Harcèlements : anticiper, agir et guérir 

  • Temps de lecture : 6 min

Les acteurs du CHR sont parfois confrontés à des situations délicates: comment agir quand un salarié en harcèle un autre ? Où se situent les frontières entre vie privée et vie professionnelle ? Quelles réponses légales y apporter ? Pour la première fois, le GHR a abordé toutes ces questions en y apportant des solutions. Instructif et salutaire.

(visuel réalisé par l'IA)

Discrimination, harcèlement, sexisme, agression verbale, physique ou sexuelle… tous les secteurs économiques, toutes les entreprises, sont peu ou prou touchés par ces fléaux. Il est universel et l’univers du CHR ne fait pas figure d’exception dans ce domaine. Pour la première fois, le GHR a décidé d’aborder sans tabou toutes ces questions autour d’un webinaire intitulé « Sea, Sex & Work », parodiant ainsi une célèbre chanson de Serge Gainsbourg. Une initiative, du reste, qu’on ne peut que saluer. Webinaire réalisé en partenariat avec Klésia et Malakoff Humanis.

Procurer des outils efficaces

Quelle frontière entre vie privée et vie professionnelle ? Sexisme, harcèlement moral ou sexuel, agressions verbales ou physiques, comment les prévenir, comment les résoudre ? L’objectif du GHR n’est pas simplement de pointer du doigt ces problèmes et d’en rester là. Au contraire, cette démarche a pour vocation de procurer des outils efficaces aux chefs d’entreprises. Car, n’oublions pas que devant la loi, ils sont responsables. Ils se doivent de respecter les statuts et la législation en vigueur.

Ce premier webinaire n'a pas été facile à élaborer
Catherine de Bruyne, directrice de la négociation collective et de la protection sociale au sein du GHR

Si un salarié à un problème…

« Nous avons bien conscience de ces sujets, d’où notre initiative », remarque Catherine de Bruyne, directrice de la négociation collective et de la protection sociale au sein du GHR.

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« Face à ces questions, notre rôle est pédagogique. Il faut donc pouvoir les aborder sans pour autant tomber dans la caricature », explique Catherine de Bruyne. ©DR

Et d’ajouter : « Ce premier webinaire n’a pas été facile à élaborer. Cela dit, nos adhérents l’ont bien accueillie. Notre volonté est de montrer le meilleur de la profession. Un fait est certain : ce qui était toléré auparavant ne l’est plus de nos jours. Si un salarié à un problème, c’est l’entreprise qui en a un. Dès son arrivée à la présidence du syndicat, Catherine Quérard a adhéré a Stop Sexisme. Notre rôle est pédagogique. Il faut donc pouvoir aborder ces questions sans pour autant tomber dans la caricature, l’exagération. Ce sont des faits de société. Pour autant, comme toujours, le droit français est en retard, et notre devoir est alors d’éclairer les professionnels du CHR en amont.»

Autrement dit, à travers ce rendez-vous en ligne, le GHR plaide, et pas seulement lui, pour un management à la fois intégré et inclusif et montrer ainsi le meilleur de la profession. Une démarche qui pourrait même faciliter le recrutement de jeunes talents.

Prochain rendez-vous en distanciel : d’ici à fin novembre, voire décembre. Le GHR compte aller plus en profondeur et aborder la question de l’apparence physique des salariés. Peut-on imposer tel ou tel vêtement ? Ne pas accepter les tatouages, les boucles d’oreilles pour les hommes, les cheveux longs, etc. ? Rendez-vous est pris.

Trois cas d’études

1 – Vie privée, vie professionnelle, quelles frontières ?

Le code Civil, le code du Travail et la Convention européenne des droits de l’Homme garantissent le respect de la vie privée et familiale du salarié.

-Deux cas de licenciements injustifiés : tourner légèrement vêtue dans un clip de rap pour une salariée d’un établissement catholique. Réception d’une revue pornographique sur son lieu de travail.

