Décision business
Au moins un tiers des marques françaises d’eau auraient mis en œuvre des techniques de purification sur des eaux en bouteille vendues comme de source et minérales naturelles, une pratique alors interdite. C’est ce que révèlent nos confrères du Monde et de Radio France à travers une enquête de plusieurs mois publiée ce 30 janvier 2024. La totalité des marques de Nestlé Waters (Hépar, Perrier ou encore Vittel) ont été concernées. La filiale du groupe suisse Nestlé a d’ailleurs reconnu les faits ce 29 janvier.
Mais l’affaire concerne également la société Sources Alma, qui commercialise les marques Cristalline, St-Yorre, Vals ou encore Vichy Célestins. Une enquête administrative conduite par la DGCCRF relève, la concernant, de nombreuses pratiques qu’elle qualifie de frauduleuses, comme le mélange avec « l’eau du réseau », c’est-à-dire du robinet, « mélanges d’eaux non autorisés de plusieurs sources exploitées par une même usine », « adjonction de gaz carbonique industriel dans des eaux minérales dites “naturellement gazeuses” », « traitements non autorisés pour prévenir ou traiter les contaminations épisodiques survenant à la source », « pratiques de microfiltration non autorisées », « filtration de l’eau aux UV ».
Pratique trompeuse
La généralisation de ces systèmes de purification était destinée à traiter les eaux qui pouvaient connaître, de manière épisodique, des contaminations bactériennes ou chimiques. Cependant, ces mesures sont autorisées pour l’eau du robinet et celles rendues potables par traitement, et non pas pour les eaux de source et celles minérales naturelles, ces dernières étant censées être pures naturellement. Une pratique alors trompeuse pour le consommateur, étant précisé que l’eau du robinet, pour laquelle de tels traitements sont autorisés, est « vendue plus de 100 fois moins cher en moyenne que l’eau minérale », comme le précise Le Monde.
Évolution de la législation
Par ailleurs, dès août 2021, le Gouvernement est mis au courant, par Nestlé Waters lui-même, de ces traitements illicites. Ce dernier demande même l’autorisation de maintenir certains des traitements interdits ainsi que l’évolution de la règlementation en vigueur. À défaut, l’entreprise « estime que l’exploitation de certains sites […] pourrait être abandonnée », comme l’indique Le Monde. Avec, en jeu, des milliers d’emplois.
Le Gouvernement diligente alors une enquête administrative, dont le rapport est rendu en juillet 2022 et fait état de pratiques illicites. L’ARS Grand-Est décide de saisir le procureur de la République d’Épinal qui, en novembre 2022, ouvre une enquête préliminaire. Néanmoins, le Gouvernement, en février 2023, fait évoluer la législation, permettant l’utilisation d’une microfiltration plus poussée. Enfin, une question d’ordre sanitaire se pose : quels sont les risques en cas de retrait des dispositifs de traitement UV et de charbons actifs, laissant ainsi la seule microfiltration ? « Si [cette dernière] peut arrêter certaines bactéries pathogènes, elle ne peut rien contre les virus, bien plus petits », alerte Le Monde.
Chargement ...