Tomme des Bauges : l’autre tomme des alpages

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La tome des Bauges a fêté cette année ses 20 ans d’AOP. Une petite appellation qui continue à préserver l’authenticité de ce fromage au lait cru des Alpes.

Illustration Tome des Bauges
Tome des Bauges. Crédit : Sémaphore et Sitob

Comme tous les vrais fromages, l’histoire de la tomme des Bauges prend racine dans la tradition fermière. Au Coeur du massif des Bauges, « toutes les fermes ou plutôt toutes les maisons avaient une ou deux vaches et fabriquaient ainsi, depuis toujours, leur propre tome. Elle n’était pas commercialisée et servait uniquement à la consommation personnelle dans les montagnes. D’ailleurs, le mot tome porterait qu’un seul “ m ” à cause du mot en patois des Alpes pour désigner ce fromage : toma », explique Caroline Petite, directrice du syndicat de la tome des Bauges.

Sur ce territoire où les colporteurs étaient nombreux, la tome s’est petit à petit muée en monnaie d’échange avant d’être aussi confectionnée par les fruitières du pays au début du XXe siècle. « À l’origine, elles fabriquaient surtout du gruyère, des pâtes pressées cuites » et ont fini par intégrer la production de ce fromage ancestral, « mais toujours en respectant la tradition du lait cru ».

Dans un chaudron en cuivre

Le lait cru fait partie des grands marqueurs de cette AOP obtenue en 2002. « C’est la flore naturelle qui permet de développer tous les arômes. Le monde des tomes est très concurrentiel, alors quoi de mieux que d’exploiter, explorer et valoriser son terroir. » Et dans ce sens, les éleveurs doivent suivre un cahier des charges qui leur impose l’alimentation au foin et à l’herbe issus des prairies naturelles, avec une stricte interdiction pour l’enrubannage et l’ensilage. « Tout ce qui est fermenté est formellement interdit car cela influe trop sur la qualité du lait cru », indique-t-on.

L’AOP a même été jusqu’à exiger la fabrication dans le chaudron en cuivre historique. « C’est un bon conducteur de chaleur et cela permet de garder la bonne température du lait. On fait cailler le lait à l’intérieur, puis on découpe en petits grains pas plus gros qu’un grain de maïs. Ensuite, nous réchauffons un peu à 35-37 °C. » Une étape qui ne permet pas de passer du côté des fromages à pâte pressée cuite, « car il faudrait dépasser les 52 °C pour cela », précise Caroline Petite.

Les tomes sont ensuite moulées puis retournées régulièrement pendant huit heures pour faire écouler le petit-lait. Et le pressage s’effectue de manière naturelle, « les moules sont ainsi faits qu’on peut les empiler. Les tomes se pressent avec le poids des autres tomes ». Vient ensuite le temps de l’affinage qui se fait seulement sur des planches en épicéa de la région, un détail « très important car il existe un réel échange entre le bois et le fromage. Le bois absorbe une partie de l’humidité, et nous les changeons régulièrement ».

Durant cinq semaines, les pièces sont retournées et frottées à la main, « comme une caresse. Nous commençons toujours par les plus vieilles pour récupérer du mucor qui va venir se fixer ainsi sur les plus jeunes ». Légèrement plus petite que sa voisine de Savoie avec 1,1 à 1,4 kg en fin de production, la tome des Bauges puise son originalité gustative dans son terroir, sa texture à la fois ferme et fondante et ses arômes lactiques subtilement boisés. « C’est un fromage de caractère », résume Caroline Petite. Un fromage qui réunit aujourd’hui 50 producteurs de lait, cinq fruitières et 12 producteurs fermiers pour une moyenne de 1 000 tonnes par an. Une appellation qui reste confidentielle et séduit de plus en plus par son authenticité et son identité alpine affirmée.

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