Sirha Omnivore 2024 : entre retour aux sources et innovations

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Alors que le Sirha Omnivore soufflera l’année prochaine sa 20e bougie, l’édition 2024, qui se déroule du 8 au 10 septembre au Parc floral de Paris (12e) s’annonce comme un rappel du chemin parcouru, en programmant des chefs issus des premières éditions. Cette année entame aussi une nouvelle page de l’histoire du festival via le rapprochement avec le Paris Coffee Show.

Sirha Omnivore 2024
Plats du Sirha Omnivore. Crédit White Mirror.

Le millésime 2024 du Sirha Omnivore s’annonce comme un prélude à son 20e anniversaire. Mais également comme une étape supplémentaire franchie, s’inscrivant dans la riche histoire du festival de la jeune cuisine. Et pour cause, en 2003, alors journaliste culinaire, Luc Dubanchet, après avoir été rédacteur en chef du Gault&Millau à la fin des années 1990, décide de lancer son journal, baptisé Omnivore.

« J’allais voir de jeunes têtes mais il y avait peu de chances que ces chefs soient mis en avant avec la présence immuable de grands pontes. De plus, l’époque était le reflet d’un moment charnière dans la création culinaire. Nous sortions d’une période classique, très terroir. Il existait une ébullition dans la création ainsi qu’un enjeu générationnel, explique celui qui est aujourd’hui directeur général de Sirha Food et directeur général délégué de GL Events Exhibitions, organisateur du Sirha Omnivore 2024. Il y a une vingtaine d’années, l’idée de renouvellement générationnel n’était pas si évidente que cela, il y avait une sorte de nivellement sans aucune singularité. »

La première édition a ainsi lieu en février 2006, au Havre (Seine-Maritime), avant de rejoindre Deauville (Calvados) et Paris, successivement, à la Maison de la Mutualité (5e) jusqu’en 2019, puis au Parc floral (12e). L’idée, dans cet événement, reste simple : faire se rencontrer les acteurs de la jeune cuisine. « Les réseaux sociaux n’existaient pas à l’époque », souligne Luc Dubanchet, qui imagine alors Omnivore comme un outil de « création de réseau ». Parce que, même si cela nous semble totalement ahurissant aujourd’hui, les chefs, entre eux, se connaissaient assez peu à l’époque. « Avant, le monde de la cuisine était fermé, avec une volonté des chefs de ne pas montrer, de ne rien divulguer. En cela, Omnivore a cassé les codes », se félicite l’ancien journaliste culinaire.

En effet, la signature du festival est de pousser chaque chef invité à donner à voir, au plus grand nombre, une partie de son processus créatif. Comme une entrée dans l’intimité d’un maître queux. De nombreuses master classes y sont en effet organisées, afin de symboliser l’inspi- ration : première étape avant la transmission. Au total, plus de 3.000 chefs ont foulé la scène du festival. « L’idée est de donner, à travers les master classes et rencontres, des connaissances pour inspirer », confirme-t-il.

Incubateur de jeunes chefs

Un phénomène qui sonne comme l’aboutissement de la doctrine mise en pratique par Paul Bocuse : faire sortir les cuisiniers des cuisines. Un processus poursuivi à travers la médiatisation, toujours plus accrue de ces derniers, par le biais notamment des émissions culinaires à la télévision. Un phénomène qui va de pair, aussi, avec la démocratisation de la cuisine. « Il y a 20 ans, la haute gastronomie n’intéressait pas grand monde. Il fallait de l’argent. De plus, le choix se limitait soit à la gastronomie, soit au bistrot. Il n’existait pas de bistrot créatif. Aujourd’hui, il y a les “foodies”, cette génération de mangeurs qui a fait son apparition au début des années 2010 », indique Luc Dubanchet.

Raison pour laquelle l’événement était à l’origine réservé aux professionnels. Alors qu’aujourd’hui, le grand public représente 20 à 30% du visitorat total, atteignant chaque année entre 6.000 et 8.000 personnes, selon les chiffres avancés par le directeur général de Sirha Food.

Presque deux décennies plus tard, Luc Dubanchet note avec enthousiasme l’évolution du monde culinaire et se satisfait du rôle vivace du festival : « Aujourd’hui, nous constatons une diversité des styles et des parcours. Ainsi qu’une parité quasiment présente partout, s’agissant de la programmation. » Une continuité symbolisée par la direction de Luc Dubanchet, et ce, malgré une évolution de taille. En 2012, le festival est acquis par GL Events, entreprise spécialisée dans l’événementiel, dont le Sirha Lyon.

