Des consommateurs de café plus attentifs

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Le café est la boisson chaude la plus prisée en restauration. Les consommateurs des bars et brasseries ne sont pas des spécialistes, mais ils apprécient un petit noir ou un allongé préparé dans de bonnes conditions. Les nouvelles générations de professionnels s’avèrent même plus à l’écoute de la qualité de ce produit.

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Implantée en France depuis 2008, la marque portugaise Delta Cafés a connu une croissance de 39% sur le marché français l’an dernier.

Au comptoir, à table et en terrasse, surtout dans les prochaines semaines, le café n’a pas disparu des bars, des hôtels et des restaurants. Bien au contraire, le consommateur de café aurait tendance à se maintenir et à devenir plus soucieux de la qualité de sa boisson chaude. Si le café était « en chute brutale » dans les CHR il y a une dizaine d’années – à la suite de l’interdiction de fumer dans les lieux fermés et couverts, ou encore à cause du manque d’hygiène et des problèmes d’entretien des machines –, la situation actuelle a bien évolué. « Plusieurs paramètres ont relancé le café. La machine automatique, avec notamment la Nespresso, a permis de faire facilement un bon café. Mais le phénomène qui a le plus amplifié ce retour est l’accélération du café gourmand, estime Bernard Boutboul, président et fondateur du cabinet d’études et de conseil Gira. Avant, un consommateur sur deux prenait un café après son repas de midi. Aujourd’hui, deux sur trois prennent un café – simple ou gourmand – après le déjeuner. »

Malgré tout, les amateurs de café en France restent assez traditionnels concernant la consommation de ce breuvage. « Nous ne sommes pas un pays anglo-saxon. Nous le buvons avant 14 h pour 80% d’entre nous. Nous en consommons le matin et également au moment du repas de midi, mais ensuite nous passons sur des boissons non chaudes, comme des sodas ou des smoothies », ajoute Bernard Boutboul. Au Cannibale (Paris 11e), les commandes de café peuvent s’élever à plus de 150 par jour. En cette fin de matinée, l’un des salariés de cette brasserie branchée du bas Belleville en comptabilise, selon sa caisse, déjà 110. « La tendance est le café noir, l’allongé et l’expresso. Mais les touristes consomment plutôt des crèmes ou s’installent en salle pour un cappuccino », précise Eflamm Le Guen, employé de l’établissement. Depuis environ un an, la fin des règles sanitaires qui prévalaient durant la pandémie de Covid-19 a été bénéfique à ce type de consommation sur place. Mais le contexte récent a un peu fait redescendre cette dynamique. « On a vu une année 2022 qui a retrouvé les mêmes valeurs, en chiffres et en volumes, qu’en 2019. L’État nous a donné la possibilité de revivre et revoir les vieilles habitudes de consommation dans les bars et les discothèques, remarque Luca Casadei, coordinateur CHR de Segafredo pour la partie nord de la France. En 2023, l’inflation due à la crise et la guerre [en Ukraine, NDLR] ainsi que la météo capricieuse sont les conséquences d’une lègère baisse de consommation, autour de 10%. »

Accompagnement des professionnels

En 2019, l’enseigne de torréfaction italienne Segafredo avait lancé une gamme complète autour du café biologique, baptisée Natura Bio, avec entre autres du chocolat en poudre, un biscuit bord de tasse et un café 100% arabica originaire du Pérou et du Honduras. Le leader de l’expresso en Italie, propriété de Massimo Zanetti Beverage Group, s’apprête à mettre sur le marché du CHR français une nouvelle offre. « Nous allons élargir la gamme au second semestre 2023 avec deux cafés d’origine. Un éthiopien, aux caractéristiques florales et fruitées, et un café du Mexique, plus rond et équilibré », informe Luca Casadei, membre de la maison Segafredo France depuis 14 ans, et double champion de France barista.

