux collecteurs. « Avec sa jolie croûte légèrement ridée et humide, son cœur crayeux et ses arômes qui s’affirment avec le temps, c’est le mariage parfait », confirme Pascal Le Roux.

Pour célébrer son retour, le soumaintrain peut compter sur des ambassadeurs de renom tels que Jean Michel et Catherine Lorain, respectivement aux manettes de la Côte Saint-Jacques et du Rive Gauche à Joigny, ou encore Ludovic Bisot, fromager MOF à Rambouillet. Pas exactement des inconnus pour Pascal Le Roux : « Les Lorain sont des voisins et Ludovic a ses racines ici : sa grand-mère était la première vendeuse de mes parents ! sourit-il. Le soumaintrain est une petite filière dynamique où tout le monde se connaît. Et où on a tous besoin les uns des autres. »

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