Du métier de bouche à la restauration

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Alors que le produit entre de plus en plus en considération dans les choix des clients, certains professionnels ont été tentés d’intégrer un restaurant dans leur commerce de bouche.

Le restaurant Bidoche.
Le restaurant Bidoche. Crédit : DR.

En cette période où le consommateur appelle de ses voeux transparence et authenticité, de plus en plus d’acteurs sont tentés de jumeler commerce de bouche et restaurant. L’idée n’est pas nouvelle. Dans le quartier des Halles, en 1879, le tripier Alexandre Pharamond avait eu l’idée de créer un restaurant à côté de sa boutique de tripier. Non seulement l’établissement a traversé le XXe siècle, mais il existe toujours sous le nom de Petit Bouillon Pharamond. Plus près de nous, en 1934, Henri Androuët créait à l’étage de sa crèmerie de la rue d’Amsterdam un restaurant qui connut son heure de gloire et aujourd’hui encore, plusieurs fromageries arborent cette enseigne.

Parmi ces concepts hybrides, les boucheries-restaurants sont les plus courantes. On en compte une demi-douzaine dans la capitale. La plus connue reste sans doute la Table du célèbre boucher Hugo Desnoyer. On peut aussi citer Bidoche ou encore TAEM (Paris 11e). On trouve également à Paris une enseigne, Persillé, fondée sur ce principe. Créée en 2014 par Maxence de Warren et David Lebreton, elle a obtenu l’année suivante la palme du Leaders club. Elle contrôle aujourd’hui quatre restaurants en France et se développe au sein des marchés alimentaires comme ceux de Biltoki, à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) ou à Rouen (Seine-Maritime). Pour le dirigeant, Maxence de Warren, ancien ingénieur agronome, aujourd’hui âgé de 38 ans, il existe une complémentarité entre les deux métiers : « Réaliser 400 € de CA en boucherie l’après-midi, cela rentabilise la présence d’une personne qui va également effectuer la mise en place du restaurant le soir. Ensuite, la caution d’une boucherie rassure. Les clients peuvent vite constater que nous sommes à fond dans le métier, cela les rassure. »

La question de la double proposition

Cette formule de double activité comporte cependant des inconvénients. Il faut pouvoir non seulement disposer de personnels polyvalents, mais aussi expliquer une double proposition. « L’activité a mis un an à décoller, le temps que la clientèle identifie ce que nous proposions », confirme Stéphane Louvard qui a ouvert, à Paris, un restaurant-boulangerie qui porte son nom. « Mais désormais, assure t-il, nous servons une cinquantaine de couverts au déjeuner, et 30 à 70 au dîner. La synergie fonctionne. La boulangerie-pâtisserie alimente le restaurant en pain, viennoiseries ou pâtisseries. Cela rassure la clientèle sur l’origine des produits. Ensuite, cela permet à l’établissement de recevoir le public dès le petit déjeuner avec une offre attractive. » Après le déjeuner, la maison Louvard se mue en salon de thé très fréquenté. Les clients dégustent sur place les pâtisseries moyennant un surplus de 1,20 €. En réussissant à instaurer une affaire fonctionnant sans discontinuer de 7 h à 23 h, Stéphane et Virginie Louvard ont ainsi gagné leur pari initial. L’argument du prix n’est pas anodin. En effet, en période de forte inflation sur la viande, Maxence de Warren se félicite aujourd’hui d’acheter des carcasses entières « moins chères que du catégoriel ». En outre, il peut adapter la taille des morceaux proposés sans trop augmenter les prix. L’argument économique est encore plus valable pour des produits très périssables tels que le poisson. Dans son établissement restaurant-poissonnerie parisien, Simon de Goeje justifie que « le restaurant présente l’avantage d’acheter plus largement et d’éviter les pertes. C’est aussi une vitrine appréciable pour faire comprendre à la clientèle l’intérêt de consommer des produits de la mer de très haute qualité ».

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