L’appellation Vacqueyras sur le devant de la scène

  • Temps de lecture : 4 min

L’appellation Vacqueyras a dévoilé les vignerons lauréats de la 25e édition de son partenariat avec le Festival d’Avignon. L’occasion pour les représentants du cru de démontrer l’agilité de ses vins à s’adapter aux contextes actuels.

Les vignerons lauréats de la 25e sélection des crus Vacqueyras par le Festival d'Avignon. (De g. à d. : Nicolas Camallonga, domaine de La Verde, Cécile Dusserre, domaine de Montvac, Virginie et Simon Combe, domaine La Garrigue. Crédit : Laura Duret

Il y a 25 ans, un concours de circonstances insolite a provoqué la rencontre entre les vignerons de Vacqueyras et les organisateurs du Festival d’Avignon. Depuis, un lien solide relie « une ville terre de culture et une autre qui a la culture de la terre » et permet de valoriser ces vins (43 000 hectolitres en 2022) à l’occasion du festival de théâtre le plus couru de France. Ces mots de Marie-Thérèse Combe, présidente de l’appellation au sein de l’interprofession Inter Rhône, salue la passion commune aux trois artisans du vin dont les cuvées ont été choisies pour cette édition anniversaire.

Le Domaine de Montvac, à Vacqueyras a été choisi en rouge pour sa cuvée Vincila 2020. Cécile Dusserre, vigneronne de mère en fille depuis cinq générations, a élaboré ce vin en grenache et syrah (60/40), à l’issue d’une sélection parcellaire minutieuse de vieilles vignes. Il a ensuite été vinifié en cuve béton pour un résultat suave et complexe. Côté blanc, le Domaine de la Verde, à Sarrians (84) s’est distingué avec sa cuvée Odyssey 2021 en clairette et bourboulenc (80/20), après avoir été sélectionné plusieurs fois pour ses rosés. Nicolas Camallonga a repris le domaine familial il y a quelques années et entamé une transformation profonde. Notamment en vinifiant désormais une partie en blanc, en fermentation mallo-lactique « pour valoriser des cépages plus timides comme le bourboulenc » . « Je voulais ouvrir ma gamme, d’autant que mes sols calcaires et de galets se prêtent aux blancs. C’est un nouveau challenge, une autre façon de vinifier. Ce qui est très intéressant pour un vigneron. Ma réflexion vient aussi en cohérence avec l’évolution du climat. Nous sommes obligés d’adapter les cépages que nous travaillons. Mais on tâtonne, c’est une évolution qui se fait sur le long terme. »

Les Vacqueyras blancs comme perspectives

Une étude géologique, menée il y a 5 ans par le spécialiste Georges Truc, a en effet démontré l’intérêt des sols du vignoble de Vacqueyras pour les vins blancs. Une aubaine pour l’appellation, traditionnellement attendue en rouge qui représente 95 % de ses volumes. Mais qui subit, à l’instar des autres crus français, les affres de la météo et l’évolution des goûts des consommateurs. « Du point de vue national, c’est compliqué pour les rouges. Sur Vacqueyras, nous n’avons pas encore ressenti les effets, mais de toutes façons, il faut prendre les devants, analyse Marie-Thérèse Combe. C’est pour ça que le blanc est important et qu’on incite nos vignerons à partir dans ce sens. Sans tout vouloir révolutionner non plus parce que Vacqueyras c’est quand même une base rouge. »

Le blanc a ainsi presque doublé en volume en cinq ans, atteignant 5 % de la production de l’appellation. Une cinquantaine de vignerons (sur la centaine de caves particulières) sont désormais engagés dans cette voie. « Cette année, j’ai ressenti une grosse baisse sur les demandes en vrac sur le rouge, le marché est totalement déséquilibré par les aléas des récoltes. C’est assez nouveau parce qu’en réalité, la demande en face est là, constate Virginie Combe, du Domaine La Garrigue, récompensé pour sa part dans le cadre du festival pour la cuvée Douce impatience 2022 en rosé (grenache, cinsault, syrah). Nous avons par ailleurs 5 hectares de blancs, une petite partie mais qui est essentielle pour nous car on a une forte demande sur le blanc. »

Le cahier des charges revu

L’appellation Vacqueyras adopte une position dynamique et entend jouer de ses atouts. « Les cépages ont peu évolué depuis 30 ans. Mais nous avons mis en chantier notre cahier des charges et engagé une réflexion sur les cépages pour qu’ils soient plus appropriés aux conditions futures », fait savoir Marie-Thérèse Combe. L’INAO devra se prononcer et les vignerons investis dans cette transition espèrent que ce ne sera pas un coup d’épée dans l’eau. « Il faut ouvrir les décrets dans une perspective de 10 à 15 ans. Autrement, ils seront obsolètes sitôt leur mise en application. Mais tout en ayant des garde-fous sur les questions de typicité, estime Cécile Dusserre du Domaine de Montvac. Le réchauffement climatique nous incite à reconsidérer certains cépages. Nous avons la chance d’avoir une pluralité importante dans notre vignoble pour faire évoluer les choses. »

PARTAGER