Bistrot Origine Corrèze : label de l’engagement de la garantie locale
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La marque Bistrot Origine Corrèze affiche les établissements qui font la part belle aux produits, aux recettes et à la culture du département. Appuyée par le conseil départemental, cette démarche conforte la qualité de l’offre touristique et promeut les produits de l’agriculture locale.

L’image du terroir représente un puissant levier commercial en matière de restauration touristique. Mais l’authenticité laisse parfois à désirer dans certains établissements. Des ersatz de recettes locales surgelées ou en conserve suffisent alors à faire illusion. Il arrive aussi que les produits proposés dans des restaurants très typiques n’aient rien de local et affichent un bilan carbone déplorable. Ces démarches ne sont pas forcément répréhensibles aux yeux de la loi. Il suffit de cultiver adroitement une certaine ambiguïté pour échapper aux foudres des services des fraudes. Cependant, ces grosses ficelles qui font fonctionner le tiroir-caisse nuisent à l’image touristique régionale. En effet, la déception de la clientèle rejaillit à la fois sur l’agriculture locale et sur la réputation gastronomique.
La Corrèze en chiffres
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7 millions de nuitées touristiques enregistrées en 2023 dans les hébergements commerciaux et résidences secondaires (+ 1,3% par rapport à 2022).
Toutefois, le département de la Corrèze semble avoir trouvé la parade en créant la marque Bistrots Origine Corrèze, qui vient certifier les démarches vertueuses. Il ne s’agit pas ici de dénoncer les pratiques douteuses, mais de mettre en place une communication orientant les consommateurs vers des établissements irréprochables. « La marque Origine Corrèze a fêté ses cinq ans au mois de juin, rappelle Thierry Rouhaud, responsable promotion du territoire au conseil départemental de la Corrèze. Elle a été initiée avec l’appui des trois chambres consulaires et des syndicats professionnels. Aujourd’hui, 305 acteurs économiques du département bénéficient de cette marque pour leurs produits. »
Contrôle rigoureux
Cette marque n’est pas distribuée à la légère. Ainsi, la Brasserie Gaillarde qui fabrique pourtant ses bières à Brive, n’a pu apposer la griffe « Origine Corrèze » sur toutes ses bouteilles. « Même si l’eau, le principal ingrédient du produit, est bien corrézienne, ni notre houblon ni notre malt ne proviennent du département », regrette Elisabeth Moinet, dirigeante de la structure. Néanmoins, la Brasserie Gaillarde s’est consolée en obtenant le droit de faire figurer le logo sur sa Beenouzz, une bière au miel dont l’origine corrézienne est attestée.
Le conseil départemental a ensuite étendu cette distinction aux restaurants locaux. Aujourd’hui, 14 établissements bénéficient de la déclinaison « Bistrot Origine Corrèze ». La sélection reste très rigoureuse. Les restaurants qui souhaitent obtenir ce label doivent prouver l’authenticité de leur démarche. Un comité d’agrément se réunit tous les trois mois. Les vérifications des impétrants se font via des visites et des contrôles de factures. L’attribution de la marque est régulièrement remise en question. Certains établissements ont déjà été radiés parce que leur objectif a varié au fil des années. D’autres sont contraints de simplifier leur offre. « C’est la raison pour laquelle nous avons passé de un à trois ans l’antériorité minimum des restaurants candidats à la marque Bistrot Origine Corrèze », souligne Thierry Rouhaud.
Les détenteurs de la marque bénéficient d’une licence d’utilisation, mais aussi d’une signalétique avec des plaques de vitrophanie. En outre, ils disposent d’une page de communication sur un site dédié. Enfin, ils peuvent prétendre à des aides financières pour l’établissement d’animations. « Nous exigeons des restaurants la mise en place de quatre animations annuelles (concerts ou expositions), dont deux faisant intervenir des artistes locaux », confirme Thierry Rouhaud.
Mettre en avant le tourisme culturel
Ce dispositif est destiné à stimuler le volet du tourisme culturel. Les détenteurs de la marque sont aussi priés de faire la part belle aux jus de fruits, bières et vins locaux, mais sans exclusive. Si les contrôles sont rigoureux, une certaine souplesse est tolérée, comme l’indique Thierry Rouhaud : « Nous sélectionnons certains établissements qui se distinguent par une mise en avant sincère des produits locaux, dans des recettes créatives qui ne sont pas forcément locales. Mais la marque peut aussi appuyer des restaurants qui proposent des recettes classiques corréziennes. » Des considérations culturelles locales peuvent jouer.
Ainsi, Au Triolet-Café, à Soursac, bénéficie de ce logo. Son offre de restauration est certes simple, mais constituée de produits locaux. Et surtout, ce lieu représente le temple de l’accordéon, instrument fétiche de la Corrèze. Le département abrite Maugein, le dernier facteur français de cet instrument. Et chaque été, Tulle vibre au son du festival dédié, Les Nuits de nacre. Créé dans les 1950 par Altero Betti, un virtuose du piano à bretelles, cette guinguette installée sur les bords de la Dordogne a été rouverte en 2021 par Mélodie, la petite-fille de l’accordéoniste, quelques mois après la mort de son grand-père à l’âge de 101 ans.
Des vins corréziens Chez Paulo
Paul Celerier s’honore d’être issu d’une des plus anciennes familles de restaurateurs de Brive. Son arrière-grand-père a créé en 1907 un café, avenue de Paris. Après avoir exercé comme sommelier chez Michel Guérard à Eugénie-les-Bains, Paul est revenu il y a dix ans dans sa ville natale pour créer un bar à vins, Chez Paulo. Au fil des années, parallèlement à ses 350 références de vins (dont 30 au verre), il a développé une offre de restauration en misant sur une cuisine simple mais articulée autour de produits locaux de très grande qualité. Son bœuf, son veau et son porc proviennent des producteurs des environs qu’il connaît personnellement. « Ils viennent même manger chez moi pour montrer la mise en œuvre de leurs spécialités à leurs clients », assure Paul Celerier.