-Deux cas de licenciements justifiés : tenir des propos à caractère sexuel et avoir des attitudes déplacées en dehors du temps de travail, mais à l’égard de personnes avec qui des relations professionnelles existent. Second cas : dissimulation par un DRH de sa relation amoureuse avec une salariée représentante syndicale (manquement à l’obligation de loyauté envers l’entrepreneur).

La qualification des faits est primordiale. Si des tensions palpables existent dans un couple travaillant dans la même entreprise, le dirigeant doit-il sanctionner ? Non, nous sommes là face à un fait touchant à la vie privée. A condition, qu’il n’y ait pas d’incidence sur les obligations contractuelles. En revanche, s’il existe une preuve de l’existence d’un lien direct ou indirect avec l’activité professionnelle et que le fait peut être préjudiciable à l’entreprise, alors une peine sera justifiée. En pratique, un serveur qui a passé la nuit avec la témoin de la mariée dans l’hôtel où il travaille ne commet pas de faute, si les faits se sont déroulés en dehors des horaires de travail. Inversement, un cuisinier et une serveuse qui ont une relation sexuelle avant le service dans la cuisine sont sanctionnables : non-respect des règles d’hygiène.

2 – Vie intime et entreprise, non à la discrimination !

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Selon le code du Travail (loi du 27 mai 2008), la discrimination englobe toute distinction ou traitement défavorable non justifié par les compétences professionnelles.©DR

Les mesures concernées sont multiples : recrutement, formation, promotion, rémunération, etc. La discriminution est soit directe (traitement moins favorable), soit indirecte (règle neutre en apparence). A noter : la mauvaise foi d’un salarié dénonçant une fausse discrimination est une faute grave (Cour de Cassation 13 janvier 2021). Cette ségrégation touche en premier lieu à l’orientation sexuelle, mais également à des remarques sur l’apparence, des jugements sur la vie privée d’une personne (le fait d’avoir participé à une fête, type Gay-pride), ne pas être fumeur, des inégalités de traitement entre salariés, selon le lien familial ou autre avec l’employeur…

Comment prévenir, comment agir ?

-Pour le chef d’entreprise : éditer un règlement intérieur clair, mettre en place des procédures de signalement, comme un salarié référent diversité, et informer les équipes à ces questions.

-Pour le salarié : disposer d’un droit d’alerte.

-Outils utiles : défenseur des droits, inspection de travail, les outils du GHR.

3 – Sexisme, agressions sexuelles : identifier et prévenir 

Il est, là-aussi, primordial de qualifier les comportements afin de mieux les contrer. La pyramide des violences sexistes et sexuelles (VSS) comporte ainsi cinq étages :

1er étage : les agissements et outrages sexistes. Cela concerne toute démarche liée au sexe d’une personne portant atteinte à sa dignité ou à créer un environnement dégradé.

2e étage : les injures sexistes. Elles sont commises envers une personne ou un groupe.

3e étage : l’harcèlement sexuel. Toute forme de pression grave, même non répétée, et/ou imposer, deux fois consécutivement, avec des propos ou des comportements à connotation sexiste ou sexuelle.

4e étage : l’agression sexuelle. Atteinte commise avec violence, contrainte, menace ou surprise.

5e étage : le viol.Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise.

Le sexisme se cache aussi sous différentes formes verbales. Sur le ton de la bienveillance, « Dites-moi ma jolie ». Voire sous le masque de l’humour, « Les femmes ne savent pas choisir les vins.» Dernier degré, l’hostilité. « C’est évident, pour arriver à ce poste, tu es passé sous la table.»

Que faire face à ces fléaux ? Le chef d’entreprise se doit de mettre en place dans le cadre du CSE un référent harcèlement sexuel. Et un règlement intérieur explicite, comme énoncé précédemment pour les discriminations. Outre le fait de favoriser des enquêtes en interne, il devra aussi inciter la victime à porter plainte et, en même temps, prononcer des sanctions.






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