Comment étaler le remboursement de mon PGE sur 10 ans ? 

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Lors d’une conférence de presse fin août, la ministre Olivia Grégoire a annoncé des possibilités de rééchelonnements des PGE dans certains cas spécifiques. Nous répondons à vos questions avec Bruno Guillier, avocat spécialisé.

Il est possible d'obtenir un échelonnement du remboursement de son PGE.
Il est possible d'obtenir un échelonnement du remboursement de son PGE. Image d'illustration, crédits : Pixabay.

Bonjour,

Dans votre question, vous nous demandiez quels sont les critères précis pour obtenir un rééchelonnement de votre PGE. «Les PGE peuvent faire l’objet de discussions et de rééchelonnements dans des cas spécifiques», a annoncé Olivia Grégoire, à l’occasion de sa première conférence de presse en tant que ministre déléguée chargée des PME, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme le 29 août dernier.

Pour étaler ce remboursement, la ministre invite hôteliers et restaurateurs à se rapprocher de la Médiation du crédit, adossée à la Banque de France. Cette annonce a pu surprendre les restaurateurs qui l’auront entendue. En effet, d’après une enquête de l’Umih et de la CPME, «54 % des chefs d’entreprise affirment ne pas connaître la possibilité d’avoir recours au médiateur du crédit pour éventuellement allonger la durée du crédit».

Toutefois, avant d’entreprendre toute démarche avec le médiateur du crédit, Bruno Guillier, avocat en droit public au cabinet NovLaw, spécialiste du droit des CHR, conseille de s’assurer de la bonne santé financière de son entreprise. Pour cela, il suggère «d’engager des concertations avec son comptable, de mettre ses comptes en ordre, de construire un business plan solide et surtout d’entamer une restructuration de son activité ». Un autre levier d’action directe serait de «revoir ses portions ou d’augmenter les prix des plats à la carte», toujours dans l’optique de maximiser les marges. L’objectif : maximiser les chances de voir son dossier reçu par la Médiation du crédit.

Monter son dossier, deux cas de figure

Pour commencer sa médiation du crédit, il faut monter un dossier. Les conditions diffèrent selon la valeur du prêt garanti par l’État. Pour ceux ayant souscrit un PGE de moins de 50.000 euros, il faut obligatoirement joindre un justificatif bancaire, attestant que la banque a été contactée et qu’elle oriente son client vers le médiateur du crédit. La banque est donc la seule habilitée à diriger son client vers cette médiation.

Autre document indispensable – toujours dans le cas où le PGE ne dépasse pas 50.000 euros – : l’attestation d’expert comptable prouvant que l’entreprise n’est pas en cessation de paiement. De cette manière, le restaurateur peut prouver qu’il n’est tout simplement pas en mesure d’honorer ses échéances de remboursement mais que son entreprise est pérenne et possède tout de même des perspectives financières et commerciales. Le dossier doit ensuite être déposé sur la plateforme de la Médiation du crédit en vue d’une restructuration.

Si le PGE dépasse le montant de 50.000 euros, l’expert-comptable doit également établir une attestation. Mais dans ce cas de figure, le chef d’entreprise ne se tourne pas vers sa banque, mais contacte directement le conseiller régional à la sortie de crise. Ce dernier, affilié à la Médiation du crédit, aura alors plusieurs options : faire appel au médiateur du crédit, trouver une solution amiable/collective ou diriger l’entreprise vers un autre dispositif du plan de sortie de crise.

Dans l’unique cas où le PGE dépasse la somme de 50.000 euros, le Conseiller régional à la sortie de crise peut directement faire appel au Tribunal de commerce pour une restructuration amiable ou judiciaire.

Mon dossier passe la première étape. Et ensuite ? 

Que mon PGE soit supérieur ou inférieur à 50.000 €, et suite au dépôt de mon dossier, le médiateur du crédit vérifiera l’éligibilité de l’entreprise et proposera un accord équilibré aux banques. Cet accord peut entraîner un allongement de la durée de remboursement du PGE au-delà des six ans et éventuellement des autres crédits bancaires, entraînant donc un étalement sur huit ou dix ans dans certains cas. Cet étalement permettra aux entreprises de conserver la garantie de l’État. En revanche, comme prévu dans le cadre initial du programme PGE, si l’entreprise se révélait incapable de rembourser son prêt, elle perdrait cet avantage. En effet, en cas de défaut de paiement, l’État ne serait plus considéré comme garant, et des saisies sur les biens du restaurant ou les biens personnels du chef d’entreprise peuvent être envisagées – suivant le statut juridique de l’entreprise bien-entendu -.

L’État « n’a aucun intérêt à soutenir les entreprises sans perspective d’avenir »

D’après Bruno Guillier, les conditions d’acceptation du dossier vont dépendre «de la pérennité de l’entreprise». Il assure que l’État «n’a aucun intérêt à soutenir les entreprises sans perspective d’avenir. On retourne dans une logique comptable et financière». Pour cette raison, l’avocat conseille de très vite entrer en contact avec sa banque et son comptable afin «de dresser un bon bilan comptable et un business plan d’après-crise pour avoir une idée de son développement sur les prochaines années ».
Ainsi, la Médiation du crédit pourra être saisie rapidement. Bruno Guillier pense que cette médiation du crédit permettrait aux professionnels de «gagner deux années supplémentaires» dans le remboursement de leurs PGE. Selon lui, «ce maintien de la garantie de l’État pour deux années supplémentaires paraît probable, mais un prolongement sur dix ans sera uniquement accessible à quelques élus».

L’intervenant :

Bruno Guillier, Avocat.
Bruno Guillier, Avocat.

Bruno Guillier est avocat spécialisé en droit public, notamment en droit de la fonction publique et en droit administratif général, ainsi qu’en matière de réglementation des activités par la puissance publique. Dans ce cadre, il a développé une expertise en ce qui concerne les professions réglementées. Diplômé en droit et en économie au sein de l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense et de l’Institut de droit public des affaires, il est avocat au barreau de Paris depuis 2015.

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