Décision business
Alors que la cave coopérative La Chablisienne lance une nouvelle gamme de Chablis dédiés aux millenials avec trois références (Bourgogne Chardonnay, Petit Chablis et Chablis), Damien Leclerc, directeur général de La Chablisienne, revient sur la révision avortée de l’appellation de l’aire géographique bourgogne.
Comment réagissez-vous aux soubresauts qui ont conduit l’Inao à abandonner la révision de l’aire d’appellation bourgogne ?
« Le dossier avait déjà été ouvert en 1937, puis en 2000 et de nouveau déterré en 2020… Donc il est possible, qu’en 2040, ce dossier soit réactivé ! Nous avons eu quelques semaines compliquées car ce projet concernait 64 communes entre l’Yonne, la Côte-d’Or et la Saône-et-Loire. Dans le Chablisien, 16 communes étaient concernées. Les discussions avec l’INAO sont houleuses depuis un certain temps.
Il restait donc une commune, puisque le Chablisien en comporte 17, qui n’aurait pas été affectée. Pourquoi ?
« C’est un mystère, cela relève sans doute de considérations administratives. Cela nous interroge sur les méthodes de l’Inao et les moyens avec lesquels elle les met en œuvre. La retraite de l’Inao a été rapide devant le tollé provoqué par la nouvelle. Nous pensons qu’il y a eu des pressions politiques suite à la création des deux « communautés de communes de bassins », aux côtés des deux préfets de région, pour sauver économiquement le Beaujolais qui traversait une période difficile. Quand les sphères politiques et économiques rentrent conjointement dans des considérations d’appellation et de délimitation, cela ne se passe pas toujours comme prévu.
Comment a évolué La Chablisienne ces dernières années ?
« Sur les quatre dernières années, nous avons connu trois années déficitaires en termes de récoltes, et une année très généreuse avec le millésime 2018. Cette année-là, et à titre exceptionnel, nous avions demandé que le rendement butoir soit déplafonné pour nous permettre de reconstituer des réserves et affronter les aléas climatiques. Malheureusement, la discussion avec l’Inao, à l’image de ce qu’il s’est passé ces dernières semaines, a tourné court. Ils se sont cramponnés au code rural et au cahier des charges. Par ailleurs, nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 57 millions d’euros en 2019, soit le plus bel exercice de l’histoire de La Chablisienne avec une belle progression sur l’ensemble des réseaux, grâce à ce fameux millésime 2018. Malheureusement, la récolte de 2019 a chuté de 20 % par rapport à une récolte classique. Notre cave coopérative représente aujourd’hui 250 vignerons à l’origine de neuf millions de bouteilles l’an passé.
Que vous évoque le réchauffement climatique ?
« Il y a une volonté de tous de regarder vers le Nord pour contrebalancer le réchauffement climatique. Les secteurs granitiques du Beaujolais pourraient très bien supporter les cépages syrah ou meunier et faire des vins très qualitatifs. On parle beaucoup du réchauffement climatique et j’ai vraiment le sentiment que c’est en train de s’accélérer. Les cahiers des charges vont devoir évoluer, mais dans des délais raisonnables. On ne peut pas imaginer d’attendre dix ans avant d’évoquer ces sujets avec l’Inao. En Bourgogne, nous avons vu le mercure monter jusqu’à 50 degrés. C’est du jamais vu…
La Chablisienne propose-t-elle de nouvelles cuvées ?
« Nous avons créé une nouvelle gamme, destinée exclusivement au CHR, pour séduire les millenials. On trouve trois références : Bourgogne Chardonnay (7,20 €), Petit Chablis (9,20 €) et Chablis (11,95 €). Elles constituent ainsi une nouvelle marque que nous avons baptisée La Chablisienne By La Chablisienne. Les bouteilles sont transparentes et permettent de bien voir la robe des vins. C’est une clé d’entrée à destination des jeunes avec une approche moins identitaire. Ce sont des vins axés sur la fraîcheur à consommer dans les deux ans. L’objectif de production est de 300 000 cols.
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