Il valorise aussi la bière locale de La Banou et propose un panorama des rares vins du département. Ce profil lui a, bien sûr, valu de figurer parmi les porteurs de la marque Bistrot Origine Corrèze. « Nous avons la chance d’avoir des produits d’exception à côté de chez nous. Une entreprise liquoriste comme Denoix, labellisée EPV, est à 50 m d’ici, se réjouit le restaurateur. C’est une opportunité de mettre en avant ces produits. Même si la qualité se paie un peu plus cher, le client ne rechigne pas à payer son assiette 2€ de plus, car il est satisfait. » Il estime d’ailleurs que la marque a un effet bénéfique sur la fréquentation : « Elle rassure la clientèle locale en fonctionnant comme une garantie. Elle attire aussi l’attention des touristes. Je vends une quantité incroyable de tête de veau, même au cœur de l’été. »
Le Local, résolument locavore
C’est à l’issue d’un déjeuner au Local, à Tulle, que des membres du comité d’agrément de la marque ont proposé à Régis Raffy d’intégrer les « Bistrots Origine Corrèze ». Pourtant, pas de mique ou de farcidure à sa carte. Les recettes du Local, comme la bavette de veau chimichurri et gratin dauphinois, ne semblent pas inspirées du terroir corrézien. Et pourtant, comme l’assure le chef propriétaire Serge Raffy, « 80% des produits que j’utilise proviennent de moins de 20 km à la ronde et ce sont les photos de mes producteurs qui assurent le décor du restaurant ».

Il y a deux ans, ce chef de cuisine est revenu dans sa ville natale pour ouvrir son propre restaurant. « J’ai passé huit ans à ouvrir des restaurants pour un investisseur, rappelle–t-il. À l’âge de 45 ans, j’ai décidé de travailler pour moi et de me poser avec mes trois enfants. » Ce solide professionnel a travaillé dans de nombreux restaurants gastronomiques, dont le Plaza Athénée à Paris. Avant de s’installer à Tulle, il dirigeait un restaurant, rue Jean-Goujon (Paris 8e). De retour en Corrèze, il a décidé de mettre son talent de cuisinier au service des produits corréziens. « Le matin en arrivant au Local, je n’ai aucune idée de ce que je vais cuisiner, indique-t-il. Je compose ma carte en regardant les produits que mes fournisseurs ont déposés devant le restaurant. »