Décision business
Entretien avec Rémi Vervier, directeur général de Champagne Palmer & Co
Décision Boissons (DB) : Quelle est l’histoire de la maison Palmer ?
Rémi Vervier (RV) : Maison Palmer a été créée en 1947. Nous sommes une coopérative qui n’est pas classique dans son modèle, parce que souvent c’est pour mettre en commun les moyens de production. Là, ce n’est pas du tout le projet. Il s’agissait de sept vignerons qui vendaient déjà leur champagne, issus de villages de premier et grand cru, et qui avaient envie de créer une nouvelle marque et réaliser un assemblage haut de gamme avec leurs premiers et grands crus. En termes marketing, nous pouvons dire qu’il s’agit d’un projet produit, et non pas un projet moyen de production. C’est quelque chose d’assez particulier parce que tous étaient des vignerons qui possédaient leur propre pressoir, qui savaient vinifier. Voilà la naissance de Palmer qui est très importante parce qu’aujourd’hui, elle révèle un peu qui nous sommes, dans le sens où nous avons une réputation qualitative et une culture très forte autour du produit champagne avec beaucoup d’attention portée à la vigne et en cuverie. Aujourd’hui, Palmer représente 420 hectares pour 320 vignerons. La taille a beaucoup changé mais nous avons cette idée d’appartenir à la même famille.
DB : Quel est le style Palmer ?
RV : Élégant, frais, mais assez présent. C’est-à-dire qu’il y a du vin. C’est toujours la recherche de l’équilibre entre la structure, la finesse, la fraîcheur. Nous travaillons beaucoup sur cette idée d’équilibre. Il faut qu’il y ait tout, mais il faut de l’équilibre. Si vous appuyez trop sur un côté ou sur un autre, vous allez perdre ce que nous appelons l’élégance.
DB : Quelle valeur la maison défend-elle ?
RV : L’excellence, c’est-à-dire l’envie de faire bien, en permanence. C’est quelque chose qui nous est très cher, notamment pour le travail dans les vignes. Nous sommes ainsi sur des démarches de certification environnementale depuis 2015. Nous serons au-delà de 75 % de certification pour la prochaine vendange. Et nous pensons arriver à 100 % pour la vendange 2023. Cette quête d’excellence se retrouve également dans le travail quotidien du vin. Avec cette idée de vouloir bien faire, nous avons la possibilité que les vignerons évoluent, notamment dans leurs pratiques viticoles. La Montagne de Reims est notre terroir de prédilection puisque c’est 55-60 % des terroirs de Palmer. Nous avons également le Sézannet, autour de Barbonne (51), les terroirs à chardonnay dans la Marne, qui représentent une vingtaine de pour cent de nos approvisionnements. Nous avons encore une vingtaine de pour cent qui vont se situer autour des Riceys, dans l’Aube, où notamment nous allons trouver les pinots noirs. Et puis, nous avons aussi un peu d’approvisionnements qui viennent de l’ensemble de la Champagne.
DB : En quoi ces certifications vous sont importantes ?
RV : Elles sont importantes à différents égards. Si je prends l’angle économique, je ne pense pas qu’aujourd’hui cela soit durable d’avoir la volonté de commercialiser des vins qui n’ont pas une orientation environnementale sérieuse. Et puis, il y a aussi autre chose, nous sommes une coopérative ancrée dans notre terroir. Donc en termes de développement durable, nous nous devons de faire attention à notre environnement, de préserver nos terroirs, nos vignes parce qu’ils constituent tout simplement notre outil de production. Notre ambition n’est pas de faire de l’argent pour l’année qui vient, mais de faire durer un modèle. Nous sommes donc dans cette logique de durabilité et de développement durable. Nous avons la Haute valeur environnementale (HVE) et Viticulture durable en Champagne (VDC), certification champenoise sensiblement plus exigeante que HVE. Il s’agit d’une sorte d’intermédiaire entre HVE et le bio dans le sens où les restrictions sur l’utilisation des produits phytosanitaires sont plus proches du bio. Et VDC prend à HVE la dimension plus globale de l’exploitation. Nous avons également un courant bio qui se développe et que nous encourageons. Je pense que d’ici deux à trois ans, le bio pourrait représenter une quinzaine ou une vingtaine d’hectares.
DB : Comment s’organise votre marché ?
RV : Le marché de Palmer est 100 % dans l’univers traditionnel, c’est-à-dire la restauration et les magasins divers et variés, mais pas dans la grande distribution. Et évidemment nous avons des ventes aux particuliers, une boutique en ligne. Nous vendons aujourd’hui 75 % à l’export. Notre premier marché est la Suède. Historiquement, Palmer est très fort dans ce pays parce que cela fait plus de 20 ans que nous avons le même distributeur. Ensuite, le Royaume-Uni et les États-Unis à peu près au même niveau. Puis, l’Italie, l’Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas. Nous sommes présents en Asie, au Japon, en Indonésie. Nous vendons un million de bouteilles par an.
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