Nous allons élargir la gamme avec deux cafés d'origine. Un Éthiopien et un café du Mexique.
Luca Casadei, Coordinateur CHR Segafredo France Nord

Segafredo s’appuie depuis plusieurs années sur le café Alleanza, un 100% arabica issu d’un assemblage d’Amérique du Sud et d’Amérique centrale, son best-seller en restauration. Dans ce même souci d’accompagner les professionnels de la restauration, Segafredo proposera bientôt une pâtisserie de bord de tasse bénéficiant du label Rainforest Alliance, signe d’un certain respect de la biodiversité : « C’est un brownie au cacao qui répondra au café en termes organoleptiques. Nous avons des cafés bio et d’origine, et avec ce bord de tasse, nous restons dans la tendance actuelle », considère Luca Casadei. Le CHR serait davantage en demande d’une présence de terrain concernant le café aujourd’hui. Et les professionnels du secteur semblent plus enclins à découvrir de nouveaux horizons, travailler avec de nouvelles marques ou des torréfacteurs émergents.

Volonté de différenciation

Bien que Cafés Richard reste le leader incontesté en matière de distribution de produits comme d’équipements (cf. L’Auvergnat de Paris n° 7086), les restaurateurs et les bistrotiers français s’ouvrent aujourd’hui à des nouveaux acteurs sur le marché du café. Torréfacteur le plus important de la péninsule ibérique, Delta Cafés dispose de plus de 50% des parts de marché au Portugal. Propriété du groupe Nabeiro, créé en 1961, il emploie environ 3.800 personnes à travers le monde. Fournisseurs également de machines pour les professionnels et les particuliers, l’enseigne portugaise a investi le marché français depuis Il compte désormais 5.000 clients dans l’Hexagone, dont 35% sur le secteur CHR. L’implantation de Delta Cafés sur notre territoire semble aujourd’hui payante, puisque la marque a observé une croissance de 39% par rapport à l’année 2020. Si un quart de sa clientèle professionnelle est regroupé en Île-de-France (son siège étant à Paris), Delta Cafés possède des entrepôts dans toute la France, en particulier à Lyon, à Bordeaux et à Nice. « Nous avons différents blends qui sont développés au Portugal. Notre produit phare est le Gold, un blend très équilibré qui va dans toutes les machines à grains. C’est le plus fort sur le CHR, un mix d’arabica et de robusta apprécié par tous nos clients », décrit Maria da Luz Amaral, directrice générale de Delta Cafés France.

Mais l’entreprise portugaise s’inscrit, elle aussi, dans les demandes actuelles du marché, jouant sur la différenciation à travers des références plus haut de gamme (Diamond, Ruby, Platinum) ou une de café issu d’une agriculture biologique. « Le bio progresse aussi, nous avons une offre en grains ou en capsule : c’est dans l’air du temps. Nous sommes torréfacteurs, donc nous pouvons développer de nouveaux produits et de nouveaux blends », précise Maria da Luz Amaral. Ce torréfacteur est installé à Campo Maior, la ville dont est originaire son fondateur, où s’établissent son usine de café et différents sites de production (de vin également) du groupe Nabeiro. La marque portugaise se veut proche de sa clientèle française, en matière de produits donc, mais aussi à travers ses équipes dédiées, qui interviennent pour l’installation des machines à café et le service après-vente.

Une nouvelle génération de restaurateurs – plus jeune et en recherche de nouveaux produits – semble aujourd’hui plus à l’écoute et mieux informée sur les offres de café, grâce à l’apport des réseaux sociaux notamment. « De’Longhi ainsi que d’autres marques ont fait exploser l’offre de machines disponibles chez soi. Et cela se reflète au restaurant. On ne peut pas avoir une consommation de haut niveau à la maison et avoir une qualité moindre au restaurant », abonde Luca Casadei, de chez Segafredo. On observe ainsi le besoin d’un meilleur accompagnement en restauration, qui se reflète également dans les établissements de formation. Luca Casadei a remarqué cette nouvelle demande symbolique à l’égard du café : « Nous sommes sollicités par les écoles hôtelières. Et ce n’était pas le cas dans les années Il y a une demande de connaissance autour du café, comme le vin, c’est un produit noble. »

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