En 2020, comme suite logique de l’intégration du festival à l’univers Sirha Food, le festival a introduit la marque Sirha dans son nom. « Il n’y a pas eu de transformation sur le fond de l’événement, assure-t-il ainsi. Omnivore représente toujours une porte d’entrée pour la jeune cuisine dans l’écosystème Sirha Food, pour un public compris entre 20 et 35 ans. » Tout en reconnaissant que la puissance de GL Events « aide à la propulsion d’Omnivore » et à la « mise en réseau de partenaires et d’exposants ».

Rapprochement avec le Paris Coffee Show

Les fondamentaux qui ont participé au succès du festival demeurent donc présents. « Il joue toujours ce rôle d’incubateur pour la nouvelle génération, avec une programmation de tête chercheuse, ouverte », complète Luc Dubanchet. En cela, l’édition 2024 n’y fera pas défaut. La programmation sera éclectique, riche en talents reconnus et à connaître. À titre non exhaustif, Manon Fleury et Laurène Barjhoux (Datil*, Paris 3e ), Maxime Bouttier (Géosmine*, Paris 11e), Lucie Berthier Gembara (Sepia, Nantes), mais aussi Mory Sacko (MoSuke*, Paris 14e), Adeline Grattard (Yam’Tcha*, Paris 1er), ou encore Glenn Viel et Jean-André Charial (Oustau de Baumanière***, Les-Baux-de-Provence). Sans oublier les Lyonnais Marie-Victorine Manoa (ancienne cheffe d’Aux Lyonnais, Paris 2e), Tabata et Ludovic Mey, ou encore Jean-Francois Périer-Têtedoie et Florent Poulard (Café Terroir et Monsieur P, Lyon).

Cependant, le festival ne se limite pas à placer les chefs sous les feux des projecteurs. « Nous parlons de transmission, c’est-à-dire découvrir et accompagner. C’est le droit de suite », explique le cofondateur. Plusieurs chefs illustrent à merveille cette notion, comme Anne-Sophie Pic (Le Restaurant***, Valence) et Jean-François Piège (Le Grand Restaurant**, Paris 8e) « qui font partie de l’aventure depuis le début ». Mais également Florent Ladeyn (Auberge du Vert Mont*, Boeschepe), « que nous avons découvert quasiment lorsqu’il s’est installé ».

En plus de la Scène Chef.fe.s destinée aux master classes, le Sirha Omnivore 2024 disposera de son forum (Omnivore Food Forum), dédié aux grandes questions : le recrutement, la place des femmes, les outils économiques… Également les scènes Liquide et Terroirs, mettant en avant respectivement l’univers de la boisson (cocktails, vins, spiritueux, etc.) et des duos composés de chefs et de producteurs.

Scene chefs sirha omnivore
La Scène Chef.fe.s accueillera des master classes de cuisiniers dévoilant leurs créations. Crédit WhiteMirror.
LUC DUBANCHET
Luc Dubanchet, directeur général du Sirha Food, organisateur du festival. Crédit White Mirror.

La Scène Origine du Sirha Omnivore 2024, en partenariat avec le grossiste Transgourmet, accueillera elle des chefs, producteurs et artisans sur les thématiques de la reconversion, de l’entrepreneuriat et de la street food.

Par ailleurs, des food Corners et food trucks accueilleront de multiples chefs, qui signeront des portions salées et sucrées en version street food. Sans compter aussi le Hub Chef.fe.s (réservé aux professionnels), permettant de déguster des plats et d’effectuer des rencontres. Cette année, les visiteurs pourront découvrir plusieurs nouveautés.

Tout d’abord, l’Omnivore Pastry Time, qui propose chaque jour une pause sucrée, dès 16h, mettant en avant neuf jeunes pâtissiers. Ensuite, l’accueil de France Quintessence, salon des spiritueux français, avec une quarantaine d’exposants. Et enfin, un rapprochement avec l’autre événement se déroulant au Parc floral du 7 au 9 septembre : le Paris Coffee Show. « Nous nous sommes retrouvés côte à côte sans nous connaître. L’objectif est de créer le rendez-vous des nouvelles consommations de la restauration et du café », développe Luc Dubanchet. Ce rapprochement entre les deux entités se matérialise par une billetterie et une entrée unique, ainsi qu’une large ouverture entre les deux halls.

Par ailleurs, « les deux événements se tiendront l’année prochaine sur les trois mêmes jours », lâche le directeur général de Sirha Food. Enfin, après la déclinaison du festival au Touquet, depuis 2022, pour célébrer la cuisine du nord, les portes restent ouvertes pour imaginer son pendant, dédié à la cuisine du sud. « Nous avons des projets dans les tuyaux », ne cache pas Luc Dubanchet.

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